- Liga
- J6
- Leganés-Barcelone
Ousmane Dembélé, de gréviste à employé modèle
Après une première saison catalane gâchée par les blessures, et par une attitude pas toujours irréprochable, Ousmane Dembélé (21 ans) semble plus mûr. Auteur de 5 buts en 7 matchs depuis le début de saison, le champion du monde brille sur le terrain. Aussi parce que challengé par son club, il a changé en dehors.
Peu de leaders syndicaux pourraient se vanter d’avoir mené deux grèves en à peine 2 ans. Avec une Coupe d’Allemagne, c’est pourtant le palmarès qu’affichait Ousmane Dembélé à la veille de son transfert au FC Barcelone pour 105 millions d’euros (hors bonus). Deux ans plus tôt, en juillet 2015, le natif de Vernon sèche le stage de préparation du Stade rennais et refuse de signer le contrat pro qui lui est proposé. « J’ai envie d’être dans un club qui me fasse confiance à 100%. Ici ce n’est pas le cas. Je ne changerai pas d’avis » , déclarait-il avant de se raviser. Il explosera en Bretagne, et se retrouve au Borussia Dortmund, la saison suivante, où ses crochets continuent de faire mal aux défenses adverses. À l’été 2017, dans cette Ruhr, jadis terre de grandes grèves, le jeune Dembélé décide de boycotter l’entraînement du BvB pour « réaliser son rêve » et signer au Barça qui vient de perdre Neymar. De Rennes à Barcelone, Dembouz est pressé, ce qui lui laisse peu de temps pour corriger certains détails de sa vie, de son jeu, pour devenir le joueur qu’il rêverait d’être.
Basic instinct
« C’était un joueur qui n’était pas sérieux, dans le sens où quand il s’entraînait, on avait l’impression qu’il était au quartier » , confiait Giovanni Sio sur SFR Sport en mai au sujet de son ancien coéquipier chez les Rouge et Noir. Un manque de sérieux très vite relevé en Espagne. La saison dernière, El Mosquito a connu une saison compliquée. Deux fois blessé à la cuisse gauche, l’ailier a été ciblé par la presse espagnole pour sa mauvaise hygiène de vie, et ses sorties nocturnes. Acheter la paix à coups de crochets passait à Rennes ou à Dortmund, pas en Catalogne. Le club culé débauche un chef personnel pour qu’il mange mieux. Lorsqu’il est de nouveau disponible en février, il peine à s’adapter au 4-4-2 mis en place par Ernesto Valverde. Notamment à protéger le latéral offensif qu’est Sergi Roberto.
Et devant, sa fougue s’exprime peu dans un jeu moins vertical que ses qualités naturelles ne le voudraient. Ses coéquipiers le sentent alors « bloqué » rapporte El Mundo Deportivo. Les rumeurs l’envoyant ailleurs vont bon train. Le problème, en fait, c’est que chez les Blaugrana, Dembélé doit s’adapter et apprendre plusieurs choses en même temps. À se discipliner, à comprendre une nouvelle langue et à ne plus compter sur ses seuls dribbles pour exister. « C’est un joueur qui n’était pas habitué à travailler tactiquement, et nous travaillons cet aspect avec lui. Nous voulons qu’il s’adapte à notre jeu petit à petit » , confiait à son propos Jon Aspiazu, fidèle adjoint de Valverde en fin de saison dernière. Un confort encore froissé par l’arrivée de Philippe Coutinho en hiver, puis celle de Malcom cet été. Une première saison, vingt-quatre matchs, quatre buts, neuf passes décisives. Correct. Pas dans une institution comme le Barça, qui impose le respect à ses joueurs. Et au vu de son attitude en ce début de saison, Ous semble l’avoir bien compris.
De gréviste à joueur modèle
Ousmane Dembélé a connu un été de rêve. Vainqueur d’une Coupe du monde qu’il a certes peu jouée (quatre matchs, dont deux minutes à partir des huitièmes), il a néanmoins été un bon coéquipier, l’un des animateurs de la vie du groupe, le fondateur-entraîneur du Winchester FC. Puis est revenu une semaine plus tôt de ses vacances pour reprendre l’entraînement, et participer à un match qu’il aurait dû observer d’une plage ensoleillée. Il a ouvert sa saison en beauté, d’une frappe dans la lucarne du gardien sévillan Vaclík, offrant la Supercoupe d’Espagne au Barça. Depuis, il est inamovible sur la pointe gauche du 4-3-3 de Valverde. L’ancien Rennais sait être décisif, ses buts ont rapporté des points (6), un titre et quelques frissons.
Ses progrès en espagnol le mettent plus à son aise au sein du vestiaire. Et il assimile mieux son rôle particulier sur le côté gauche, où il déborde peu et laisse volontiers le couloir à Jordi Alba. Il se concentre davantage sur les combinaisons avec les joueurs d’axe : Suárez et Coutinho, ou Messi en électron libre. Un jeu où une passe imprécise est souvent synonyme de perte de balle, et où la marge de progression du Français est encore énorme. L’évolution du gamin de la Madeleine est d’abord le résultat d’une prise de conscience. Celle que, pour s’imposer au Barça, il faut toujours faire plus. Et à laquelle son entraîneur a répondu positivement en lui donnant sa confiance. Pour autant, comme l’a souligné Ernesto Valverde récemment, ce n’est qu’un début. « Nous espérons que ce sera le point de départ pour la suite. » La régularité de Dembélé, et ses performances dans les grands matchs en diront plus. Mais pour l’instant, le gréviste semble définitivement avoir rendu ses petites pancartes revendicatives.
Par Romuald Gadegbeku