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Pedro Henrique : « Ronaldinho est le meilleur joueur de tous les temps »
À Rennes depuis l'été 2014, Pedro Henrique tient déjà la route en français pendant toute une interview. L'occasion de donner des nouvelles de sa pommette fracturée contre Nice, de parler de son poste de prédilection, mais aussi de son amour pour le Grêmio Porto Alegre, Ronaldinho ou encore l'Oktober Fest de Santa Cruz do Sul.
Ton nom complet, c’est Pedro Henrique Konzen. Comment on doit t’appeler si on est ami avec toi ? Pedro ?En fait, Pedro Henrique, c’est un prénom, et mon nom de famille, c’est Konzen. C’est un peu à consonnance allemande, car ma famille vient d’une région au sud du Brésil où il y a eu beaucoup d’immigrés allemands et italiens.
Comment va ta pommette, triplement fracturée contre Nice en Coupe de France ?Bien. Maintenant, c’est consolidé. J’ai essayé de jouer avec un masque en CFA, je l’ai enlevé au bout de 10 minutes. Là, cela fait deux matchs que je fais en Ligue 1 sans appréhension. Je fais plus attention qu’avant, je regarde où est le défenseur avant de mettre la tête. Avant les matchs, je me prépare psychologiquement, je me dis que je dois faire attention à ne pas prendre de risques par rapport à la blessure. Et puis une fois sur le terrain, avec le sang chaud, tu oublies, tu penses surtout à rendre service à l’équipe. Jusqu’à présent, cela s’est bien passé depuis mon retour. Quand je suis sur le terrain, j’oublie tout, notamment cette fracture de la pommette.
Sur les derniers matchs, tu as eu des rôles axiaux : attaquant de pointe, milieu offensif axial… À ton arrivée en 2014, on te présentait comme un joueur de couloir. Dans quelle position tu te sens le plus à l’aise ? Sur les côtés, droite ou gauche. Je pense que je suis plus fort sur les côtés, le coach le sait, mais il a fait des tactiques différentes et il a eu besoin de moi dans des postes différents. Je suis là pour aider là où il me demande de jouer. Même s’il sait, et tout le monde sait que je suis meilleur sur une aile. J’aime le côté, car je peux profiter des actions offensives et défensives. J’aime récupérer les ballons avec mon défenseur et lancer une contre-attaque. Sur un côté, je participe au jeu offensif et au jeu défensif.
C’est vrai que Shabani Nonda t’a conseillé de signer au Stade rennais ?Oui, il a joué avec mon agent au FC Zürich et il lui a parlé du Stade rennais. Il a évoqué une belle ville, de bonnes structures d’entraînement, un bon stade, de bons supporters. Et puis j’ai regardé des vidéos d’Alex Frei à Rennes.
Depuis la Suisse, Rennes est un bon tremplin ?C’est un bon projet, un « trampoline » comme tu dis. Bien sûr, si tu joues bien dans le championnat suisse, qui est moins relevé que le championnat français, la porte s’ouvre pour aller dans un championnat de niveau plus important. J’imagine que j’ai bien joué en Suisse, et j’ai eu l’opportunité d’aller en Bundesliga. Mais quand le Stade rennais a appelé, j’avais vraiment envie de venir ici pour les raisons que je t’ai déjà indiquées.
Cela fait cinq ans que tu es en Europe. Tu n’as jamais eu la nostalgie du Brésil ?Pour moi, c’est passé. J’ai vécu beaucoup de bonnes choses en Suisse et ici en France. Ici, c’est plus facile au niveau de la langue, car à Zürich, c’était un dialecte allemand plus difficile à parler pour moi. La langue française, c’est latin, donc plus proche de ma langue maternelle. Et Rennes, c’est assez calme, alors qu’à Zürich, il y a beaucoup de monde, beaucoup de touristes. J’habite avec ma femme et ma petite fille ici, alors… Tu sais, tous les garçons au Brésil rêvent de venir jouer en Europe. J’ai réalisé mon rêve, avec un bon « trampoline » de la Suisse à la France, et j’espère continuer comme cela.
Notre entretien se fait en français, et tu viens d’expliquer que tu n’as commencé à apprendre qu’à l’été 2014 quand tu es arrivé à Rennes…Oui, quand je suis arrivé, je ne savais dire que « merci » et d’autres choses simples. J’ai rapidement progressé pour la compréhension. En revanche, pour parler, j’ai toujours besoin de progresser. Je vais encore évoluer. J’ai suivi six mois de cours avec le professeur mis à disposition par le Stade rennais. Je m’entraîne en parlant chaque jour avec mes amis. Le coach Philippe Montanier m’a beaucoup aidé aussi, car lui parle espagnol, et quand je ne comprenais pas des mots, je lui demandais, il m’expliquait. Il m’a beaucoup aidé à progresser en français.
