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- 27e journée
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Palerme, une vie en rose et noir
Relégué en Serie B l'an passé, Palerme réalise actuellement une saison honorable parmi l'élite avec à sa tête un homme qui résiste (pour l'instant) bien à l'hystérie du président Zamparini. Giuseppe Iachini, un petit homme à l'origine de grandes choses.
En Italie, il y a des grosses écuries qui tirent la gueule (au hasard, Milan et l’Inter) et des petites pour qui les affaires marchent plutôt pas mal. C’est le cas des deux clubs de Gênes, la Samp et le Genoa, qui s’accrochent solidement au wagon de tête depuis le début de la saison, et puis de Palerme, remonté l’été dernier parmi l’élite après une pige d’un an en Serie B. Un club qui fait rarement les gros titres des quotidiens transalpins, mais dont le parcours en championnat mérite pourtant qu’on s’y attarde. Mal engagée en début de saison après deux sévères roustes encaissées face à la Lazio et Empoli (respectivement 4 et 3-0), l’équipe du diabolique Maurizio Zamparini a remonté la pente au point de viser désormais une place européenne, certes compliquée à décrocher, mais pas inatteignable. Onzièmes à seulement sept longueurs de la Fiorentina (cinquième), les hommes de Beppe Iachini réalisent un joli parcours qui pourrait les ramener sur le chemin de l’Europe plus vite que prévu. Un regain de forme en partie dû à leur entraîneur à casquette et à ce duo d’attaque argentin que rien n’arrête : Paulo Dybala et Franco Vázquez.
La Valse des pantins
Si l’on se prend de nouveau à se délecter du jeu et des prestations des Rosaneri, notons que cela n’était plus arrivé depuis approximativement quatre saisons et cette huitième place décrochée en 2010/2011. L’équipe était alors drivée par Delio Rossi, viré une première fois en février 2011 après trois défaites consécutives et une taule historique contre Udinese à domicile (0-7 !), puis finalement rappelé par Zamparini deux mois plus tard pour finir le job. Depuis, la vie de Palerme se résume à un tour de montagnes russes. En quatre ans, l’équipe a connu la relégation, la montée, a vu défiler sept entraîneurs différents, a vu partir Sirigu et Pastore pour Paris, Balzaretti pour la Roma, Iličić pour la Fio, Abel Hernández pour Hull City et son emblème Miccoli pour Lecce. Alors oui, ce renouveau du club sicilien fait plaisir à voir, d’autant qu’il y a encore un an et demi, l’avenir s’annonçait plutôt noir que rose pour l’ancien berceau d’Edinson Cavani.
Nous sommes en mai 2013, au Juventus Stadium. Une semaine après sa victoire 1-0 contre l’Inter de Stramaccioni qui l’avait fait sortir de la zone rouge, Palerme s’incline sur le même score face à la Vieille Dame de Conte. Vidal transforme le penalty obtenu par Mirko Vučinić à l’heure de jeu et anéantit définitivement les espoirs palermitains. Trois matchs et trois défaites plus tard, le championnat se referme et rend son verdict. Neuf ans après l’avoir quitté, Palerme retourne en Serie B. Durant la seule saison 2012/2013, celle de la relégation donc, Maurizio Zamparini virera cinq fois ses entraîneurs entre les mois d’août et de mai. Des licenciements à la pelle qui ne changeront rien à la situation catastrophique du club sicilien. Le Zamp’ a beau le nier, sa manière de faire valser les coachs, puis de les rappeler quelques mois plus tard n’a alors fait que détériorer l’image de Palerme. Et la sienne, par la même occasion. « Même en étant conscient des conséquences économiques qui en découleront, je renonce à revenir vers celui qui m’a chassé. L’orgueil et la dignité n’ont pas de prix » , avait un jour déclaré Marco Giampaolo. S’il y en a un qui a particulièrement fait un four, c’est bien Gennaro Gattuso. Arrivé aux commandes du club à l’été 2013 pour redresser l’équipe en Serie B, Rino se fera dégager deux mois plus tard après six matchs à la tête du navire. Depuis son départ, un homme tire les ficelles, le même depuis près de 70 matchs : Giuseppe Iachini.
Beppe de somme
Aussi incroyable que cela puisse paraître, ce qu’est en train de réaliser Beppe Iachini sur le banc de Palerme relève purement et simplement de l’exploit. On ne parle évidemment pas de tactique ni de résultats mirobolants, mais bien de longévité dans l’histoire du club sicilien. Ce samedi après-midi, face à la Juventus, l’homme qui ne quitte jamais sa casquette fêtera son 64e match d’affilée en tant qu’entraîneur des Rosaneri. Une éternité au pays de Zamparini, pour ne pas dire un record. Avant lui, seul Francesco Guidolin était parvenu à franchir la barre des 60 matchs sans se faire lourder comme un malpropre. Il faut dire que le père Giuseppe a des arguments à faire valoir. Sur les 63 rencontres qu’il a dirigées, Palerme en a remporté 31, en a perdu 11 et s’est annulé à 21 reprises. Soit un bilan plutôt convenable pour un club en pleine convalescence. Étrangement, ce retour à la normale côté gestion coïncide avec l’amélioration des résultats. Un constat qui tend à invalider la thèse de Zamparini qui voudrait que les entraîneurs soient les seuls responsables de la déroute d’un club.
En plus d’avoir fait remonter Palerme en Serie A, d’être allé taper Naples, Milan et d’avoir tenu tête à la Roma, Iachini peut également se targuer d’avoir fait éclore l’un des duos d’attaque les plus sexy d’Italie. L’histoire retiendra qu’avant, peut-être, de briller dans un grand club européen (Paris ?), Paulo Dybala a d’abord explosé à Palerme sous les ordres du petit Joseph. Il en va de même pour son collègue italo-argentin Franco Vázquez qui est en train de réaliser sa saison référence avec ses sept buts et dix passes décisives claquées en championnat. À eux deux, Vázquez et Dybala ont inscrit la moitié des buts de Palerme cette saison. Un binôme fou qui n’est pas sans rappeler le Tévez/Llorente de l’année dernière ou le Immobile/Cerci du Torino. À l’avenir de nous dire combien de temps encore Zamparini pourra conserver ses deux joyaux qui font déjà briller les mirettes des plus grands d’Europe. Entre deux menaces de mort à Massimo Ferrero, le bon Maurizio trouve parfois le temps pour s’exprimer sur le futur de ses gars sûrs : « Il n’y pas eu, et il n’y aura pas de contacts entre Palerme et la Juventus, ou encore entre notre club et le Napoli, au sujet de Franco Vázquez. L’Argentin sera un cadre de notre prochaine saison. Diffuser de fausses informations est profondément malhonnête. Toutefois, afin de décourager les approches, le prix du joueur est fixé à hauteur de 25 millions d’euros. » Quand il s’agit de parler gros sous, le président palermitain a toujours le dernier mot. Quand il s’agit de faire valser les coachs, de critiquer Samuel Eto’o, de comparer Claudio Lotito (le président de la Lazio) à Benito Mussolini ou de s’embrouiller avec son meilleur joueur aussi, d’ailleurs. Voilà, dans les grandes lignes, à quoi ressemble le quotidien du club sicilien. Une vie faite de montées, de descentes, de licenciements à la pelle et de souvenirs extraordinaires. Bref, une vie en rose et noir.
Par Morgan Henry