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Pedro, l’ultime roue du carrosse
Seul titulaire discutable dans l’esprit d’Antonio Conte, l’Espagnol parvient pourtant à faire gagner des matchs tendus à Chelsea par son talent. Et se pose, par ricochet, comme un de ses hommes forts dans la course au titre.
En réalité, personne ne devrait être surpris de ce genre d’images, déjà observées de longues années à Barcelone. Dès son premier match avec Chelsea, le 23 août 2015, Pedro participait amplement à la victoire des Blues contre West Bromwich Albion en ouvrant le score après vingt petites minutes de jeu et donnait alors raison à José Mourinho, qui avait fait le forcing pour attirer le Catalan en échange de trente millions d’euros. Il s’agissait alors du vrai Pedro, pas de celui qui allait traverser la saison comme une ombre, au même titre que son équipe.
Un an et demi plus tard, les choses ont changé : Mourinho est parti, Antonio Conte a pris la place et Pedro ne cesse de prouver que son talent ne s’est pas envolé. Et qu’il peut faire gagner des points aux Blues à lui tout seul. Par un seul geste, une seule frappe. Ce fut le cas contre Tottenham, le rival unique pour le titre, lors d’un match primordial disputé à Stamford Bridge en novembre. Les Spurs sont alors ultra dominateurs et mènent logiquement grâce à un but de Christian Eriksen. Pendant que les Blues galèrent comme jamais pour se créer des occasions, l’Espagnol sort de sa boîte et détruit les cerveaux adverses sur une inspiration venue d’ailleurs. Résultat : sa teams’impose finalement 2-1 et accroche un succès importantissime au détriment de son seul véritable concurrent.
Le scénario s’est répété le week-end dernier, quand Chelsea bloquait à Everton face à de solides Toffees. Devant le tableau d’affichage qui semble ne pas vouloir bouger, le petit ailier prend ses responsabilités à l’heure de jeu et envoie une praline au fond des cages de Maarten Stekelenburg. Comme ça, sans prévenir. Forcément, les hommes de Ronald Koeman perdent leurs jambes, n’ont plus que leurs yeux pour pleurer et laissent le leader de Premier League les enfoncer (3-0). Voilà le genre d’exploits dont est capable Pedro, qui s’était également distingué sur un une-deux de toute beauté achevé par un tremblement de filet à Leicester, en janvier.
Pourtant, Conte a longtemps considéré (et considère peut-être encore) son joueur miniature comme le seul titulaire discutable. La onzième roue du carrosse, en d’autres termes. Les chiffres le prouvent : Pedro possède le onzième temps de jeu des Blues en championnat, et reste le seul joueur de l’équipe type à ne pas avoir dépassé les 2000 minutes. Ce qui ne l’empêche pas de réaliser une énorme saison, et même de s’approcher des statistiques d’Eden Hazard, le meilleur élément offensif des Londoniens. Le premier a ainsi marqué treize fois (un pion toutes les 171 minutes) et adressé dix passes décisives toutes compétitions confondues… contre seize buts (un toutes les 230 minutes) et sept assistspour le Belge. Signe que l’Hispanique sait être décisif tout en faisant le taf dans le jeu.
Le fameux 3-4-3 qui contente tout le monde
Conte ne s’y trompait pas en janvier dernier sur ESPN. « Nous sommes tous témoins de ses performances, rappelait ainsi l’entraîneur. Il joue d’une manière fantastique, pas seulement avec ses buts, il joue un très bon football, avec et sans le ballon. Il est toujours bien placé au pressing, à la récupération de la balle, et pour aller marquer.(…)Je pense que nous voyons le meilleur de Pedro. Je pense qu’il jouait ce type de football à Barcelone, et j’espère qu’il va continuer ainsi, qu’il va continuer de s’entraîner dur et de progresser. Il est très important pour nous. » Et de louer son comportement dans le 3-4-3 mis en place en octobre. Car c’est un fait : ce schéma tactique ravit Pedro, qui n’avait pas planté une seule fois avant l’instauration de cette organisation. Protégé par Moses (et, évidemment, N’Golo Kanté) derrière lui, la mobylette jouit d’une certaine liberté lorsque Chelsea a le ballon, ce qui lui permet de retrouver son côté créateur de Barcelone. Et de se laisser aller à quelques tentatives osées rendues exceptionnelles quand elles réussissent. Comme quoi, une onzième roue peut s’avérer indispensable pour traverser les chemins qui mènent au titre. Même si elle a connu des moments difficiles l’an dernier lorsqu’elle équipait un bus.
Par Florian Cadu