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Pastore, espèce de petit pont
Javier Pastore sait tout faire. Ce qui ne l'empêche pas d'avoir un gimmick : le petit pont.
« En vingt minutes, il m’en a collé deux. Je l’ai regardé, lui ai dit ‘Oh du calme, on s’arrête là!’ Il m’a souri et n’en a plus fait du match » . Philippe Lebresne a de la chance que Javier Pastore ait un cœur. Le 18 août dernier, en barrage de l’Europa League, à l’occasion de la première sortie de l’Argentin sous ses nouvelles couleurs, le milieu de terrain du FC Differdange 03 a le malheur d’ouvrir les jambes au mauvais endroit, au mauvais moment. Et face à la mauvaise personne. Car il faut le dire, le numéro 27 du Paris Saint-Germain est un expert en la matière.
Le premier réflexe consiste à se dire que cet amour du petit pont est le vecteur le plus simple pour parvenir à chambrer son vis-à-vis. Vikash Dhorasoo en sait quelque chose. En 1999, avant un match avec l’Equipe de France contre Andorre, la légende et pas uniquement la légende racontent que le Havrais avait infligé ce dribble à Didier Deschamps à l’entraînement. Pas du goût de tout le monde. La confrérie France 98 se serait alors chargée de faire en sorte que Dhorasoo soit blacklisté des Bleus pendant un bon moment. « C’est hyper humiliant de se prendre un petit pont. C’est la garantie de se faire chambrer à l’entraînement par tes coéquipiers pendant une semaine » , synthétise l’ancien Milanais. « Mais Pastore n’a pas fait ça en me chambrant. Ça se voit que c’est un gars gentil. Simplement, c’est un geste qu’il maîtrise mieux que n’importe qui et il ne se prive pas de l’utiliser quitte à ce qu’on puisse penser qu’il fait ça pour frimer » , recadre Lebresne.
Après avoir pris du plaisir entre les guiboles du milieu du club luxembourgeois, Pastore a récemment remis le couvert face au Red Bull Salzbourg, où les victimes se comptent au nombre de trois. Reste que le premier souffre-douleur du Pastore version PSG s’appelle bien Philippe Lebresne et qu’il se souvient dans les détails de cette soirée où l’ancien stratège de Palerme lui a infligé ces deux cochonneries : « Sur le premier, je fais une course perpendiculaire à la sienne. Lui a son regard ailleurs, alors j’anticipe en étant assez confiant sur le fait que je vais lui prendre la balle. Mais lui, son but, c’est d’avancer sur le terrain. Il a mis un petit exter’ et je suis passé au travers. Pour ce qui est du deuxième, cette fois-ci, j’arrive très vite et là il me sort une pointe du pied… Je n’ai pas tout compris » .
« Le dribble le plus efficace de la planète »
Au fait, pourquoi l’Argentin insiste avec cette arme alors qu’il maîtrise toutes les autres? « Tout simplement parce que c’est le dribble le plus efficace de la planète. Non seulement tu élimines le joueur en face de toi, mais surtout, tu avances tout droit. On en revient à l’humiliation. Celui qui est en face de toi, il a de bonnes raisons de se sentir invisible. Et Pastore l’exécute avec une telle légèreté. Le mec, c’est un danseur » , détaille Dhorasoo. C’est un cours de rattrapage qu’est en train de donner el Flaco au public français. « Attendons de voir ce qu’il donne sur la durée » , braillent encore les vierges effarouchées pas encore complètement remis des 42 millions dépensés par le club de la capitale pour acquérir son jouet.
La vérité, c’est qu’il n’y a rien à attendre. Pastore est déjà bien là et ne fait que répéter ses gammes. Suffit de repenser à ses prestations l’an passé en Serie A contre la Juve et l’Inter Milan pour se rappeler que le garçon de 22 ans n’est pas né à Paris. Dhorasoo s’en est rendu compte depuis un moment : « Quand Pastore est arrivé, les gens s’attendaient à voir un type hyper individualiste. Au final, c’est l’inverse de ça. Certes il adore les petits ponts, mais il n’en rajoute jamais. D’ailleurs, dès qu’il a effectué son dribble, il a la lucidité de revenir à l’essentiel, le jeu vers l’avant. Il cherche rapidement Gameiro » . Javier Pastore, c’est tout ça : un type qui ne chambre pas mais humilie quand même, qui semble discret mais qui a beaucoup trop d’allure pour que son talent reste dans la confidence, et dont les victimes oublient volontiers son côté bourreau. Ce n’est pas Philippe Lebresne qui contredira ce dernier point : « Ça ne fait jamais plaisir de se prendre un petit pont, mais quand ça vient de Pastore, j’exagère à peine en disant que c’est une fierté » .
Matthieu Pécot
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