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Pollersbeck, la victoire dans les chaussettes
Face à l’Angleterre en demi-finale de l’Euro Espoirs 2017, le héros allemand de la soirée s’appelait Julian Pollersbeck. En arrêtant deux penaltys, le jeune gardien a envoyé ses coéquipiers en finale. Tout ça grâce à un coup de filou que lui a inspiré un autre grand gardien de la Mannschaft, Jens Lehmann.
Nathan Redmond a beau être le joueur le plus expérimenté des Espoirs anglais, il n’a pas su résister à la pression. Julian Pollersbeck plonge du bon côté et les Allemands U21 se qualifient pour la finale de l’Euro 2017 au bout de la séance de penaltys. Mais cela est-il vraiment dû au hasard ? Pas sûr. Quelques instants avant que le jeune joueur de Southampton s’élance, le gardien allemand retrousse gauchement sa chaussette avec ses gros gants et jette un coup d’œil pas très discret à un bout de papier qui traîne là par hasard. Déjà pour un tireur précédent, Tammy Abraham, le jeune Julian Pollersbeck s’était adonné au même rituel. Résultat, deux penaltys arrêtés. Ainsi, on peut facilement imaginer que l’Allemand avait une antisèche dans la chaussette pour savoir de quel côté il fallait plonger. Un bel exemple pour la jeunesse.
Julian Pollersbeck consulting his hidden notes before the shootout win over England U21s. Saved two penaltys. pic.twitter.com/ahlc1Uj0rQ
— Kev Maxi (@FussballKevMaxi) 27 juin 2017
La liste de Lehmann
Pourtant, le gardien n’a fait que suivre l’exemple de son aîné, Jens Lehmann. Lors du quart de finale de la Coupe du monde 2006, c’est encore un petit bout de papier consulté durant la séance par le gardien allemand qui avait fait parler et qui lui aurait permis d’arrêter les tentatives de deux Argentins. Le gardien d’Arsenal à l’époque avait confectionné une petite liste pour savoir où les tireurs de l’Albiceleste allaient mettre le ballon. Sur chaque penalty, Jens Lehmann a plongé du bon côté grâce aux consignes inscrites sur une feuille arrachée d’un bloc-notes de l’hôtel de la sélection allemande. « 1. Riquelme, en haut à gauche ; 2. Crespo, grande course d’élan : à droite/petite course : à gauche ; 3. Heinze, en bas à gauche ; 4. Ayala, longue attente, grande course d’élan à droite ; 5. Messi, à gauche ; 6. Aimar, longue attente, à gauche ; 7. Rodríguez, à gauche » , est-il écrit. Mais pour le dernier tireur, Esteban Cambiasso, l’Allemand a un petit trou de mémoire et est obligé de sortir son papier pour vérifier de quel côté l’Argentin va tirer. Un plongeon à gauche plus tard, la Mannschaft est en demi-finale de son Mondial. Pourtant, le nom de Cambiasso n’était pas sur la liste de Lehmann. Le gardien allemand avait réussi son pari : tenter le bluff et sortir le papier simplement pour installer le doute chez l’Argentin. Cette petite feuille est depuis entrée dans la légende et a été vendue aux enchères au profit d’une association caritative.
El machete que usó Jens Lehman para atajar los penales en 2006 está expuesto en el Museo de Historia de Bonn. pic.twitter.com/NcxftpwAMt
— Gazza (@unsudaca) 29 avril 2017
Poker face
Dans un football de plus en plus professionnel, qui fourmille d’analyses en tout genre, il n’est pas étonnant que les gardiens se renseignent un peu sur les côtés préférés des tireurs de penaltys. Mais si savoir où vont tirer Crespo, Riquelme et compagnie semble faisable, il apparaît plus compliqué de faire la même chose pour des jeunes joueurs anglais quasiment inconnus et qui n’ont pas l’habitude de tirer un penalty avec leur club. Et si Jens Lehmann avait à chaque fois choisi le bon côté, son cadet s’est manqué à trois reprises, preuve que son papier n’était pas si précis que ça. « J’avais un bout de papier et c’était une petite aide – ou ça devait l’être. En fin de compte, je me suis décidé sur le moment. En général, je ne me prépare pas énormément pour ça. J’ai adoré qu’on aille aux penaltys » , a justement déclaré Julian Pollersbeck après la partie. Ce dernier n’aurait-il donc pas lui aussi tenté un coup de bluff pour mettre la pression sur le dernier tireur anglais ? Cela en a tout l’air. Sortir ce papier à ce moment, c’est une provocation volontaire du gardien, c’est dire au joueur en face : « Je sais où tu vas tirer. » Un dilemme s’impose alors pour le buteur : tirer de son côté de prédilection et prendre le risque que le gardien l’arrête ou tirer de l’autre côté et prendre le risque de moins bien tirer son penalty. Un moment de doute souvent fatal à ce stade de la séance de tirs au but. Et si le bout de papier de Julian Pollersbeck était un coup de bluff, qu’y avait-il marqué dessus ? Sa liste de course ? Un mot de sa maman du type « Vas-y mon petit Kartoffel, tu peux le faire ! » ? Rien, tout simplement ? Nathan Redmond s’est sans doute posé les mêmes questions et il a raté. De quoi finir le moral dans les chaussettes.
Par Robin Richardot