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Osorio, profesor de foi

Par Maxime Brigand, à Saint-Pétersbourg
Osorio, profesor de foi

Appelé à la démission avant le Mondial, Juan Carlos Osorio, sélectionneur d'un Mexique notamment tombeur de l'Allemagne et qui s'apprête à défier le Brésil lundi, s'offre une revanche grandeur nature en Russie. L’avènement d'un homme à part, fabriqué entre l'Angleterre et les États-Unis.

Un sept à la suite, mais pas de fête. Vendredi dernier, à Ekaterinbourg, Juan Carlos Osorio s’est installé sur les coups de 20 heures sur une chaise de l’auditoire, a retiré ses lunettes durant une dizaine de secondes et a planté son regard dans celui de son interlocuteur du moment. Alors, heureux de cette qualification pour les huitièmes, profesor ? « Ce soir, nous sommes qualifiés, car nous avons battu l’Allemagne et la Corée du Sud. Mais je suis en colère. J’ai pris une grande leçon. Mon erreur a été d’être un puriste. Je respecte le style de jeu de la Suède, mais je ne l’approuve pas. Nous avons besoin de trouver un juste milieu pour stopper nos adversaires dans les airs, tout en gardant notre p,ropre style. La Suède est très puissante dans les airs et très bonne en défense donc nous avons beaucoup appris. Aujourd’hui, nous sommes tous coréens… » Oui, malgré deux victoires grattées lors de ses deux premiers matchs, le Mexique aura réussi à se faire peur dans ce Mondial, s’effondrant tactiquement – l’utilisation d’une défense à quatre a notamment été une erreur admise par Osorio – contre la Suède (0-3) et aurait pu filer le second ticket pour la phase à élimination directe à l’Allemagne, finalement scotchée par les Coréens (0-2) à Kazan. Tout ça aura été « épuisant mentalement » , mais l’important est ailleurs : lundi, la Tri a rendez-vous avec ses démons, à Samara, face à un Brésil qu’elle n’a plus battu en compétition officielle depuis le premier tour de la Copa América 2007. Suffisant pour foutre la paix à Juan Carlos Osorio, pour le moment.

Chef-d’œuvre personnel et récréologie

Le traité a été signé le 17 juin dernier, après l’exploit du Mexique, tombeur dès son arrivée en Russie de l’Allemagne. Un jour où, comme souvent, Osorio a lancé la couverture sur le dos de ses joueurs : « Nous avons mis au point un plan il y a six mois. Il y a eu des changements de dernière minute à cause des blessés, mais le principe est resté le même : il fallait avoir deux ailiers très rapides. » C’est tout ? Non, bien sûr, l’entraîneur colombien a également évoqué avoir « anticipé qu’ils feraient entrer Mario Gómez en fin de match. Donc ces derniers jours, nous nous sommes beaucoup entraînés à jouer avec trois défenseurs et quatre milieux. J’ai aussi fait sortir Vela, car son rôle était de jouer devant les deux milieux défensifs, et il fallait qu’il donne tout pendant une heure. Nous n’avions pas plus que soixante minutes dans notre budget. Cela m’a attristé aussi de le sortir, mais c’était notre stratégie depuis le début. » Puis, il y a eu la psychologie, un secteur de la préparation dont s’occupe l’ancien joueur Imanol Ibarrondo, devenu coach mental après son éphémère carrière. Cette fois, la phrase du jour était la suivante : « Il faut jouer avec l’amour de la victoire plutôt qu’avec la peur de la défaite. C’est ce qu’ont très bien fait les joueurs. » Ou comment se construire un petit chef-d’œuvre personnel.

