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Pellissier, une dernière fois sur son 31
Comme Robin van Persie, Sergio Pellissier a annoncé sa retraite en fin de saison à l’âge de 40 ans après 512 matchs et 139 buts marqués pour le Chievo. Une perte énorme pour l'autre club de Vérone, qui va devoir faire sans son numéro 31 l’an prochain en Serie B. La fin d’une idylle longue de dix-sept ans.
Ils sont peu, ces joueurs à avoir une aura suffisante pour incarner un club. Ces fameuses « bandiere » , devenues si rares de nos jours qu’elles se comptent sur les doigts d’une main. En Serie A cette saison, ils étaient encore cinq au coup d’envoi du championnat à pouvoir se targuer de faire partie de ce cercle très fermé. Il y avait Marek Hamšík au Napoli, parti finalement cet hiver en Chine. Il y a toujours Giorgio Chiellini à la Juventus, Francesco Magnanelli à Sassuolo et surtout le plus grand de tous, Daniele De Rossi et ses dix-huit saisons à la Roma.
Il n’y aura bientôt plus Sergio Pellissier, le doyen de cette confrérie vouée peu à peu à s’éteindre. L’annonce est tombée vendredi, à trois jours d’un Inter-Chievo qui ressemble au dernier gros match d’une carrière presque entièrement passée avec le blason du Chievo sur la poitrine. Dans son maillot d’entraînement moulant au possible, Pellissier est pour la première fois depuis un bon moment loin d’être à l’aise. La gorge nouée, c’est lui qui annonce qu’il va falloir s’habituer à faire sans lui. À tourner la page : « J’y vois la fin d’un cycle et c’est naturel de laisser la place aux jeunes. Cette équipe se doit de retourner le plus vite possible à la place qu’elle mérite, en Serie A ! » Une mission qui s’annonce loin d’être aisée, surtout sans son bomber quadragénaire.
De la Champions à la Serie B
Lorsqu’il débarque pour de bon au Chievo après deux ans en prêt à la SPAL, personne n’aurait pu imaginer que ce jeune attaquant né dans le Val d’Aoste allait devenir une véritable légende en Vénétie. Il fait ses débuts en Serie A avec les Gialloblu à l’orée de la saison 2002-2003 contre Brescia, mais devra attendre trois ans pour tutoyer les sommets. En compagnie de Franco Semioli et de l’Italo-Brésilien Amauri, il compose le trio magique qui porte le Chievo à la quatrième place du championnat (grâce, en partie, au scandale du Calciopoli qui lui fait gagner une place avec la rétrogradation de la Juventus) et donc à un tour préliminaire de Ligue des champions face au Levski Sofia. Le meilleur classement de l’histoire d’un club que personne en Italie n’attendait si haut, mais qui sera suivi d’une descente aux enfers avec une relégation en Serie B en guise de retour sur terre.
Pas de quoi perturber Pellissier pour autant, qui reste fidèle au Chievo et ramène le club parmi l’élite l’année suivante avec un titre et vingt-deux buts inscrits à la clef. À titre personnel, le buteur va connaître sa demi-heure de gloire le 6 juin 2009, à Pise. Date qui correspond à sa seule sélection en équipe nationale, face à l’Irlande du Nord en amical (3-0), où il ne manque pas de s’illustrer : dos au but au niveau du point de penalty, il enchaîne un contrôle de la poitrine parfait avant d’expédier une volée gagnante qui termine dans la lucarne. Preuve que la fidélité finit toujours par être récompensée.
San Siro, le dernier grand rendez-vous
À en croire le grand fan de Bud Spencer et de Terence Hill, son plus grand regret restera ce match à Turin face à la Juventus lors de la saison 2010-2011. Le Chievo peut gagner pour la première fois de son histoire sur la pelouse de la Vieille Dame, mais va devoir finalement se contenter d’un nul au goût de défaite (2-2). Comme Pellissier le raconte au quotidien véronais l’Arena, il y avait la place ce soir-là pour conjurer le sort : « J’avais évité la sortie de Buffon, puis un autre joueur avant de me présenter dans la surface de réparation. Ce soir-là, j’aurais pu marquer, mais j’ai préféré la donner à Uribe qui n’a pas réussi à le faire. »
Le 3 mai 2012, Sergio Pellissier entre un peu plus dans la légende de la Serie A en inscrivant son centième but face à Novara. Les années passent, l’amateur de vin continue de planter jusqu’à cette saison qui termine définitivement de l’user. Les points de pénalité, un effectif usé et surtout la démission précoce de Giampiero Ventura dès le mois de novembre rendent fou le bombermaison. Sur Instagram, Pellissier accuse : « Sur cette photo, vous pouvez voir toute la colère qui m’anime en ce moment. Il y a eu cet été pesant et ce problème de points, un début de saison à oublier et puisqu’il n’y a jamais de fin, la démission d’un entraîneur qui voulait déjà partir à peine arrivé ! Fou !!! »
Un mois plus tard, Sergio se laisse aller à parler politique pour le programme Un giorno da Pecora sur RadioRai, et là aussi, l’homme ne passe par quatre chemins quitte à choquer certains : « Je serais plus enclin à voter à droite qu’à gauche.(…)Mussolini ? Selon moi, il a fait beaucoup de belles choses, mais aussi de beaucoup moins belles. Les belles ? Il a construit beaucoup de routes, il a créé beaucoup de choses importantes pour l’Italie. Et puis ensuite, il a fait du dégât avec cette alliance désastreuse avec les nazis. » Face à l’Inter ce lundi soir, Pellissier va donc vivre l’un de ses derniers frissons. Sa dernière opportunité de marquer dans une enceinte de rêve, face à Handanovič qu’il respecte énormément. Avant de faire ses adieux, les vrais, face à la Sampdoria le 19 mai prochain au Bentegodi. Son ultime match à domicile en Serie A, qui correspond au dernier avant au moins une saison pour le Chievo dans l’élite. Oui, tout ça ressemble bel et bien à la fin d’un beau chapitre.
Par Andrea Chazy