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Philippe Troussier évalue le Japon
Sélectionneur des Samouraïs de 1998 à 2002 – avec lesquels il accrocha à domicile les 8es de finale du Mondial 2002 –, Philippe Troussier garde toujours un œil sur ses anciennes ouailles. Pour So Foot, le « Sorcier blanc » évalue les chances du Japon pour cette Coupe du monde au Brésil. Garanti sans Pikachu mascotte.
Pourquoi vont-ils sortir du groupe ?
Pour Philippe Troussier, ça ne fait aucun pli. Ce qui fera sortir le Japon d’un groupe à leur portée, c’est « l’expérience, bien évidemment. D’abord acquise par la participation à toutes les précédentes éditions. Ensuite, parce que 80% de l’effectif japonais évolue en Europe » . En effet, depuis 1998, les Nippons ont été de toutes les Coupes du monde. Ce qui n’est pas le cas de la Colombie, absente des joutes mondiales bissextiles depuis la… première qualification des Samouraïs, en 1998. Quant à la Côte d’Ivoire, on sait très bien qu’elle se fera sortir dès les poules, malgré un Cameroun dans chaque orteil de Yaya Touré. Quid de la Grèce ? « Ils vont les battre, ça c’est sûr » dixit Troussier. Autre argument en faveur de l’archipel : « Son unité, dans le sens mécanique du terme. Ils vont jouer ensemble, être disciplinés. Leur force, c’est surtout le collectif. » Pas d’ego chez les Nippons, donc, malgré une qualité technique sous-estimée selon l’ancien entraîneur de Marseille : « À l’échelle mondiale, ils font partie du top 5. » Rien que ça.
Pourquoi vont-ils se faire sortir en huitièmes derrière, comme d’habitude ?
Parce qu’ils n’ont pas de banc de touche. Derrière les jalons Kawashima, Okazaki et surtout Honda et Kagawa, « le groupe de joueurs est assez restreint. L’équipe tourne autour de 12, 13 joueurs. Si la FIFA devait réglementer le nombre de participants par équipe en Coupe du monde à 14, le Japon serait champion du monde. Sauf qu’on a des groupes de 23 joueurs et du coup, des nations qui ont une équipe A et une équipe B. Quand on voit les effectifs allemand ou espagnol, l’équipe B est presque aussi forte que l’équipe A » . Le Japon, quant à lui, mériterait une nouvelle lettre à lui seul. « Il y a des postes assez faiblards. Je pense notamment à la défense centrale. Bon, il y a Maya Yoshida, qui joue à Southampton, mais ils n’ont pas de leader charismatique en défense. Point barre. » Des paroles lourdes de sens venant d’un homme qui a entraîné Koji Nakata.
Le vrai Samouraï de l’équipe ?
Keisuke Honda. Le transfuge du Milan AC reste, selon le « Sorcier blanc » , la seule véritable valeur sûre du groupe japonais. « Si le Mondial se passe bien pour le Japon, Honda sera mouillé à 80%. Il est le baromètre : il a de la personnalité ; il influence le jeu – offensif comme défensif ; et surtout, c’est un tireur de coups de pied arrêtés. Aujourd’hui, presque un but sur deux est marqué sur coup de pied arrêté. » De son côté, Kagawa n’obtient pas les faveurs de l’ancien sélectionneur, encore trop « suiveur » et incapable de peser dans les grands matchs à son goût. « Kagawa est un très bon joueur mais sans Honda, il n’aura pas la même efficacité. Alors que Honda sans Kagawa apportera ce plus quand même. Individuellement, on pourrait comparer l’apport de Honda à celui de Cristiano Ronaldo en équipe du Portugal. » Appelez-le KH10.
Le Ronin de l’équipe ?
Appelé une seule fois par Zaccheroni en quatre ans, Yoshito Okubo refait surface dans le groupe nippon à la faveur de 26 buts marqués en 33 matchs avec les Kawasaki Frontale. Une bonne chose pour Philippe Troussier. « Il peut commencer le match, je le mets facilement dans les 12, 13 capables d’être en équipe première, notamment parce qu’il a l’expérience (54 sélections). Et puis, il mérite. En attaque, après Okazaki, c’est le désert donc Okubo est un bon choix. » On connaît désormais la raison qui a poussé Gregory van der Wiel a déclarer forfait pour le Mondial.
Quelle partition pour Zaccheroni ?
Même s’il affectionne un 3-5-2 tout italien, Alberto Zaccheroni aurait laissé ses traditions en Europe, un peu par dépit. « Il a déjà testé ce système, mais ça n’a pas marché. Donc il va évoluer en 4-2-3-1 compte tenu de son effectif et il utilisera peut-être une défense à 3 s’il est mené au score. » Mais Philippe Troussier prévient : chassez le naturel, il revient au galop. « S’il y a bien une tendance de la défense à 3, c’est en Italie. La Juve a gagné le championnat cette année comme ça. » Soit l’équipe que Zaccheroni a entraînée avant de devenir sélectionneur du Japon, soit dit en passant.
Le vrai rival du Mondial ?
« La Côte d’Ivoire. C’est le match à ne pas rater. Dès le premier match, ils ont une finale à jouer. D’autant plus face à la Côte d’Ivoire qui est une équipe lente, qui met du temps à démarrer. De plus, cette équipe tire essentiellement sa force de l’individu. L’équipe ira bien si Kalou fait ses 40 mètres de course et si Gervinho fait ses 50 dribbles. Mais ils ont un jeu collectif très pauvre. Ils ne défendent pas bien, sont parfois même feignants dans le replacement. Et on connaît les doutes fréquents de cette équipe ivoirienne. » Et Philippe Troussier sait de quoi il parle : il a entraîné l’ASEC Mimosas pendant quatre ans puis les Éléphants durant l’année 93.
Par Matthieu Rostac