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Par pitié, détendez-vous avec l’arbitrage vidéo !

Par Mathias Edwards
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Par pitié, détendez-vous avec l’arbitrage vidéo !

En France, « tout le monde » est pour l'arbitrage vidéo. Surtout depuis ce fameux France-Espagne, où il fut testé grandeur nature. Les conséquences se sont ressenties dès ce week-end, où lors de chaque action litigieuse, son utilisation a été évoquée, quand elle n'a pas été réclamée. Sans réserves, bien sûr. Alors qu'elles sont pourtant nombreuses.

Le lundi, on n’aime pas. Reprise du travail oblige. Le mercredi est le jour des enfants. Le jeudi, celui des étudiants, qui sortent s’en mettre une belle avant de rejoindre leur famille le vendredi soir. Le vendredi est le jeudi de ceux qui ont réussi leur objectif d’émancipation. Et le samedi, l’occasion de remettre ça, pour qui a la santé (ou pas encore d’enfants), avant le repos dominical (pour qui n’a toujours pas d’enfants). Mais le mardi ? Le mardi, c’est Javier Portillo dans le Real des Galactiques. Le Croque McDo sur le menu de ton McDonald’s. L’anonyme de la semaine. Mais ça, c’était jusqu’au 28 mars dernier, et ce France-Espagne au Stade de France. Depuis, pour tous les fans de foot, le mardi restera comme le jour où leur sport favori a basculé, la faute à l’expérimentation de l’arbitrage vidéo. Pas la meilleure manière d’accéder à la notoriété.

Interrogé au sujet de l’arbitrage vidéo après la défaite face aux Espagnols, Didier Deschamps déclarait au micro de TF1 que « ça change un peu le foot, c’est sûr » . Un peu, oui. Ce soir-là, il a même changé le cours de la rencontre, en annulant le but de Griezmann, puis en accordant celui de Deulofeu, sur deux situations de hors-jeu corrigées par le fameux « révélateur » . Depuis, les partisans de la mise en application de cet arbitrage 2.0 triomphent. Un sondage Odoxa révèle que « 87% des Français sont favorables à l’arbitrage vidéo, qu’ils soient amateurs de football (90%), qu’ils aient vu le match (89%) ou qu’ils aient simplement entendu des commentaires ou vu des extraits (91%), tous approuvent sa mise en place » . Le raz-de-marée de cette pensée quasiment unique a continué à déferler ce week-end, le premier après la victoire espagnole. Durant tous les matchs diffusés sur les antennes françaises, aucun fait de jeu litigieux n’a échappé au fameux « d’où l’utilité de la vidéo ! » Si l’expression était déjà en vogue avant le 28 mars, elle est depuis devenue systématique. Mais si le « révélateur » décèle le hors-jeu à la louche, il révèle également la méconnaissance du football des partisans de cette nouvelle forme d’arbitrage. Ou tout du moins, l’incompréhension de l’essence du jeu le plus populaire au monde.

« DE L’AVIS DE L’ARBITRE »

Si les partisans de cet arbitrage nouvelle génération sont si majoritaires, c’est parce que de prime abord, il est difficile de répondre autrement que positivement à la question : « Êtes-vous pour une technologie qui réduit les erreurs d’arbitrage ? » De fait, ses opposants ont forcément fait l’effort de réfléchir à la question, avant de répondre par la négative. Ou connaissent, tout simplement, les lois du jeu éditées par l’International Football Association Board (IFAB). Un document très simple, composé de seulement 17 règles, dans lequel il est par exemple inscrit qu’un coup franc direct « est accordé si, de l’avis de l’arbitre, un joueur commet une faute par mégarde, avec imprudence ou avec violence » . DE L’AVIS DE L’ARBITRE. À sa libre interprétation, en d’autres termes. En clair, cela signifie qu’un arbitre A peut décider qu’un fait de jeu réclame un coup franc direct (donc possiblement un penalty), tandis qu’un arbitre B peut juger que le jeu doit se poursuivre. Et dans les deux cas, ni l’arbitre A ni l’arbitre B n’aura tort. Le concept, qui participe grandement à la beauté de ce sport, est difficile à assimiler pour le fan de football, à une époque où tout doit être soit noir, soit blanc, où tout doit être tranché, noté, de son chauffeur Über à l’établissement dans lequel on casse la croûte entre deux réunions, où une seule vérité est admise. Faire comprendre aux fans de football que leur appréciation, tout comme celle des consultants, des journalistes ou de leur belle-mère n’a absolument aucune importance est vexant, mais fait partie du règlement du sport qui rythme leur vie. Et les réalisations télévisuelles ne font rien pour éduquer leur audimat, en l’abreuvant de ralentis destinés à déterminer une vérité que finalement, seul le libre arbitre de l’homme en noir détient.

Les ralentis, justement. Plus utilisés pour juger les faits de jeu que pour se délecter des beaux gestes effectués sur les pelouses, il est aujourd’hui admis, et encore plus depuis ce 28 mars, qu’ils détiennent la vérité ultime. Comme si le football s’arbitrait a posteriori, en slow motion. Au ralenti, les chocs, les contacts sont amplifiés. Par essence, ce sont des images trafiquées, donc de fiction, imaginées pour magnifier certains gestes ou actions, pas pour se substituer à un arbitre qui prend ses décisions sur le vif, guidé par sa propre appréciation. Et surtout pas pour venir en aide à l’arbitre. Le football s’arbitre à vitesse réelle, bien que pour quantité d’actions litigieuses, les réalisations télévisuelles de ce week-end n’ont proposé que des ralentis, comme ce fut le cas pour le penalty concédé par Bordeaux face à Nice. Ce qui permit de statuer que Benoît Bastien était un incompétent, quand à vitesse réelle, l’intervention de Jérémy Toulalan sur Arnaud Souquet avait tout d’une bonne grosse faute.

Parce qu’on ne développe pas autant de moyens pour tester une mesure aussi importante sans vouloir la mettre en place, l’arbitrage vidéo fera tôt ou tard partie du football. Vraisemblablement lors de la Coupe du monde en Russie, en 2018, l’objectif officieux de la FIFA. En attendant de savoir sous quelle forme, et dans quelles conditions, et pour toutes les raisons évoquées plus haut, il serait bon de ne pas l’évoquer à tort et à travers à longueur de retransmissions ou de comptes-rendus de match. Cela risquerait de fatiguer même ses plus fervents défenseurs. Avouez que ce serait dommage.

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