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Porte fermée pour la réserve du Real Madrid
Le Real Madrid Castilla, réserve du club merengue, s’est distingué cette année en écrasant la troisième division, rejoignant du coup la Liga Adelante. Deux jeunes du club ont aussi éclaboussé l’Euro U19 de leur talent, promettant encore un bel avenir à l’Espagne. Mais pas au Real Madrid, incapable d'intégrer les meilleurs joueurs de son centre.
Ils sont deux. Voire trois. Casillas et Arbeloa, auxquels on peut ajouter Esteban Granero. Trois membres (ou prétendant) de l’équipe-type de Mourinho à sortir de la réserve du Real Madrid. Et encore, Arbeloa et Granero ont dû aller faire leurs gammes ailleurs (La Corogne puis Liverpool pour le premier, Getafe pour le pirate) pour qu’on leur fasse vraiment confiance. L’habituelle comparaison avec l’ennemi catalan fait forcément contraste. Valdés, Puyol, Busquets, Thiago Alcántara, Iniesta, Xavi, Messi, Pedro. Fierté régionale oblige, ils sont nombreux au Barça à faire la renommée dumade in Masia. Au sein de la Maison Blanche, l’ascenseur qui mène de la réserve à l’équipe première est assez poussiéreux.
Dernier clásico, le 21 avril. Guardiola aligne huit joueurs formés au club. Mourinho, deux. La différence est énorme, mais c’est bien le Real qui est allé s’imposer au Camp Nou, s’assurant au passage son 32e titre de champion d’Espagne. La politique de recrutement madrilène n’est donc pas forcément moins efficace que celle du Barça, mais elle coûte plus cher, même si l’écart est à nuancer, le Real rentabilisant sur l’apport marketing de ses superstars. À l’heure de la crise économique et de la nécessité pour les clubs espagnols de conduire des politiques sportives moins dépensières, y compris pour les deux géants, le Real Madrid aurait intérêt à se tourner davantage vers son centre de formation. Car si très peu de joueurs de l’équipe réserve portent le maillot merengue en Liga, ce n’est pas parce qu’ils sont tous mauvais.
L’exigence des résultats immédiats
Soldado, Negredo ou Mata, tous internationaux espagnols, en sont la preuve. Au cours de la saison 2006-2007, les deux derniers cités ont terminé meilleurs buteurs du Real Madrid Castilla, l’équipe réserve du club merengue, mais ont rejoint dans la foulée Séville et Valence plutôt que le groupe pris en main par Bernd Schuster. Une habitude. Ces dernières années, les deux présidents du club ont tenté de changer la donne. La méthode Calderón consistait à refiler les meilleurs espoirs de la maison à d’autres équipes du championnat, avec une priorité au rachat (à bon prix) en cas de confirmation. La méthode Pérez encourageait plutôt la transmission directe. Mais ni l’une ni l’autre n’ont vraiment fonctionné.
L’intégration marche parfaitement pour les gardiens de but, Casillas et ses deux remplaçants, Antonio Adán et Jesús Fernández (récemment ajouté au groupe par Mourinho), provenant tous du club. Mais ça coince sur les autres lignes. La concurrence est trop forte. La pression trop importante. Y compris pour les dirigeants, de qui socios et actionnaires exigent sans cesse des résultats immédiats, et qui préfèrent donc se tourner vers des joueurs confirmés plutôt que vers leurs jeunes espoirs. Difficile de gratter des minutes au milieu des poids lourds de l’équipe première. Le quatuor offensif merengue, Özil-Ronaldo-Benzema-Di María, ça fait quand même 180 millions d’euros à bousculer.
« Mourinho sait qu’il a de très bons jeunes dans la réserve »
Mourinho semble plus intéressé par l’étage d’en dessous que ses prédécesseurs. Le Portugais convoque souvent les jeunes de la cantera pour s’entraîner avec le groupe pro. La relation entre les deux est facilitée, accentuée. Mais pour l’instant, aucun joueur de Castilla ne pointe sérieusement le bout de son nez. Trop peu de place leur est laissée pour venir titiller leurs aînés au plus haut niveau. Ils sont là, pourtant, et ils frappent à la porte. « Mourinho sait qu’il a de très bons jeunes dans la réserve, nous sommes prêts s’il fait appel à nous » , a lancé Jesé Rodríguez après avoir remporté l’Euro U19 avec l’Espagne. Comme Derik Osede derrière, son partenaire au Real Madrid Castilla, Jesé a marqué les esprits au cours de la compétition, qu’il a terminé meilleur joueur et meilleur buteur.
Ce grand espoir du foot espagnol a aussi été l’un des acteurs principaux de la montée de la réserve madrilène en deuxième division. La saison dernière, il est entré deux fois en jeu avec l’équipe première. C’est peu. Mourinho pourrait lui donner plus de temps de jeu cette saison, à moins que lui aussi ne quitte le club avant d’y goûter vraiment. Benfica est sur le coup et aurait déjà posé 10 millions sur la table. Il y rejoindrait Javi García, lui aussi produit de la Fabrica, mais déconsidéré par l’étage d’au-dessus et aujourd’hui aux portes de la sélection. L’autre crête de la réserve, Joselu, acheté par le Real il y a trois ans et buteur les rares fois où on a fait appel à lui, sait aussi que son avenir en première division se fera probablement ailleurs que dans la capitale. À Madrid, Casillas, Arbeloa et Granero ne sont que des exceptions.
Par Léo Ruiz