- Bundesliga
- Cologne
- Billet d'humeur
Pourquoi Anthony Modeste mérite l’équipe de France
En inscrivant un triplé face au Hertha Berlin samedi dernier, Anthony Modeste a porté son total à 22 buts en Bundesliga cette saison. Et rien que pour ça, il mérite d'être appelé chez les Bleus. Au moins pour voir, quoi. Parce qu'on ne sait jamais.
Une reprise du gauche, à l’entrée de la surface, à la suite d’un service de Yuya Osako. Une frappe croisée du droit après un service de Matthias Lehmann et un départ à la limite du hors-jeu. Et enfin, un nouveau duel remporté face à Rune Jarstein après un sprint depuis son camp. Samedi, devant le public du RheinEnergieStadion qui n’a d’yeux que pour lui, Anthony Modeste a inscrit un triplé face au Hertha Berlin. Il facture désormais 22 buts en 25 rencontres de Bundesliga, se replace dans la course au trophée de Torschützenkönig, le roi des canonniers, en compagnie de Robert Lewandowski et Pierre-Emerick Aubameyang. Bref, Anthony Modeste joue la saison de sa vie de ce côté-ci du Rhin, et visiblement, en France, on s’en fout complet.
C’est qui, Dominique Heintz ?
Il joue pour qui déjà, Anthony Modeste ? Ah oui, le 1.FC Cologne. Un club où la mascotte est un vrai bouc et où le public chante des chansons de carnaval. Un club qui a compté dans l’histoire du football allemand, mais qui est gentiment rentré dans le rang depuis. Y a qu’à voir la gueule des joueurs : qui sont Dominique Heintz, Marco Höger ou encore Simon Zoller ? Personne. Des joueurs moyens, bons parfois, qui ont un maximum de réussite et qui profitent du fait que Gladbach, Schalke et le Bayer Leverkusen fassent n’importe quoi pour se retrouver aux portes de l’Europe. En plus, les mecs ont une tactique toute simple : bétonner derrière, servir Modeste, et advienne que pourra. Ça tombe bien, le Français trouve régulièrement le chemin des filets cette saison. Et rien que pour ça, il faudrait l’appeler en équipe de France ? Allons, un peu de sérieux…
60% des buts de son équipe
Oui, un peu de sérieux ! Oui, Anthony Modeste mérite d’être appelé en équipe de France. Justement parce qu’il joue la saison de sa vie. Justement parce qu’il confirme cette année, après une campagne 15/16 bien négociée avec le « FC » , où il avait trouvé le chemin des filets à 18 reprises (et trois passes décisives) en 36 rencontres toutes compétitions confondues. Cette année, Modeste a inscrit 22 buts sur les 37 de son équipe, soit un ratio de 60%. Le gars a bossé dur pour en arriver là. Certes, lui qui croquait déjà beaucoup à Bordeaux, a continué ses vendanges du côté de Hoffenheim (malgré les caviars de Volland et Firmino). Mais depuis qu’il est à Cologne, c’est un autre homme. Et ce serait un peu malhonnête de dire que l’équipe joue pour lui. Dans la force de l’âge, Modeste joue aussi pour son équipe : lui aussi avale les kilomètres pour revenir défendre, quand il ne tape pas des déboulés pour aller marquer (coucou le troisième but contre le Hertha !). Il ne joue pas la Ligue des champions ? Peut-être. Mais s’il jouait l’Europe, il n’affronterait pas le Real Madrid ou le FC Barcelone toutes les semaines non plus. Et il affronte déjà des gros calibres en Bundesliga, ce championnat qui est deuxième derrière l’Espagne à l’indice UEFA cette saison.
Un travail qui mérite d’être récompensé
On peut dire ce qu’on veut, mais le natif de Cannes part de plus loin que les autres. C’est un fait : en Allemagne, Anthony Modeste n’a pas de Thomas Müller, de Marco Reus, d’Arjen Robben ou d’Ousmane Dembélé pour le servir. Hormis Timo Horn et Jonas Hector, les types qui composent l’équipe du 1.FC Cologne sont d’honnêtes joueurs de Bundesliga, qui font le boulot. La vraie machine à sublimer le collectif, c’est Modeste, et il mériterait d’être récompensé. À vingt-huit ans, il est dans la force de l’âge et n’a jamais été aussi serein face au but. Après tout, lorsqu’on sélectionne le Gignac mexicain, inviter Modeste à découvrir Clairefontaine n’a rien d’un scandale. Bien au contraire. Pas pour être un titulaire indiscutable en pointe, cela va de soi, mais il mérite au moins d’être testé, de saisir sa chance lors d’un bout de match ou de quelques sessions d’entraînement. Voir ce que ça donne, modestement. En plus, ça ne coûterait pas cher de le faire venir : un billet de Thalys Cologne-Paris Gare du Nord, puis un TER jusqu’à Rambouillet, voire un Uber pour finir le trajet. Mais non, en France, Anthony Modeste n’est pas assez sexy. Et son club non plus. Dommage. En football aussi, nul n’est prophète en son pays.
Par Ali Farhat, pas loin de Cologne