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Oualid El Hasni : « J’ai moi-même envoyé des CV pour les centres de formation »

Propos recueillis par Valentin Pauluzzi
8 minutes
Oualid El Hasni : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>J&rsquo;ai moi-même envoyé des CV pour les centres de formation<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Aujourd'hui prêté par Vicenza et pensionnaire de Monza en troisième division italienne, Oualid El Hasni raconte comment il a quitté la France en 2009, alors qu'il n'avait que 16 ans. Petit voyage entre Cannes, Brême et l'Italie.

En France, tu es l’homme d’un seul club : l’AS Cannes.

J’ai toujours joué là-bas depuis les débutants. Ce n’étaient plus les grandes années, mais quand j’étais avec les 15 ans nationaux, on avait encore été élu meilleur centre de formation de France chez les amateurs. On a même joué le match contre Lyon qui, eux, avaient remporté le titre équivalent pour les pros.

Comment as-tu été repéré ?

Je n’ai pas été repéré, j’ai moi-même envoyé des CV un peu partout en France pour intégrer des centres de formation. Sedan, Beauvais et Clermont étaient intéressés, j’ai même passé quelques jours à l’essai chez ces derniers. Et j’en avais envoyé un aussi au Werder.

Pourquoi ce club alors qu’il y en a des milliers ?

Parce que mon frère, qui joue aussi à foot, l’avait fait l’année d’avant, et il avait reçu une réponse négative, mais au moins, ils avaient répondu. Je me souviens très bien du jour où j’ai reçu la lettre du Werder, il y avait écrit : « Nous vous remercions pour votre demande, nous voulons vous voir d’une période de cinq jours à une semaine. Vous devez payer le voyage, mais on s’occupe de l’hébergement et de la nourriture. » J’y suis allé en train, tout s’est bien passé et ils m’ont demandé de revenir pour un beau tournoi avec les U17 en fin de saison. J’ai affronté le Borussia, Schalke, etc. C’était dans la poche, j’ai été pris pour la saison suivante, c’est-à-dire 2009-10.

Envoyer des CV, c’était le seul moyen de percer ?

Je n’avais pas d’agent, et le problème à Cannes, c’est qu’ils cachaient souvent les choses aux joueurs, c’était déjà arrivé avec mon frère. Je savais que je pouvais entrer au centre de formation de Cannes avec l’école et compagnie, mais bon, quand tu as le Werder…

Tu as parlé de ton frère, famille de footeux alors ?

J’ai deux frangins qui sont passés aussi par Cannes, le plus grand est de 87 et a même fini à Châteauroux, mais il a dû arrêter pour des raisons extra-sportives. Le plus petit de 90 a eu des problèmes au genou, c’est dommage, parce qu’il avait fini au Club africain en Tunisie avec les juniors et les Espoirs.

Que te promettait le Werder ?

Ils m’ont dit de d’abord viser les U19, et qu’après, on parlerait pour les U21 et les U23 qui, en fait, sont la réserve. En U17, mon coach, c’était Viktor Skrypnyk qui coache les A maintenant. On l’adorait tous, il savait bosser avec les jeunes et comment leur parler. Je ne suis pas du tout étonné qu’il soit arrivé là.
Pendant un mois, j’étais logé à Brême au centre de formation, qui était au stade à l’époque. Tu ouvrais la porte, tu voyais le terrain. Les jours de match, c’était top !

École terminée alors ?

Non, moi, je l’ai quittée après la troisième. Là-bas, je prenais des cours particuliers pour apprendre la langue, mais c’était trop compliqué pour intégrer une école française en Allemagne. Pas de regrets, je savais que l’école, ce n’était pas pour moi. En revanche, ça embêtait plus mes parents, mais moi, je n’allais là-bas que pour le foot.

On imagine le contraste saisissant.

Je savais que ça allait être difficile, je n’avais même pas encore 16 ans quand je suis parti. J’ai galéré au début, rien que le climat, parce que c’est tout au nord de l’Allemagne, l’hiver ça caille ! Pendant un mois, j’étais logé au centre de formation qui était au stade à l’époque, tu ouvrais la porte, tu voyais le terrain. Les jours de match, c’était top ! Après, on a été mis dans un appart’ à deux avec un autre Français qui venait de l’OL, ou plutôt un Russe, Alikhan Dadier ! Aujourd’hui, il joue à Saint-Priest en CFA.

Sprichst du Deutsch ?

Ja ! Malheureusement, j’ai tout perdu. J’avais mis six mois, voire plus pour parler un peu. Au début, c’était surtout des termes du foot « ça vient ! » , « passe » . Et après, ça venait en parlant avec les coéquipiers, mais j’ai tout oublié une fois arrivé en Italie.

Donc tu passes deux saisons en tout en Allemagne…

U17 et U19. C’est la génération Özkan Yildirim avec qui j’ai encore beaucoup de contacts. Il y avait aussi Niclas Füllkrug, Levent Aycicek, etc, des mecs qui ont percé.

Tu confirmes que la formation allemande, c’est carré ?

