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Peter Crouch est-il une girafe ?
En vacances, Peter Crouch a dégainé LA photo de famille, posant aux côtés de deux girafes. Une simple blague ? Pas seulement. Parce qu'en fait, Crouchie est un enfant de la savane. Voilà pourquoi.
Il pose tranquillement, coup de soleil sur le bout du nez, manches relevées, short beige, cannes interminables menant à d’immenses panards. Il est en vacances et, pour lui, l’été, « c’est passer du temps avec sa famille » . Avec ces mots, Peter Crouch se démarque des plus jet-setteurs de ses collègues, arborant la sérénité de ses 36 années. Cette saison, il a marqué ses dix buts avec Stoke City, il peut bien goûter un repos mérité. En famille, donc. Et qui dit famille, dit photo : là, posées à côté de Crouchie… deux girafes lui mangent dans la main. Le génie enfantin de Peter Pan a frappé. Grand dehors, gosse dedans, Crouch rigole et fait rire. Et même si ses lunettes empêchent d’apercevoir ses longs cils de girafon, le doute n’est plus permis : Peter vient de la savane, a été élevé par les grandes dames. La preuve, il n’a même pas besoin de lever les bras pour les nourrir.
Summer for me is about time with family . pic.twitter.com/dtft1CZoyl
— Peter Crouch (@petercrouch) 19 juin 2017
Grands, mais costauds
Oui, Crouch est une girafe, même si le poids et la taille de ces dernières sont sans commune mesure avec les mensurations du grand Peter. Le docteur Alexis Lécu rappelle ainsi quelques bases d’altitude concernant la Giraffa camelopardalis : « Ça varie entre mâles et femelles, mais les mâles peuvent flirter avec les six mètres et peser jusqu’à une tonne deux, voire une tonne trois. » Reste que si elle est autrement plus imposante que la tige anglaise, la girafe s’en rapproche dans sa conception. Ainsi, quand le directeur scientifique et chef vétérinaire du Parc zoologique de Paris pointe un animal « plein de particularités physiologiques uniques, une machine particulière, avec un squelette sur mesure » , difficile de ne pas faire le rapprochement avec la silhouette de l’attaquant anglais, improbable athlète de haut niveau avec ses 2,03m pour 77 kg.
Il y a l’émargement, et puis il y a le contenu. L’attitude, d’abord : gauche, quelque chose de disgracieux en elle, la girafe semble étrangère à son environnement, inadaptée comme Crouchie sur le gazon. On ne donne pas cher de sa peau, ni de ses guiboles qui semblent pouvoir péter à tout moment. Or, au contraire, la girafe est très solide sur ses appuis. La faute à des os « très riches en calcium et en phosphore. D’ailleurs, on peut parfois la voir manger des cadavres ou des os, détaille le chef vétérinaire Lécu. Ce qui est rare pour un herbivore, mais qui s’explique par ses besoins élevés de ces deux éléments. » De là à imaginer Crouch farfouillant les tripes de ses adversaires façon Walking Dead, il n’y a qu’un pas que la raison recommande de ne pas franchir. Surtout si c’est un pas de Peter.
Même solides en dedans, avec leurs dégaines de fragiles, on prendrait facilement Peter et les girafes pour des victimes, des proies faciles. Erreur. Toute personne ayant un jour cherché sur internet à comprendre la filiation intellectuelle de Donald Trump, et donc ayant fini par mater des vidéos de combats d’animaux sauvages, le sait : lions ou hyènes – les seuls à oser s’y attaquer – ne font pas les fiers face à la girafe. Parce que, malgré l’altitude, la girafe tricote très vite, et envoie volontiers ses aiguilles dans le bide de son agresseur. C’est simple, une girafe dans un bon jour se fera rarement surprendre par ses prédateurs. Comme Crouch, qui, tout au long de sa grosse quinzaine d’années de carrière, ne chiffre que deux petites blessures, dont un rhume. Et qui, parfois, sait envoyer un énorme kick dans le buffet d’un Joe Hart lourd comme un lion après la graille.
L’écho des savanes
Au-delà de la technique, c’est la symbolique qui rapproche Peter Crouch de sa famille des savanes. On les dit sympathiques, agréables et curieux. Certes, contrairement à l’échassier de Stoke City, la girafe n’a aucun sens de l’humour. D’ailleurs, selon le docteur Lécu, elle est un animal « franchement pas très intelligent, comme une vache qui serait étirée » . Tout le contraire de l’Anglais qui brille par son second degré, n’hésitant pas à verser dans l’auto-dérision. Comme lorsqu’il avoue qu’il ne devrait « peut-être pas poser à côté d’un jockey » . Ou quand, à la question de savoir ce qu’il serait devenu s’il n’avait pas été footballeur, il répond : « vierge » .
Reste le capital sympathie. Bob Cerfontaine, fils d’un professionnel du côté de Nancy dans les années 1960, a nommé son agence de production audiovisuelle Monsieur Girafe, en référence à son 2,04m : « J’ai une girafe en peluche d’un mètre cinquante que j’emmène chez mes clients dès qu’ils ont compris qu’on était des gens sympas et un peu fous. On fait des photos, on s’amuse un peu. D’ailleurs, on en a une avec une Miss France. Mais je ne me suis jamais servi de la girafe pour pécho ! (rires) » Cette ligne, celui qui a réalisé l’habillage graphique du film Par-delà les hauteurs, starring Fred Thiriez, ne la franchit pas. Au contraire des girafes, et de Peter Crouch.
Un robot en voie de disparition
Comme d’autres, le mâle au long cou doit se faire respecter s’il veut s’accoupler. Il va « se battre violemment en se servant de ses pattes, pour effrayer les autres, pour faire le ménage » , prévient le docteur Lécu. Crouch, lui, utilise une technique plus pacifique, mais pas moins efficace : sa fameuse danse du robot, qu’on pourrait tout aussi bien appeler danse de la girafe en chaleur. Ainsi, en Espagne, où, après s’être enjaillé en club, il avait fini dans les bras de Monica Mint, prostituée bavarde qui s’était empressée de s’étaler dans les colonnes de News of the World : « Il était plus affectueux avec moi. Il n’est pas spécialement beau, mais il est très gentil. » Peter, cette girafe.
L’avantage des bêtes sympas, c’est qu’on leur pardonne tout. Tout le monde. À commencer par sa femme, Abbey Crouch, et sa belle-sœur, Elle Clancy, qui envoie à son grand dadais de beau-frère des cartes personnalisées pour son anniversaire. Non seulement on leur pardonne tout, mais on les regrettera quand elles ne seront plus là. La NASA d’abord, qui après s’être « inspirée de la girafe pour faire des combinaisons anti-g, parce que leur pression sanguine est telle pour envoyer le sang au cerveau qu’elles devraient avoir les pattes qui gonflent » , se penchera peut-être, avec le docteur Lécu, sur le cas Crouch. Le grand public, ensuite. Récemment, les girafes sont entrées dans la liste rouge des espèces menacées. Quant à Peter Crouch, le jour viendra où on devra dire adieu au joueur. Le 26e à avoir atteint la barre des 100 buts en Premier League, quand même. Et à jamais la première girafe, donc.
Come on @elle_clancy are you taking the p**s pic.twitter.com/YIHJoKCHSv
— Peter Crouch (@petercrouch) 31 janvier 2017
Par Eric Carpentier
Pour prendre le petit-déj avec les girafes, rendez-vous au Parc zoologique de Paris, à Vincennes. L'occasion, peut-être, d'y croiser Peter. Ou pas.