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Porto, la terre du Milieu
Modifié à plusieurs reprises depuis l'arrivée de Lopetegui à l'Ouest de la péninsule Ibérique, l'entre-jeu est le secteur qui pose le plus de soucis à l'entraîneur espagnol. Aujourd'hui, il semble enfin avoir trouvé la bonne formule. Le trio gagnant s'appelle Neves-Imbula-André André.
En donnant les clés de l’Estádio do Dragão à un Espagnol, ancien gardien du FC Barcelone et grand fan de Pep Guardiola de surcroît, Pinto da Costa savait à quoi s’attendre. Il savait que Julen Lopetegui lui permettrait de faire venir des joueurs espagnols ou ayant évolué en Liga, d’attirer des noms un peu plus ronflants que ceux qui avaient atterri à Porto sous Paulo Fonseca. Mais pas seulement. L’entraîneur basque a redonné les pleins pouvoirs à l’entre-jeu portista, base du jeu de possession qui caractérise l’actuel deuxième de Liga Nos. En début de mandat, il a d’ailleurs commis l’erreur de vouloir donner trop de responsabilités à son milieu, en instaurant un jeu trop axial, trop horizontal et pas assez percutant. Malgré le talent et la créativité de joueurs comme Brahimi, Óliver Torres et Quaresma, Lopetegui s’est vite rendu compte qu’il fonçait droit dans le mur. Son Porto terminait certes ses matchs avec 70% de possession, mais il frappait et marquait peu. De quoi endormir et provoquer l’ire de supporters portistas en manque de beau jeu depuis le départ de Villas-Boas à Chelsea en 2011. À partir de janvier 2015, l’ancien technicien des jeunes de la Roja entame sa rédemption. Son milieu garde les clés du jeu, mais il percute plus, prend plus de risques et écarte sur les côtés, zone de prédilection du traditionnel jeu à la Porto (voire à la portugaise). Problème, avec un effectif surtout taillé pour un football axial, Lopetegui ne peut alors qu’effectuer à moitié une révolution qu’il terminera sur le marché des transferts à l’été 2015. En recrutant portugais (Danilo Pereira, André André) et un peu étranger (Bueno, qui peut aussi évoluer devant, ainsi qu’Imbula), le coach des Azuis e Brancos a complètement bouclé un virage idéologique, qui, s’il a le mérite d’exister, ne sera validé que par le retour des trophées dans le musée du FC Porto.
Imbula monte en puissance
Orphelin d’Oliver et de Casemiro, tous deux retournés à Madrid, le coach des Dragons n’a pas eu d’autre choix que de renouveler son milieu de terrain, à l’exception de la révélation Rúben Neves et du Mexicain Héctor Herrera. Le hic, c’est que ces deux-là rentrent d’un été fatigant (Euro U21 pour le premier et Gold Cup pour le second) et ne peuvent exprimer la pleine mesure de leur talent dès le mois d’août. Tant mieux pour Danilo Pereira, recruté par Porto à Maritimo, et bien évidemment Giannelli Imbula, qui gagnent quasiment gratuitement leur place de titulaire dans le triangle portista. Héctor Herrera survit tant bien que mal dans ce milieu sans joueur créatif jusqu’à ce que Lopetegui se rende compte que son joueur est rincé et qu’André André (fils d’André, ancienne gloire locale) pouvait apporter le soupçon de folie qui manque alors au FCP. Le hic, c’est que ça ne suffit toujours pas. Danilo Pereira est un formidable 6, mais son profil est trop proche de celui d’Imbula, qui, s’il évolue un cran plus haut, n’apporte pas grand-chose de plus que son coéquipier sur le plan technique. Avec un 6 et un 6 et demi, et malgré l’hyperactivité d’André, l’entrejeu manque de calme, d’intelligence, de technique. Le double pivot n’avait pas marché à l’époque de Fernando et Defour et reste un mauvais souvenir pour le club. L’entraîneur basque doit donc trancher entre Danilo et Imbula. C’est le premier qui saute au profit d’un Rúben Neves reposé. Un gage de qualité pour Imbula ? Bof. C’est surtout que le petit prodige lusitanien préfère évoluer devant la défense plutôt qu’en relayeur. L’ancien Marseillais a tout de même le mérite de hausser son niveau de jeu à partir du mois d’octobre. Moins timide, plus percutant, il se montre redoutable quand il a un peu d’espace à l’horizon. À lui de progresser dans les espaces plus réduits.
Le losange comme alternative ?
Avec le jeune capitaine portista replacé en milieu défensif, Porto garde plus le ballon, l’utilise mieux. Toujours aussi impressionnant de justesse, Neves oriente le jeu sur les ailes et devant malgré sa position reculée. Toutes proportions gardées, il y a du Pirlo dans l’idée. Devant lui, Imbula doit verticaliser le jeu, grappiller des mètres et si possible servir aussi de rampe de lancement pour les joueurs de couloir. André deux fois, lui, intervient plutôt dans les 35 derniers mètres. S’il peut servir de point de fixation pour Imbula, son premier rôle est d’offrir la dernière passe ou de conclure, comme contre Benfica. C’est aussi lui qui démarre le pressing devant Aboubakar (un peu paradoxal quand on sait que le Camerounais évolue en pointe). Derrière, Imbula se charge des deuxièmes ballons, tandis que Neves a en réalité rarement besoin d’aller au duel.
Si le trio semble indéboulonnable, la présence du très discret Bueno sur le banc, qui peut être utilisé comme faux 10, peut offrir à Lopetegui une alternative tactique crédible par le biais d’un milieu à quatre en losange, avec l’Espagnol à sa pointe. Le rôle créatif de l’ancien joueur du Rayo, jusqu’ici très peu utilisé, compenserait le caractère trop axial d’une telle disposition tactique. Reste à savoir qui seraient les trois autres milieux. Pour Brahimi, André, Neves et Imbula, le siège n’est pas assez grand. Heureusement pour le trio, ce système relève pour le moment de l’expérience et ne deviendra sûrement jamais la norme. Ce mercredi soir, ce seront donc les mêmes qui occuperont le milieu de terrain face au Maccabi. Jusqu’ici, ça a bien fonctionné en C1. On ne change pas une équipe qui gagne.
Par William Pereira