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Park Ji-Sung en 10 anecdotes
Park Ji-Sung, quatorze années de très bons, mais surtout loyaux services, vient de tirer sa révérence. Les terrains ont perdu un excellent joueur, qui a fait le bonheur notamment du côté de Manchester - côté rouge - pendant sept saisons. Le football, lui, vient de perdre une personne attachante, passionnée, humaine. Il ne fait pas bon être un amoureux du football en cette fin de saison 2013-2014. D'où une dernière mise en lumière pour ce joueur de l'ombre, en dix anecdotes.
Un dragon dans la nuit
Le rêve prémonitoire est un phénomène troublant connu depuis la nuit des temps. Il se définit par la construction, dans le cerveau, d’un événement dont tous les signes avant-coureurs sont normalement imperceptibles. Pour confirmer cette définition parfois contestée, il pourrait être bon de poser la question à la mère de Park Ji-Sung. Cette dernière, lors de sa grossesse, a effectivement rêvé qu’un dragon l’entourait. Dans son pays, cela est un signe indéniable de grande réussite. Le joueur asiatique le plus titré marche donc sur les traces d’un destin auquel sa créatrice croit depuis 33 ans.
Le druide et sa potion
Lorsqu’il était encore au lycée, le jeune Coréen était raillé pour sa petite taille (1m58). Au foot, son entraîneur de l’époque le ménageait même pour qu’il puisse se développer en toute sérénité. Face à cela, son père eut l’idée de lui faire avaler… des cuisses de grenouilles ! Après une chasse réussie et une préparation façon Top Chef de grand-mère, Park Ji-Sung avala d’une traite les rainettes bouillies. Aujourd’hui expert dans le domaine et plus grand de dix-sept centimètres, l’ancien Mancunien avait un jour avoué se doper avec une boisson à base de jus de batracien, dont il a le secret. Quitte à se mettre à dos Park Wan-Hee, membre des amis des grenouilles, association protectrice de l’animal dans son pays : « Je ne sais pas s’il s’agit d’une simple coïncidence, mais après qu’il a révélé que les grenouilles boostaient ses performances, le nombre de grenouilles disparues dans les montagnes a fortement augmenté. » De quoi faire pâlir notre amie Kermite…
Call of Duty
Park Ji-Sung n’a pas seulement porté un short et un maillot dans sa vie. Il a aussi arboré fièrement l’uniforme de l’armée coréenne lors du service militaire qu’il a dû rendre à sa nation. Et visiblement, porter une arme est beaucoup plus fatigant que de courir derrière un ballon. C’est simple, dès son retour de service militaire, Park s’est allongé sur son lit et a dormi pendant deux jours.
Voir plus haut que son devoir
Tout comme 24,2% des croyants Sud-Coréens, Park est un fervent pratiquant du bouddhisme. Une religion qui vise à s’abstenir de tout ce qui est nuisible et où le sens du devoir – entre autres préceptes – détient une place importante dans la vie des croyants. Une philosophie qui a toujours guidé le quadruple champion d’Angleterre avec Manchester United. Un joueur exemplaire qui, en quatorze années de carrière, n’a jamais alimenté la rubrique scandale des tabloïds. Un joueur prêt, aussi, à donner de son image pour l’intérêt général. Comme ce samedi 15 septembre 2012 et une rencontre face à Chelsea. Ji-Sung Park, alors capitaine des Queens Park Rangers, refuse très symboliquement de serrer la main au capitaine des Blues, John Terry. L’Anglais avait tenu des propos racistes un an auparavant, face à Anton Ferdinand, coéquipier du Sud-Coréen. Plus que le sens du devoir, l’homme s’est toujours servi de sa notoriété pour faire avancer les problèmes de fond qui rongent la société : « Avec mon statut, je sens que mes devoirs et mes responsabilités augmentent. »
Le prof d’EPS
À l’approche de la vie active, chaque étudiant se doit d’avoir un plan B, au cas où son rêve ne se réalise pas. Park Ji-Sung, lui, se serait bien senti en professeur de sport. Mais la chance lui a souri, et à désormais trente-trois ans, il affiche un butin assez bien garni avec sept trophées majeurs en Europe, dont la Ligue des champions 2008 avec les Red Devils. Mais il n’est jamais trop tard pour une reconversion comme prof’ de sport. Ça a de la gueule, quand même, Ji-Sung Park qui t’apprend à jouer au foot. Ou au tennis de table, au choix.