Niveau structures, ils sont au top. Techniquement, c’est au-dessus, la moitié des joueurs étaient internationaux. Quand tu joues avec des mecs comme ça, tu progresses forcément.

Et pourquoi ce départ pour l’Italie ?

En fait, Parme me proposait un bon truc professionnel, j’étais franchement tiraillé. Un agent m’a dit de venir passer un essai en mars 2011, ça s’est bien passé. Le problème, c’est que je suis resté sans club pendant deux, trois mois. Je reviens en fin de saison pour des tournois avec les U19 et ça semblait réglé. Mon agent de l’époque me dit : « Tu peux partir en vacances tranquille » . Les jours passaient, août, septembre et pas de nouvelles. Je l’ai rappelé : « Oh, tu te fous de moi, il se passe quoi ? » Il m’a parlé de problèmes d’argent, mais il n’a jamais voulu me dire la vraie raison. Du coup, je suis revenu à Cannes dans ma famille.

Retour à la case départ alors.

Et oui, je m’entraînais avec un club local, c’est là qu’un agent de Nice me voit et m’amène à Vicenza, club de Serie B, où je signe à l’hiver 2012, avec, cette fois, un contrat pro ! Je suis quand même resté plus de six mois sans jouer, il y a de quoi tergiverser, mais j’ai réussi à garder le moral. Sincèrement, je ne connaissais pas mon nouveau club, j’ai googlé tout ça et j’étais rassuré, car c’est une équipe historique ici. Je m’entraînais avec les pros, et je descendais jouer avec les U19. Pour un défenseur comme moi, l’Italie c’est top. Il y avait un autre Français aussi, Farid Raiani, qui venait de Sochaux, je ne sais pas ce qu’il est devenu. Comme quoi, une carrière, ça ne se joue à rien.
Je ne suis pas directement touché, car en prêt, mais ceux sous contrat ne touchent pas de salaire depuis six mois, ça fout les boules

Le club est relégué, ce qui te permet de faire tes débuts pros lors de la saison 2012-13, avant de remonter dans des conditions particulières.

Effectivement, j’ai pas mal joué, on finit 5es, on perd en play-off, mais on est repêché. Sauf que ça s’est fait super tard. On devait partir à l’hôtel la veille du premier match, là on apprend que la Fédération nous a choisis, c’était nous ou Pise ! Évidemment, grosse chouille et une semaine plus tard, match de Serie B à Trapani où je joue en plus. Nous, on a fait toute la prépa pour passer la saison en troisième division. Heureusement, on a une dérogation qui a permis aux dirigeants d’avoir dix jours de plus pour monter l’équipe.

En plus, ça tourne, Vicenza est même en lice pour monter en Serie A.

Je suis très content, même si j’ai dû partir. Malheureusement, je me suis blessé dès la deuxième journée aux adducteurs. J’ai fait une rechute un mois après et bim encore deux mois. Si je n’étais pas blessé, je pense que j’avais de grandes chances d’être titulaire. Mais je peux revenir l’an prochain, si l’équipe monte, j’aurais fait Lega Pro, Serie B et Serie A en trois saisons, pas mal !

En attendant, tu es en troisième division à Monza, une équipe en grandes difficultés financières à la manière de Parme.

Je voulais du temps de jeu, mais j’étais parfaitement au courant de la situation économique du club. C’est difficile de rester indifférent, même si je ne suis pas directement touché, car je suis de passage en prêt. Ceux qui sont sous contrat ne touchent pas de salaire depuis six mois, ça fout les boules. L’équipe a quasiment été refaite au mercato d’hiver, le coach nous a dit : « C’est comme si on recommençait une nouvelle saison. » D’ailleurs, lui, Fulvio Pea, il entraînait les U19 de l’Inter quand il y avait Mourinho, ils se connaissent très bien.

Tu y côtoies Gilberto Martinez, une vieille gloire costaricienne.

Le mec a joué à la Roma, a disputé deux Coupes du monde avec le Costa Rica, c’est un bonhomme quoi ! En plus, c’est un gars super sympa, qui me parle beaucoup vu qu’il est défenseur. Il me dit tout le temps que je lui rappelle un collègue de sa sélection. À 36 piges, c’est encore du solide.

Binational, tu as opté pour la Tunisie ?

J’ai été convoqué avec les U23 pour préparer les qualifs des JO 2016. On va affronter deux tours au mois de mai, d’abord le Soudan, puis, si on gagne, le Maroc même s’ils ne sont pas à l’abri d’une suspension. Ensuite, il y a une phase de poules avec deux groupes de 4, et trois équipes filent au Brésil. Et franchement, il y a moyen. Participer aux J.O, c’est un truc qui arrive qu’une fois dans une vie de footballeur, c’est un vrai objectif !

Au final, tu préfères les Allemandes ou les Italiennes ?

Italiennes ! Elles ont beaucoup plus de style, c’est l’influence de la mode. Bon, après il y a de très belles filles en Allemagne, hein.

On parlait de voitures en fait…

(rires) J’en ai même pas !
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Propos recueillis par Valentin Pauluzzi

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