À Rennes, tu as aussi Gelson Fernandes qui parle espagnol…Il parle aussi portugais, il parle allemand, il parle toutes les langues… Je le connais depuis 4-5 ans déjà. On s’était affrontés lors d’un amical Fribourg-Zürich, puis on s’est retrouvés ici. C’est un très bon ami, je dis toujours du bien de lui, c’est un bon mec.
Tu parles combien de langues de ton côté ?Un peu d’allemand et un peu d’italien en plus du portugais, de l’espagnol et du français. L’espagnol, c’est parce que beaucoup de gens d’Argentine ou d’Uruguay vivent dans le Sud du Brésil. L’italien, c’est à Zürich que j’ai beaucoup pratiqué avec Davide Chiumiento, un coéquipier, et l’adjoint du coach, Massimo Rizzo. En Suisse, je parlais allemand et italien, cette seconde langue étant plus facile pour moi. J’aime découvrir la culture des autres pays, alors la Suisse, c’est intéressant, car il y a trois langues officielles avec l’allemand, l’italien et le français. Quand tu joues en Suisse, selon le match que tu joues, la langue que tu dois parler change. C’est intéressant.
Tu n’as pas joué au plus haut niveau au Brésil, même si tu as été formé pendant deux ans au Grêmio Porto Alegre. Tu as l’objectif de rejouer un jour en Serie A brésilienne ?Mon parcours est très courant au Brésil, à savoir suivre une formation dans un très gros club comme Grêmio, puis débuter dans un plus petit club pour jouer et montrer ton football. Je l’ai fait à Caxias, une autre équipe du Sud du Brésil. Cela s’est bien passé et c’est à cause de cela que je suis aujourd’hui en Europe. Grêmio, c’est mon équipe de cœur, quand j’étais enfant je rêvais de deux choses : jouer à Grêmio et jouer en Europe. Je n’ai pas réalisé le premier, car je n’ai pas joué en équipe première là-bas, mais j’y ai quand même vécu beaucoup de bonnes choses. J’y ai suivi une belle formation, dans l’un des deux gros clubs de la ville avec l’Internacional. Si, en fin de carrière, j’ai l’opportunité de jouer pour Grêmio, j’aurais alors réalisé tous mes rêves de footballeur.
Au Brésil, tu avais des joueurs modèles ? Tu es né quatre ans avant la Coupe du monde 1994 avec Romário et Bebeto, mais tu avais douze ans pour la victoire de 2002 avec Ronaldo, Roberto Carlos et Rivaldo…Je me rappelle un peu des États-Unis en 1994, mais mon premier gros souvenir, c’est la déception de France 98. J’ai beaucoup pleuré (rires). Mais après, la génération 2002 avec Rivaldo, Ronaldinho, Ronaldo… C’était une génération spectaculaire. Je le dis souvent, mais pour moi, Ronaldinho est incroyable, encore aujourd’hui. Je pense qu’il va faire encore un ou deux ans avant de s’arrêter. C’est le joueur le plus fort que j’ai jamais vu jouer. Ce n’est pas une référence pour moi, car j’ai un autre style, mais c’est à mes yeux le meilleur joueur de tous les temps.
À quel âge tu as compris que tu pouvais devenir pro ?J’ai commencé à toucher le ballon à 4-5 ans, j’ai rapidement imaginé beaucoup de choses. J’ai rapidement dit à ma famille que je voulais faire cela. Mais j’ai vraiment compris que j’allais y arriver quand j’avais 20 ans, je pense.
Une question sur tes origines allemandes. J’ai lu que tu étais né à Santa Cruz à un endroit, et à Novo Hamburgo à un autre… (les deux sont dans l’État du Rio Grande do Sul au sud du Brésil, ndlr) Oui. C’est particulier. En fait, je suis né à Novo Hamburgo, car ma mère travaillait là-bas. Mais deux jours après, ma famille est partie s’installer à Santa Cruz do Sul. Donc je suis né à Novo Hamburgo, mais j’ai grandi à Santa Cruz do Sol.
Tu as parlé de tes origines allemandes, que l’on entend dans ton nom de famille, Konzen. Cela se traduisait comment dans le quotidien ?Au sud du Brésil, beaucoup de gens ont des origines allemandes ou italiennes. Ma femme est d’origine italienne, moi un peu d’origine allemande. Dans ma ville, Santa Cruz, il y avait beaucoup de gens originaires d’Allemagne. Mon grand-père parlait même un peu un dialecte allemand. Mais ce lien culturel avec l’Allemagne s’éteint petit à petit au fil des générations, car peu de personnes pratiquent l’allemand. Mais on a une fête de la bière, une Oktober Fest, comme son nom l’indique en octobre. Et à Blumenau, à quatre heures de voiture, il y a aussi comme à Santa Cruz une fête équivalente à l’Oktober Fest de Munich. Mais en plus petit. J’y ai participé beaucoup de fois avec ma famille. J’ai même participé aux fêtes italiennes à Caxias do Sul, la ville de ma femme. J’ai bien profité des fêtes allemandes et italiennes (rires).
Propos recueillis par Nicolas Jucha