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Pepe, de la boucherie à l’épicerie fine
Isolé, mal-aimé et sur le départ, Pepe a troqué tous ces qualificatifs en un été. Avec l’arrivée de Carlo Ancelotti, l’ancien boucher du Bernabéu est devenu l’un des tout meilleurs défenseurs du monde. De quoi faire flipper son - pour le moment - binôme Sergio Ramos.
Ce samedi, au Santiago Bernabéu, 50e minute de jeu. Javi Marquez, ballon au pied, est mis au sol de manière rugueuse par Pepe. Impressionnante, l’intervention du Portugais d’adoption n’en reste pas moins sans conséquence pour le joueur d’Elche. L’arbitre sortira un carton jaune mérité sur une action dont Képler Laveran Lima Ferreria, aka Pepe, avait perdu l’habitude. Cette saison, avec Carlo Ancelotti aux commandes, le central merengue a perdu ses mauvaises habitudes. Celles qui lui valaient les qualificatifs de « peste » , de « boucher » ou encore de « terreur » . Apaisé, sans doute plus mûr, l’homme qui souffle aujourd’hui ses 31 bougies n’a pas pour autant perdu de sa puissance physique. Plus dans l’anticipation que la charge, le coup d’épaule que le coup de coude, il fait le bonheur de la meilleure défense européenne de 2014 – 3 buts encaissés en 14 matchs de Liga et Copa del Rey. À l’heure d’affronter les Teutons de la Ruhr en huitièmes aller de la Ligue des champions, Pepe fera donc ce qu’il sait faire de mieux : défendre, envers et contre tout.
Varane, de problème à solution
Cette soudaine unanimité peut étonner. D’autant plus que Pepe était sur le point de quitter le navire madrilène l’été dernier. En cause, des nerfs rarement sous contrôle, une proximité avec Mourinho et une nouvelle concurrence française. Soldat du Special One, le central portugais a été de toutes les batailles. De la série interminable des Clásicos de mai 2011 à son furieux coup de sang face à Getafe en 2009, Pepe a longtemps joué avec la patience du board madrilène. Lors de l’intersaison dernière, les arguments sportifs primaient. Après s’être désolidarisé de Mourinho à la fin de son règne, il s’est trouvé bien seul dans le vestiaire madrilène. D’où la saillie de Julien Cazarre à l’époque : « Pepe aurait été résistant en juin 45. » D’autant que face à l’explosion au plus haut niveau de Raphaël Varane, Pepe ne soutenait pas la comparaison technique et tactique. C’est oublier que le Portugais est un warrior. Alors, il a cravaché, s’est remis en selle et s’est laissé convaincre par Carlo Ancelotti de son importance.
Pour Pablo Polo, journaliste pour Marca, Pepe a avant tout acquis « une nouvelle maturité dans le jeu » : « C’était un joueur très dur, très provocateur qui était au cœur de nombreuses polémiques. Il est beaucoup plus calme dorénavant. » Il le doit avant tout à Carlo Ancelotti, qui n’a pu se passer de lui. Avec la blessure de Raphaël Varane et la longue convalescence qui s’en est suivie, Pepe a conservé sa place de choix aux côtés de Sergio Ramos. « Il a connu une période difficile, sa relation avec Mourinho s’est très mal finie, poursuit Pablo Polo. C’était devenu le « Mourinho du terrain ». Ça ne l’a pas aidé, il n’arrivait pas à tout gérer. Avec Ancelotti, il doit seulement se focaliser sur le terrain. » De fil en aiguille, Pepe prouve à son nouvel entraîneur qu’il est indispensable. Il devient le deuxième joueur le plus utilisé de l’effectif derrière Di María, et son statut de titulaire par défaut devient celui d’un indéboulonnable. Car, mieux dans sa tête, il ne frise plus la correctionnelle avec les arbitres. A contrario de Sergio Ramos.
La préférence d’Ancelotti
Raphaël Varane de retour, Carlo Ancelotti devra de nouveau résoudre un énième problème de riche : qui du trio Ramos-Varane-Pepe s’en ira squatter le banc ? Pour le moment, l’Italien n’a pas encore eu à trancher dans le vif. L’ancien Lensois ne pouvant enchaîner deux matchs en une semaine, la réponse est repoussée. Alors que la période printanière s’approche, et sa légion de matchs capitaux, l’option préférentielle de Carlito semble être Pepe-Varane. Sergio Ramos, bien que capitaine du navire merengue, ne verrait pas son statut le protéger. Iker Casillas pourrait lui en parler. Toujours trop nerveux, trop suffisant, l’Andalou a pris un train de retard sur son alter-égo portugais. Si Pepe est toujours autant averti, ses interventions fleurent moins l’agression mais plus la robustesse. Désormais, lorsqu’il tombe au sol, ses crampons ne se retrouvent plus dans le torse de son adversaire. Sa relance, autrefois son gros point faible, s’est nettement améliorée. Avec Raphaël Varane, il formerait une charnière des plus complémentaires. Et des plus frisées.
Par Robin Delorme, à Madrid