- France
- Marseille
Paolo De Ceglie : « Triste que mon expérience à l’OM se soit mal finie »
Alors qu'il s'apprête à rebondir en quatrième division américaine du côté de Miami, Paolo De Ceglie (33 ans) a pris le temps de se poser pour revenir sur sa carrière. Sur ses années fastes à la Juventus, avec comme point d'orgue le titre de 2011, mais aussi sur son prêt raté à l'OM et sa passion pour le deejaying.
Quand tu étais gamin, tu as rapidement été repéré par la Juventus. Comment s’est passée ton enfance ?C’est allé très vite, car je suis parti jouer pour la Juve à l’âge de neuf ans. Mes parents m’emmenaient là-bas trois fois par semaine et, à 14 ans, j’ai finalement intégré l’académie de jeunes de la Juve en internat. J’étais déjà dingue de foot, et quand on te donne la possibilité de jouer pour une grande équipe comme cela si tôt, c’est loin d’être un sacrifice.
Mais c’est quand même compliqué d’avoir ce mode de vie si tôt, non ?Je dis en permanence que pour réussir quelque chose, il faut renoncer à autre chose. Évidemment que je n’ai pas eu la même enfance que beaucoup des jeunes d’Aoste ou d’ailleurs de mon âge, d’autant que je n’avais pas de certitude sur le fait d’être footballeur professionnel. Aujourd’hui, avec mon expérience et mon parcours, je peux dire que ça en valait la peine.
C’est ton père qui t’a transmis sa passion pour le football ?
Oui, mon père était un footballeur amateur et bien sûr un passionné. Dans notre famille, le football a toujours été un élément central. Nous sommes tous « juventini » , bien entendu. Forcément, le jour où j’ai rejoint la Juventus, mon père était heureux. Mais il a toujours tout fait pour que je garde les pieds sur terre. Il m’a toujours laissé tranquille par rapport à ça, il ne me rajoutait pas de pression. Cela vient de son expérience d’entraîneurs en jeunes, il savait exactement quoi faire pour me mettre dans les meilleurs conditions et ne pas me polluer l’esprit.
Comment vit-on ses premières années dans l’antichambre de la Juve ? Sincèrement, lorsque tu arrives là-bas et que tu es encore un petit garçon, tu vois cela comme un rêve. Ensuite, en grandissant, tu te dis d’abord que tu n’arriveras jamais au niveau de tous ces champions qui portent le maillot de l’équipe première le week-end. Et enfin, vers 18 ans, quand tu touches l’objectif du doigt, tu as faim, tu as la volonté de réussir et de devenir le coéquipier de ces mecs-là. Je suis très fier, à mon échelle, d’être parvenu à écrire un bout de l’histoire de la Juve.
Tes premiers matchs, c’est en Serie B que tu les joues avec Didier Deschamps comme entraîneur, Alessandro Del Piero, David Trezeguet ou Gianluigi Buffon comme coéquipiers. Qu’est-ce que ça fait de jouer avec des stars en deuxième division ? C’est vrai que ça a été une année particulière, tant pour moi que pour le club. Je faisais mes débuts en Serie B, même si Fabio Capello m’avait convoqué dans le groupe quelques fois auparavant. D’un côté, je dois avouer que la présence de l’équipe en Serie B m’a été bénéfique. Tout simplement car l’équipe était encore composée de grands champions, certes, mais aussi de jeunes dont je faisais partie. Ça a été une très belle année, on gagnait quasiment tout le temps. Avec l’âge et les années, j’ai compris le sacrifice qu’avaient fait des joueurs comme Buffon, Del Piero ou Trezeguet, de rester au club malgré la relégation administrative. Pour ces grands champions, qui venaient tout juste de gagner la Coupe du monde ou d’en être finalistes, faire ce choix au top de leur carrière… Ce n’est pas tout le monde qui l’aurait fait.
En 2011, tu es titulaire dans l’équipe qui regagne le Scudetto près de dix ans après le dernier. Quels souvenirs tu as de cette saison-là ?
C’est bien simple : cette saison correspond à la plus belle de ma carrière. Et je pense ne pas me tromper en disant que c’est la même chose pour tous les joueurs qui composaient cette équipe. Je te donne un exemple : lorsque nous avons fêté le titre dans la ville, à Turin, il y avait 300 000 personnes. Lorsque tu vois que les derniers Scudetti ne sont même plus fêtés… Le nôtre fait partie des plus importants dans l’histoire de la Juve moderne.
Quelle a été ta relation avec Antonio Conte ?Très bonne, encore aujourd’hui elle l’est toujours. Conte est certainement le meilleur entraîneur que j’ai connu, et il fait toujours partie des meilleurs aujourd’hui.
