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Paris 2024 : La ruée vers l’or des Bleus
Mbappé, Griezmann, Varane, Lloris... La liste des champions du monde 2018 qui désirent participer au tournoi olympique de Paris 2024 s'allonge. Mais au-delà du rêve d'une médaille d'or, qu'est-ce qui explique cet engouement soudain ?
Kylian Mbappé le répète dès qu’il le peut : il veut participer aux Jeux olympiques de Paris, qui pourtant se dérouleront quelques jours après la finale d’un Euro pour lequel les Bleus ont toutes les chances de se qualifier (et de disputer avec l’envie d’aller loin). L’homme est trop pragmatique pour ne pas avoir en tête les nombreux obstacles. Il est également déterminé, une qualité difficilement discutable. « J’espère y être. Tout le monde sait que j’ai toujours rêvé de jouer les Jeux olympiques, a-t-il réaffirmé en conférence de presse ce mois-ci. Après, ça ne dépend pas de moi, il y a pas mal de paramètres qui rentrent en compte. Il y a un club aussi, il y a une équipe nationale, parce qu’il y a un Euro avant, donc il faut discuter, mais bien sûr que ce serait un rêve de jouer les JO, encore plus à Paris. » Depuis, Antoine Griezmann a entonné le même refrain : « Ce serait l’un de mes plus beaux rêves. Vous imaginez, porter le maillot de l’équipe de France, à Paris, aux Jeux olympiques, pour un rendez-vous planétaire… Cela file des frissons. » Le discours et ses fondamentaux sont bien maîtrisés. Patriotisme et universalisme, le tout dans la Ville Lumière, le pays de Pierre de Coubertin. Depuis, Hugo Lloris et Raphaël Varane se seraient mis dans la file d’attente selon L’Équipe.
Caprice de stars ?
Pour le reste, nous savons fort bien que la présence de l’enfant de Bondy dépendra du bon vouloir de son club du moment, tout comme pour les autres postulants, puisque la compétition se déroule en dehors des périodes fixées par la FIFA. En outre, Sylvain Ripoll ne pourra intégrer dans son groupe de 18 joueurs que 3 joueurs hors limite d’âge (donc nés avant le 1er janvier 2001). Toutefois, la véritable question reste de savoir les raisons et motivations de cette passion soudaine pour les anneaux olympiques. Naturellement, le facteur « à domicile » s’avère déterminant, surtout pour un Francilien comme Mbappé, qui a grandi non loin du Stade de France. Tout le monde se souvient de la consolation en or offert au peuple brésilien par Neymar à Rio en 2016, deux ans après l’humiliation du Mondial. Pas besoin non plus de rappeler que personne ne s’était vraiment battu auprès de son employeur pour se rendre a Tokyo défendre nos couleurs. En outre, malgré un niveau de jeu et un prestige moindre que les compétitions de la FIFA ou de l’UEFA (du moins pour les hommes, la situation étant sensiblement différente pour les femmes), une médaille olympique demeure une ligne sympathique à ajouter sur son CV et sa fiche Wikipedia. D’autant plus que la dernière breloque en date pour la France remonte à 1984 à Los Angeles, quand le boycott de l’URSS et ses satellites avaient ouvert une voie royale aux Tricolores. Cette volonté patriotique de briller à Paris, sous les ors des belles valeurs prônées par le fort peu progressiste baron de Coubertin, est louable et bien calculée.
Toutefois, cette démarche colle-t-elle à ce qui reste de la spécificité de ce tournoi ? Les moins de 23 qui seront dans l’équipe pourront-ils s’approprier un peu d’un potentiel exploit à l’ombre de si imposants parrains ? Quelles seront en face les chances des autres formations, notamment issues d’Océanie ou d’Asie, qui n’aligneront certainement guère de grands noms dans leurs effectifs ? Enfin, le schisme entre le foot et l’olympisme n’est pas advenu sans raison, et les réconciliations sont souvent un peu trop opportunistes ou de circonstance. Toutefois, nos Bleus ne seront pas trop dépaysés après le Mondial au Qatar : le comité d’organisation a été perquisitionné sur demande du Parquet national financier qui mène deux enquêtes pour corruption et prise illégale d’intérêt. Enfin, dix travailleurs sans papiers assignent Vinci, Eiffage, Spie Batignolles, GCC et leurs sous-traitants devant le conseil des prud’hommes de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour exploitation. Ils soulignent également le fait d’avoir travaillé sur les chantiers des JO 2024, notamment le village olympique, sans contrat de travail, sans fiche de paie, sans congés payés ni heures supplémentaires. Alors, qui veut encore y aller ?
Par Nicolas Kssis-Martov