Pour Osario, c’était le moment, lui qui quatorze jours plus tôt était sorti de la pelouse du stade Azteca avec une victoire dans la poche contre l’Écosse (1-0), mais aussi un gros paquet de sifflets. « Fuera, Osorio » , voilà quel était le message. Après la rencontre, le natif de Santa Rosa de Cabal affirmera ne rien avoir entendu – une belle pirouette médiatique –, mais se fera aussi une nouvelle fois allumer publiquement par les vieilles gloires du pays, Hugo Sánchez en tête : « Je n’aime pas cet entraîneur. Osorio est un Colombien. S’il est si bon, expliquez-moi pourquoi il n’entraîne pas la sélection colombienne ? » Drôle d’ambiance. Reste qu’Osorio n’a rien d’un devin, ni d’un pitre (33 victoires en 51 matchs dirigés, plusieurs titres gagnés en Colombie), il est juste différent, et c’est ce qu’on lui reproche au Mexique. Son surnom ? El Recreacionista, soit le récrélogue : encore un cliché. Juan Carlos Osorio, qui cite souvent en interview du Jorge Luis Borges, est bien autre chose, mais a toujours été un étranger. Partout. C’est la clé de compréhension.

Houllier, Bielsa et Ferguson

Avant le coach, il y a eu le joueur : un milieu défensif qui a joué au Brésil, à l’Internacional, et pour le Once Caldas de Manizales, qui a arrêté de cavaler après son rêve à 24 piges pour devenir entraîneur. « Je savais que ma route serait longue » , expliquait-il il y a quelques mois au Sun. L’objectif d’Osorio est alors simple : devenir le plus pointu possible. L’homme file alors aux États-Unis, où il obtient des diplômes et ouvre une salle de gym, à New York avant de la revendre pour rejoindre l’Angleterre. Direction Liverpool, histoire de suivre un cursus sur la science et le foot, à l’université John Moores de la ville. Là, il frappe aux portes, celle d’Everton s’ouvre, celle du Liverpool FC reste fermée. Pas de problème, Juan Carlos Osorio tourne autour de Melwood, le centre d’entraînement des Reds, à la recherche d’un point de vue, et se lie rapidement d’amitié avec une famille qui vit face aux terrains, mais possède surtout une fenêtre parfaite où le jeune apprenti s’installera des après-midi entières à la fin des années 1990. Précision : la famille supporte Everton, mais ouvre ses bras à Osorio, lui laissant un libre accès à la chambre du haut pour observer les entraînements de la paire Houllier-Evans.

Puis, il y a la route : des heures passées à parcourir l’Angleterre du foot, à Blackburn, à Bolton, souvent sans billet au départ, au point d’être un jour retenu à l’extérieur d’Old Trafford. Manchester est aussi pour lui une mine d’or, et Juan Carlos Osorio reviendra à plusieurs reprises pour obtenir quelques mots de Ferguson en personne. De Fergie, le Colombien a gardé l’idée de cohésion globale d’un groupe : la fameuse rotation, nerf des critiques contre Osorio au Mexique. Lors de la Copa América Centenario, jouée en 2016 aux États-Unis, le sélectionneur de la Tri aura ainsi utilisé trois gardiens différents lors de la phase de poules avant de se faire ouvrir en quarts de finale de la compétition par le Chili (0-7). Ce soir-là, à Santa Clara, il entre dans le vestiaire, se trempe le visage d’eau, retire sa cravate et regarde ses joueurs : « Si vous n’avez pas confiance dans ce qu’on fait, je sors de cette pièce et j’annonce ma démission. » Osorio profite aussi de l’instant pour jurer à ce groupe qu’il croit en lui, ce à quoi les joueurs lui répondent par une confiance aveugle. Dans la foulée, il disparaît et s’en va passer cinq jours dans la maison de Marcelo Bielsa pour faire le bilan de ses méthodes. Le bon parcours du Mexique en Russie en est le résultat. Reste à tuer la malédiction des éliminations en huitième de finale de Mondial (six fois de suite depuis 1994), surnommée au pays « la maldición del quinto partido » : un mystère qui doit voler en éclats ce lundi. Ensuite, Osorio quittera probablement un poste nerveusement usant et devrait s’offrir un nouveau rêve : diriger la Team USA. Une autre guerre.


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Ce que doit mettre le Brésil dans son panier pour gagner le Mondial 2026
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