Des potes improbables
Durant ses sept années passées à Manchester United sous les ordres de Sir Alex Ferguson, Park Ji-Sung a su se faire apprécier et pas seulement de son coach sur le terrain. En effet, l’ex-joueur des Queens Park Rangers entretenait notamment une amitié sans faille avec deux joueurs à l’opposé de lui : Carlos Tévez et Patrice Évra : « Ji, c’est mon pote. C’est même bien plus qu’un simple ami. On passe beaucoup de temps ensemble » , déclare à propos de lui le Français. Les trois mousquetaires, copains comme cochons, avaient l’habitude de se voir en dehors du football, en témoigne le 28e anniversaire du milieu de terrain. Pour celui-ci, ses deux acolytes, bien inspirés, ont décidé de lui offrir un gâteau en forme de stade de foot. Au programme, confettis et langues de belle-mère pour un festoiement simplement inoubliable.
Un faux 6
En équipe nationale, Park fait partie des huit joueurs ayant dépassé les cent capes. Pourtant, il commence réellement à porter le maillot des Guerriers Taeguk à l’occasion des Jeux olympiques de Sydney en 2000. Il évolue alors dans l’axe du milieu de terrain, au poste de milieu défensif. Un rôle de numéro 6 qui ne tirait pas l’intégralité des capacités d’un joueur habitué aux couloirs. Le Sud-Coréen peut remercier Guus Hiddink, arrivé à la tête de la sélection en 2001. L’entraîneur néerlandais, qui a emmené le PSV sur le toît de l’Europe en 1988, est le premier à s’apercevoir du potentiel du joueur, mais surtout le premier à l’exploiter : « Le véritable tournant de ma carrière, c’est Guus. En croyant en moi, il m’a aidé à croire en moi. C’est extrêmement important pour un jeune footballeur. » Sa carrière est lancée. L’année suivante, il atteint la demi-finale de la Coupe du monde, at home. Dans la foulée, il suit son mentor qui décide de reprendre les rênes du PSV. Une vraie histoire d’amour, on vous dit.
Merci papa, merci maman
Les premiers pas du natif de Suwon sur le carré vert se sont faits en 1992 à l’âge de onze ans. Scolarisé à trente kilomètres au sud de sa ville, le jeune talent porte sur ses épaules les espoirs d’une famille très modeste. Il assume alors son statut et accumule prestations de qualité et récompenses. N’ayant que peu de revenus, ses parents se prennent au jeu et décident de consacrer plus de temps et d’argent à la passion de leur progéniture. Pour cela, ni une ni deux, ils quittent leur travail et rachètent une boucherie afin de nourrir correctement Ji le footeux et assurer par la même occasion son début de carrière. Fils de bouchers donc, et plus tard coéquipier de Roy Keane…
Pes planus
La carrière d’un footballeur professionnel se joue sur des détails. Celle de Ji-Sung Park aurait pu ne jamais s’envoler. La faute à un physique trop frêle et à des pieds jugés « trop plats » . À l’heure du football globalisé, de plus en plus intransigeant athlétiquement, le petit gabarit du Sud-Coréen constituait un défaut. Mais quelques cuisses de grenouilles plus tard, son retard était comblé et sa croissance terminée, malgré un acné toujours bien prononcé. D’ailleurs, pour soigner son apparence, le jeune retraité passait des heures devant le miroir. C’est encore son ami Patrice Évra qui en parle le mieux : « Ji est toujours le dernier à sortir du vestiaire, parce qu’il est comme une fille. Il met des crèmes et se coiffe. » Quant à ses pieds plats, ils sont devenus au fil du temps sa marque de fabrique. Les Portugais s’en souviennent encore.
Un nom immortalisé
Ji-Sung Park est un homme adulé et respecté dans son pays. Un héros national. À tel point que le gouvernement a décidé de rebaptiser certains lieux en son nom. Des académies de foot, des rues et même des parcs. Logique. En outre, un peu plus d’un million de Sud-coréens ont une carte bancaire à l’effigie du joueur. Ses amis restés en Asie ne tarissent pas non plus d’éloges sur un homme qui est devenu un symbole : « Nous l’appelons Ji-Sung Hero, parce que nous sommes fiers de ce qu’il a accompli. Il est aussi populaire que le président. Peut-être même plus ! Beaucoup d’asiatiques regardent jouer Manchester United pour lui. » Le principal intéressé, lui, reste humble, comme toujours : « C’est un honneur ultime. Cela me donne aussi envie d’en faire plus, afin de mériter réellement ce genre de distinctions et cette reconnaissance. C’est une source de motivation. »
Par Eddy Serres et Maxime Nadjarian