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Passionnément, Balotelli, pas du tout
Si les débuts de Super Mario avec l'Olympique de Marseille sont idylliques, la réception de Nice permet aussi de rappeler que l'histoire de l'Italien était, au départ, aussi intense avec les Aiglons avant de devenir électrique. Une romance peut-elle donc survivre au temps, quand elle concerne Mario Balotelli ?
Fréquenter Mario Balotelli pendant plus de 800 jours est passionnant, captivant, usant. Tant sportivement que socialement. Les Niçois peuvent en attester, tant ils sont ressortis lessivés de leur relation avec l’attaquant italien : l’odeur qui s’accroche au fond des sinus en rappelle certes les plus belles heures, mais les tissus se sont, avec le temps, relâchés et froissés. Libéré de son contrat, libre de quitter un club où il ne marquait plus, libre de ne plus être un poids dans le vestiaire niçois, Balotelli est parti. Mais, sur la Côte d’Azur, chacun a encore en tête ses débuts pimpants.
Le 12 septembre 2016, Balotelli faisait sa première apparition sous le maillot rouge et noir à l’Allianz Riviera contre l’Olympique de Marseille, qui venait d’être racheté par Frank McCourt. Un penalty et un coup de tête pour participer à la victoire (3-2) des Aiglons, voilà Super Mario déjà adopté par le peuple niçois. Deux ans et demi plus tard, Mario a toujours les supporters dans la poche, sauf que ces derniers sont désormais marseillais, que lui est un joueur de l’OM et qu’il s’apprête à recevoir son ancien club au Vélodrome. Forcément un rendez-vous particulier. « On sait tout ce que Mario peut faire, confiait Dante dans La Provence. Nous allons devoir être vigilants avec lui, c’est un joueur imprévisible qui peut marquer à n’importe quel moment. C’est un ami, mais sur le terrain, c’est différent. »
Mariés au premier regard
Les Niçois peuvent en témoigner : Mario Balotelli n’est jamais aussi dangereux que lorsqu’il est en mission séduction. Quand l’Italien cherche à prouver qu’il est à sa place. Et, comme en août 2016 avec le Gym, le Palermitain de naissance a également réussi ses débuts avec les Phocéens. Pour sa première entrée contre le LOSC (1-2), il avait réduit le score dans le temps additionnel. « Il fait souvent de bons débuts. Il est en réussite, a réussi son intégration, mais il n’est plus à Nice, donc ça me laisse indifférent » , lâchait amèrement Malang Sarr. De fait, c’est une constante dans sa carrière : Mario a toujours marqué lorsqu’il étrennait le maillot d’une nouvelle équipe. En 2007, il inscrivait un doublé pour sa première sortie avec les pros de l’Inter, lors d’un amical face à Sheffield. Une réussite immédiate également observée lors de sa première titularisation avec les Nerazzurri en match officiel (un match de Coupe contre la Reggina), pour sa première avec un maillot azzurro en 2008, celui des espoirs italiens (contre la Grèce), histoire de répondre à ceux qui pensaient qu’un Noir n’avait pas sa place avec la Squadra, mais aussi à Manchester City (contre Timișoara en Ligue Europa) et au Milan (doublé contre l’Udinese).
Une exception : il était resté muet pour ses débuts avec Liverpool contre Tottenham. Et ce n’est peut-être donc pas un hasard si son expérience chez les Reds fut la plus courte. Avec Mario, c’est tout de suite ou jamais. Comme un besoin de montrer qu’il existe, lui qui avait été abandonné par sa famille ghanéenne, pour que personne ne l’oublie. « Il cherchait toujours à attirer l’attention sur lui. Au point qu’au bout d’un moment, j’ai été obligé de le faire asseoir au premier rang du pullman, la ceinture attachée, racontait Disma Bossini, l’ancien chauffeur de bus de Lumeazzane, à So Foot (#95). Et je ne fais pas ça avec beaucoup d’enfants… » Mais si les premiers contacts sont souvent rayonnants, le ciel ne reste en revanche jamais bleu très longtemps.
« On lui en veut, c’est sûr »
Car comme souvent avec Mario, c’est après que ça se gâte. À Nice, ses relations avec Patrick Vieira se sont tendues, l’Italien devenant de plus en plus ingérable à mesure que durait son inefficacité (zéro but en dix matchs). Son spleen devenait un poids pour ses coéquipiers. Ce que rapportait Malang Sarr cette semaine. « On lui en veut, c’est sûr. On aurait aimé que tout le monde soit concerné lors de la première partie de saison. Il s’est mis à part, a décidé de ne pas s’intégrer, de ne pas être dans le projet du club. C’était gênant. C’est dommage d’avoir agi de la sorte, mais c’est sa décision. Il reste un ancien coéquipier, voilà tout. Il sait très bien que son comportement n’a pas été du goût de tout le monde. Il a gâché six mois, mais nous, on est toujours en course pour l’Europe. » Une sortie qui sonne comme un avertissement aux Marseillais, qui sont pour l’instant sous le charme de Balotelli, avec ses quatre buts en six matchs.
Engagé pour cinq mois avec l’OM, l’attaquant semble avoir tout de même changé des choses dans son approche. Comme s’il avait retenu quelques leçons. Quand, à l’époque, il cherchait à gagner le respect de ses nouveaux coéquipiers en voulant tout simplement les écraser, il semble aujourd’hui plus dans le partage. En atteste sa bromance avec Florian Thauvin. Un garçon à qui il peut laisser botter les penaltys, alors qu’il en est le tireur désigné, et qui à l’inverse lui a donné le goût de célébrer ses buts, ce qu’il ne faisait jamais, estimant qu’en marquant, il faisait juste son métier. Tant pis, si ce sera la version du « facteur » que l’on retiendra – « Avez-vous déjà vu un facteur faire une célébration après avoir livré du courrier ? Les gars, j’en ai rencontré un la semaine dernière, qui a fait une célébration et qui a souri après qu’il m’a livré un colis. Donc, à partir de maintenant je le ferai aussi. »
L’heure de se fixer ?
En plus d’avoir offert un plan média à l’OM estimé à 270 000 euros et aux millions d’euros de retombées, sa vidéo postée sur Instagram en direct après son but contre Saint-Étienne témoigne d’une chose : Mario Balotelli est bien à Marseille. Comme il pouvait l’être un temps à Nice, Milan ou Manchester. Et on devrait savoir si cette histoire d’amour pourrait se prolonger, l’Italien n’excluant pas de rester la saison prochaine dans la cité phocéenne. « On va discuter, assurait-il dans une interview à La Provence. J’ai dit à mon agent que j’étais bien ici. J’ai envie de rester. Mon envie de rester est là, je veux rester. Après, c’est différent si tu joues la Ligue des champions ou la Ligue Europa. C’est pour ça que je veux tout faire pour finir deuxième ou troisième. » La réussite et s’exposer à voir une relation se dégrader, ou l’échec et une passion qui restera aussi forte que courte : à Balotelli de savoir s’il accepte, à 28 ans, d’être enfin chéri pour le meilleur, mais aussi pour le pire.
Par Mathieu Rollinger