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Porto, se réinventer ou sombrer
Fait inédit sous la présidence de Pinto da Costa, le FC Porto vient de boucler sa troisième saison sans titre. L'époque où les Portistas régnaient dans partage sur l'Ouest ibère est révolu. Et cette période de disette pourrait bien se prolonger si les dirigeants du club ne réagissent pas rapidement.
Et de trois. Fut un temps où la phrase sous-entendait un énième triplé d’un FC Porto hégémonique. Cette époque semble révolue. À moins qu’il ne s’agisse que d’une petite escale sur la case lose pour la machine conçue par Pinto da Costa depuis son arrivée à la tête du club, en 1982. Toujours est-il que la pause s’éternise. Les Dragons ne gagnent plus rien depuis août 2013 et une victoire en Supercoupe du Portugal contre Guimarães. Dimanche dernier, les hommes de José Peseiro ont manqué leur seule occasion de sauver les apparences en s’inclinant aux tirs au but contre Braga, en finale de la Coupe du Portugal, au terme d’un match qui n’a que trop bien résumé la saison, ou plutôt le chemin de croix des Portistas.
Début de rencontre catastrophique, défense aux abois, bourde du gardien (en l’occurrence Hélton), réaction tardive et inefficacité au moment de conclure. La seule satisfaction qui ressort de cette énième déroute se nomme André Silva, excellent avec l’équipe B depuis plus d’un an, mais qui semblait jusqu’ici un peu trop léger pour s’affirmer chez les grands. L’international espoir lusitanien a claqué un doublé de grande classe pour, peut-être, lancer sa carrière de buteur en série. Le FC Porto en a en tout cas cruellement besoin pour se relancer dans les mois à venir. Mais il faudra beaucoup plus qu’un jeune prometteur pour revenir à la surface. Car résumer le mal qui frappe les Dragões à un seul attaquant reviendrait à faire fausse route.
Un futur entraîneur « jeune, dynamique et ambitieux »
Alors, à qui la faute ? José Peseiro ? Certainement pas. S’il est évident que le technicien a commis des erreurs sur le banc portista, il ne faut pas oublier qu’il a repris le navire en pleine tempête. Que se serait-il passé s’il avait préparé l’équipe et la saison à sa guise ? Nul ne le sait, et nul ne le saura, car selon toute vraisemblance, et malgré un contrat encore valable pour un an, le finaliste de la Coupe de l’UEFA 2005 ne sera plus l’entraîneur des Azuis e Brancos quand le coup d’envoi du prochain exercice sera donné.
Son remplaçant devra être « jeune, dynamique et ambitieux » , a déjà avancé le club. Les supporters réclament André Villas-Boas, tandis que les bookmakers voient plutôt Marco Silva (ex-Sporting actuellement à l’Olympiakos) débarquer sur les côtes portugaises. Quoi qu’il en soit, la direction doit réfléchir à un entraîneur qui puisse incarner un projet de jeu fidèle à l’identité du club et une ligne de recrutement qui colle avec. Car aujourd’hui, tout est à refaire à Porto, y compris chez les dirigeants. Ces derniers doivent se faire à l’idée que l’époque où leur structure était en avance sur celles de Benfica et du Sporting est bel et bien révolue.
Quand le chat dort, les souris dansent
Pendant que Porto se contentait de briller sur le marché des transferts en réalisant de grosses plus-values au détriment de ses jeunes prometteurs, les rivaux travaillaient dans l’ombre. Depuis l’arrivée de Bruno de Carvalho aux commandes du Sporting, les Leões se sont offert une cure d’austérité et ont renoué avec leur centre de formation, tandis que le président de Benfica a mené une politique hybride avec Jorge Jesus pour assurer les résultats, pendant qu’une révolution jeune se préparait en coulisses.
Porto a été le dernier à suivre le mouvement, et ne l’aurait peut-être jamais fait sans le retour des équipes B en D2. Coup de bol pour Pinto da Costa, les gamins de la réserve sont redoutables, et ont eu l’occasion de le démontrer en écrasant la Liga Vitalis 2015/16 loin devant Chaves. Il conviendra donc de puiser dans ce réservoir de talents pour relancer la machine. Les récentes promotions de Rúben Neves, Sérgio Oliveira et André Silva laissent penser que les mentalités évoluent dans le bon sens dans les hautes strates du FCP.
Reprendre le dessus sur les agents et fonds d’investissements
Évidemment, les seuls produits issus de la formation ne suffiront pas à refaire de Porto le rouleau compresseur qu’il était jusqu’en 2011. Il faut aussi recruter intelligemment et bétonner l’arrière-garde. Activer l’option d’achat de Miguel Layún serait une sage décision tant le Mexicain aura été précieux cette saison. Mais c’est surtout dans l’axe et dans l’animation offensive que le bât blesse. Il faudra recruter intelligemment dans ces secteurs, même si des renforts de poids comme le prometteur Otávio et Josué, actuellement en prêt, sont assurés d’être de la fête à la reprise.
Porto a toujours su recruter. Les scouts sont les mêmes et leur savoir-faire ne s’est pas évaporé en trois ans. Mais il faut que ceux à qui un Pinto da Costa affaibli sous-traite l’institution portista écoutent ce que leurs recruteurs ont à dire plutôt que de se laisser séduire par le discours d’agents ou fonds d’investissement qui essayent de placer leurs joueurs dans l’un des meilleurs tremplins d’Europe pour en retirer un maximum d’argent. Si le club se laisse corrompre, c’est tout un empire sportif bâti sur plus de 30 ans qui s’écroulera, et tout un championnat qui en pâtira.
Par William Pereira