Dans les années qui suivent, il y a notamment ce prêt à Marseille. C’était ton troisième consécutif après le Genoa et Parme. Avec le recul, est-ce que t’inscrire dans un autre projet dans la durée ne t’aurait pas davantage apporté ?Si, bien sûr. Ce n’est jamais évident de partir en prêt. Je n’ai néanmoins pas eu le choix, car j’ai eu des blessures qui m’ont obligé à partir en prêt pour retrouver du temps de jeu. Cela m’avait offert des expériences plus ou moins bonnes. Je me suis donné beaucoup de mal au Genoa puis à Parme pour revenir et postuler une place dans le groupe à la Juve. Mais dès la 1e journée, je me blesse, et derrière, je vais à Marseille où, après les trois premiers mois, je ne joue quasiment plus. Sans les blessures, j’aurais certainement atteint mon objectif même si on ne le saura jamais vraiment.
Comment as-tu vécu cette saison à Marseille, qui n’a pas été simple sportivement et en dehors ?
Pas très bien, et ça m’attriste par ailleurs. J’arrive en toute fin de mercato, et je n’avais pas joué depuis trois mois à cause d’une blessure. Jusqu’à Noël, j’arrive à jouer quelques matchs. Après, je ne sais pas trop ce qu’il s’est dit, ce qu’il s’est passé, mais il était écrit que je devais partir. On ne s’est pas compris avec le club, s’il fallait me vendre ou non… Et puis, la seconde partie de la saison, je devais partir en janvier, mais je n’ai pas réussi à trouver d’accord lors du dernier jour du mercato. À la fin, mon expérience a mal fini en général et ça m’a attristé. J’aurais aimé finir la saison comme je l’avais commencé.
Tu n’as jamais eu de discussion avec le coach à propos de ton temps de jeu ?Ce n’était pas lié à l’entraîneur, selon moi. Michel m’a fait jouer quelques matchs durant la première partie de saison, comme n’importe quel coach qui fait des choix finalement. La vérité, c’est que nous ne faisions pas une bonne saison et que le club voulait aussi faire jouer davantage ses jeunes que les joueurs prêtés.
Qu’est-ce que tu as fait de février à juin ? Tu aimais la vie à Marseille ?
J’habitais Cassis, qui est une très belle ville. Mais ma vie, c’est le foot, et quand ça ne va pas à ce niveau-là, le reste ne va pas non plus… Au cours d’une interview que j’avais donné, mes propos sur le football français avaient été déformés. On m’avait prêté des propos où je critiquais soi-disant le championnat français, alors que j’avais simplement dit que le football italien était plus tactique et que le football français valorisait davantage les jeunes, ce qui est une bonne chose que l’on devrait davantage faire en Italie selon moi d’ailleurs.
C’était difficile à vivre ?De voir pas mal de fausses informations passer, de voir qu’une radio dit de toi que tu es le pire joueur de la Ligue 1 de la saison alors que tu n’en joues même pas la moitié… Forcément, ça l’est. Dans ma carrière, j’ai fait des bons et des moins bons matchs, mais d’un point de vue humain, j’ai toujours été correcte avec tous le monde.
À côté du foot, tu as une grande passion pour le deejaying. Tu as notamment sorti un single en 2013, qui s’intitule « Moving On » . D’où te vient cette passion ?
C’est une passion secondaire, car j’aime la musique depuis que je suis petit. Quand je suis devenu joueur professionnel avec la notoriété qui va avec, j’ai pu rencontrer pas mal de monde dans l’industrie musicale. Et en 2013, j’ai produit ce titre pour une association qui s’occupe d’enfants autistes et j’en suis très fier aujourd’hui.
Tu continues encore aujourd’hui ? Je continue toujours aujourd’hui, toujours comme passion. J’ai mixé quelques fois en club pour m’amuser, mais rien de plus. J’aime beaucoup la house musique, j’ai des amis DJ comme Andrea Oliva qui est aussi une référence dans ce domaine.
Tu as signé un contrat avec le club de Miami Beach, qui va disputer sa première saison en quatrième division aux États-Unis. Pourquoi relever ce challenge ?À vrai dire, les motifs sont divers. Je vais à Miami depuis une dizaine d’années et j’ai toujours eu l’envie et le désir de vivre là-bas. C’est une équipe née d’Italiens, qui m’ont demandé de participer à 360 degrés au projet. C’est aussi ces facteurs là qui m’ont poussé à tenter le coup à partir du mois de janvier.
Propos recueillis par Andrea Chazy