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Pastore, grand corps malade

Par Adrien Candau
5 minutes
Pastore, grand corps malade

De retour dans le groupe parisien contre Bâle en C1 mardi, Javier Pastore pourrait bien fouler les pelouses de Ligue 1 ce dimanche face à Rennes, après une blessure qui l'a éloigné des terrains pendant plus d'un mois. Une absence qui vient s'ajouter à la longue liste de celles que l'Argentin n'a cessé de cumuler depuis un an et demi. De quoi se demander si les problèmes physiques de l'ancien de Palerme ne seraient pas en partie dus à un mental en berne...

Il s’était pourtant fendu d’une première fracassante. Ce samedi 6 août, le PSG affronte Lyon en finale du Trophée des champions, et Javier Pastore brille au sein du PSG new look d’Unai Emery. L’Argentin claque un but, deux passes décisives et s’autorise même quelques petits plaisirs solitaires, comme ce petit pont gourmand dont est victime Maxime Gonalons à l’heure de jeu. Paris l’emporte largement (4-1) et tous les voyants semblent au vert pour voir Pastore s’imposer comme un élément fondamental du milieu parisien cette saison. Puis l’Argentin rechute. Fin août, l’ancienne pépite de Palerme est repris par une douleur récurrente au mollet qui l’a depuis empêché de réintégrer le onze de départ du club de la capitale. En soi, rien de neuf pour Pastore, qui enchaîne les pépins physiques avec une régularité inquiétante depuis un an et demi. Entre ses mollets qui refusent obstinément de guérir, un claquage à l’aine ou encore une lésion sérieuse au tibia, il a cumulé pas moins de 155 jours de convalescence lors de l’exercice 2015-2016. Cette saison, il en est déjà à 37. Un statut d’éternel blessé relativement inédit pour El Flaco, qui enchaînait sans problème les matchs lors de son passage à Palerme, puis lors de ses quatre premières années au PSG.

Meneur sentimental

« J’ai toujours dit que c’était un très bon joueur. Il a les qualités. Maintenant, il faut que son mental soit à la hauteur de ses qualités techniques » , déclarait déjà Laurent Blanc début 2014. De quoi se demander si, justement, le mental de Javier n’a pas cessé de décliner ces dernières années, favorisant ainsi l’émergence de son déclin sur le plan physique. L’évolution de l’idylle de Pastore avec le PSG semble en effet avoir suivi une trajectoire globalement descendante. Arrivé à Paris accompagné d’une réputation de petit prodige et premier joyau de l’ère qatari, El Flaco n’aura peut-être jamais autant brillé que lors de sa première saison dans la capitale, quand il évoluait avec Jallet, Ménez et Gameiro. Avant de lentement, mais sûrement, abandonner le devant de la scène à Zlatan Ibrahimović, Marco Verratti et Thiago Silva. Le problème, c’est que Pastore est un meneur qui marche à l’affectif. Tous ses anciens formateurs le disent : pour que l’Argentin soit bien dans ses crampons, il faut le chouchouter au quotidien. En proie à de premiers soucis physiques, mais surtout moins influent sur le jeu parisien lors de la saison 2013-2014, il voit son cas décortiqué par Ángel Cappa, son ancien entraîneur à Huracán : « Javier a besoin d’être sûr de lui, de sentir que ses coéquipiers le respectent, que son entraîneur croit en lui. À partir d’Huracán, tout a tourné en sa faveur. Et aujourd’hui, il fait face à la première grosse difficulté de sa carrière. Donc c’est simple, il doit franchir cette étape pour s’en sortir. » Un défi qui semble un temps à la portée de Pastore, qui réalise une saison 2014-2015 de haute volée, rasséréné par la foi que placent alors en lui son entraîneur et sa direction : « J’ai demandé à Nasser s’il voulait que je parte…. Il m’a répondu non… Il m’a donné beaucoup de confiance… J’ai tout fait pour changer, et l’équipe joue aussi beaucoup plus pour moi. J’ai plus de confiance. »

Puis l’Argentin se blesse au mollet fin août 2015 et au tibia fin octobre. Même sans lui, Paris déroule et piétine allègrement la Ligue 1. Si bien que, quand Pastore fait son retour à la mi-février 2016, le PSG aligne vingt-trois victoires pour quatre nuls en championnat. Le magicien maigrichon, lui, continuera de se blesser régulièrement jusqu’à la fin de la saison, pendant que ses coéquipiers explosent tous les records en Ligue 1. Comme si la prise de conscience de son importance finalement toute relative au sein de l’effectif parisien l’avait fragilisé mentalement et physiquement.

Une star parmi d’autres

« Ça reste théorique, mais dans le cas de Pastore, on peut effectivement penser que le fait d’être dans un système de blessures récurrent induit une dimension psychologique, explique ainsi le psychologue du sport Jean-Paul Labedade. On peut assister ici au cas d’un joueur qui se voit confronté à une société sportive qu’il percevait comme idéale, mais qui, en réalité, ne l’est pas. Les sportifs de très haut niveau sont souvent dans l’illusion de leur toute-puissance. Leur environnement, de l’entraîneur aux supporters en passant par la presse, qui a besoin de héros, leur demande d’être sans faille. Or, là, Pastore se rend compte qu’il n’est plus dans les clous. Il est venu, on lui a fait des promesses et il s’est aperçu qu’il n’était pas indispensable. En gros, c’était une star dans un club de moyenne puissance comme Palerme qui s’est retrouvée à devenir un joueur comme les autres au PSG. Mentalement, c’est handicapant, le joueur peut s’autoriser une forme de passivité, ce qui favorise l’émergence de blessures. » Palerme, l’Italie, dont le joueur s’est à plusieurs reprises dit nostalgique : « Oui, l’Italie et les gens de Palerme me manquent. J’ai vraiment passé deux années fantastiques là-bas » , expliquait ainsi le joueur en juillet 2015, qui assure également regarder « tous les matchs de Serie A qu’il peut » . « Si le sentiment nostalgique est fort, il peut conforter le corps dans l’idée que le joueur était mieux avant, en Italie, et ainsi faciliter l’apparition de blessures » , poursuit Jean-Paul Labedade.

Alors, quel remède pour Javier, docteur ? « Schématiquement, il y a deux cas de figure qui peuvent se présenter : soit il vit ses blessures comme une fatalité et il pourra alors s’enfermer dans un cycle long de problèmes physiques, soit il vit tout cela comme une simple parenthèse, parvenant ainsi à sortir de ce schéma. » Ce soir, s’il est aligné face à Rennes, Pastore pourrait bien donner des premiers éléments de réponse. Et tenter de démontrer que sa tête et ses jambes ne sont définitivement plus les extensions d’un grand corps malade, mais bien celles d’un footballeur conquérant.

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