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Oranje et des espoirs
Face aux championnes d’Europe en titre néerlandaises, les Bleues ne partent pas favorites, mais elles ont un gros coup à jouer. Nombreuses sont en effet les tricolores qui disputent leur premier tournoi majeur et donc, sans complexe, si ce n'est celui de briser le plafond de verre des quarts de finale. Serait-on vraiment sur du 50-50 au coup d'envoi. Balle au centre !
C’est un jeu de miroirs qui s’est joué en conférence d’avant-match. À la question de savoir qui était VRAIMENT l’équipe favorite de ce quart de finale, Mark Parsons, sélectionneur des Pays-Bas, a commencé par lister les excellentes performances enchaînées par les Lionnes orange dont il a la charge depuis septembre 2021 : « Championnes d’Europe il y a cinq ans, finalistes du Mondial il y a trois ans, quart-de-finalistes aux JO l’an passé… Mais depuis quelques mois, nous sommes entrés dans une nouvelle ère, avec un nouveau groupe, très différent. » La suite confirme ce botage en touche bien senti : « La chose la plus importante à faire demain (samedi), ce sera de représenter l’identité de cette équipe, à savoir : de la camaraderie avec de l’énergie. Chaque fois qu’elle joue quelque part dans le monde, elle est soutenue par une marée orange, et ce sera de nouveau le cas face à la France. Ce sera donc un challenge excitant. » Corinne Diacre, elle, s’est sans surprise débarrassée d’un poids psychologique : « De mon point de vue, on a un match de football à jouer. Les Pays-Bas étant tenantes du titre, s’il doit y avoir un favori, ce serait donc plutôt elles, d’autant que, nous, on n’arrête pas de nous répéter qu’on n’arrive pas à passer les quarts de finale. »
Quelques jours plus tôt, au camp de base d’Ashby-de-la-Zouch, la jeune milieu de terrain Ella Palis, entrée en seconde période face à l’Islande, tentait de se montrer un brin plus positive : « On n’a pas participé aux tournois précédents, et chaque compétition est différente, donc ça ne sert à rien de parler de ce qu’il s’est passé avant. Nous, on a un quart de finale à jouer et un objectif : le passer. Je ne crois pas qu’on puisse dire qu’on n’a pas la pression, mais il faut qu’elle nous galvanise pour qu’on sorte le meilleur de nous-mêmes. » Même son de cloche du côté de sa jeune partenaire Selma Bacha qui, comme Palis et sept autres Bleues, connaît actuellement sa première expérience en tournoi majeur : « On y croit parce que si on n’y croit pas, personne n’y croit. Ce groupe, il a quelque chose, il est rempli de qualités et de solidarité, c’est notre plus grande force. Je pense que les supporters ont vu qu’on a un gros mental et qu’on ne lâche jamais rien. Donc on sera au rendez-vous. »
Expérience et innocence
Pareil discours irait conforter les journalistes néerlandais dans leur sentiment global, selon lequel la France est bel et bien favorite face à des Lionnes orange qui peine à convaincre depuis le départ de Sarina Wiegman vers l’Angleterre. Avant d’affronter les Bleues, le bilan de Mark Parsons n’est en effet guère excitant : « seulement » dix victoires en dix-sept matchs, auxquelles s’ajoutent une gifle reçue face aux Three Lionesses (5-1) lors de la répétition générale pré-Euro, ainsi que des nuls inquiétants contre le Japon et la Tchéquie. Sans oublier une défaite face aux Bleues lors du Tournoi de France en février dernier. Mais attention à l’animal blessé : « Nous avons encore à progresser sur le terrain. Mais plus le niveau de l’adversaire s’élève, plus mon équipe est forte. Je suis beaucoup moins stressé quand on joue une grosse équipe. J’ai une très grande confiance en mes joueuses », a prévenu Mark Parsons. Dans le groupe, seules la défenseuse centrale Aniek Nouwen et la latérale droite Lynn Wilms font vraiment office de sang neuf. Le reste du XI est, à peu de chose près, le même depuis l’Euro 2017. Face à une équipe française next gen modelée par Corinne Diacre depuis trois ans, on pourrait mettre une pièce sur la victoire de joueuses qui évolueront sans complexe pour écrire leur propre histoire, plutôt que de porter le poids du passé et des échecs précédents.
Et parce qu’à chaque chose malheur est bon, les Françaises pourraient bénéficier d’un coup de pouce du destin, en tout cas sur le plan psychologique : élue meilleure joueuse de l’Euro 2017, Lieke Martens est forfait pour le reste du tournoi à la suite d’une blessure au pied. Pas mal pour contrebalancer l’absence de Marie-Antoinette Katoto, déjà plus ou moins palliée par Melvine Malard, qui pourrait enchaîner sur le front de l’attaque tricolore. En face, la question se pose pour la serial buteuse d’Arsenal Vivianne Miedema, testée positive au Covid et sortie de son isolement à trois jours du match seulement. Mark Parsons se voulait cependant rassurant en estimant qu’« il y a une chance qu’elle soit disponible, mais pas encore sûr qu’elle démarre. On a coché pas mal de cases en vue de son retour, mais il en reste encore quelques-unes. » En pleine possession de ses moyens ? Rien n’est moins sûr.
Rassurant pour les Bleues, surtout au vu de la contre-performance livrée par sa remplaçante attitrée Lineth Beerensteyn face à la Suisse. « Dire que les absences néerlandaises ne changent rien, ce serait mentir, a confié Grace Geyoro à Ashby-de-la-Zouch. Martens est une très grande joueuse et de ne pas l’avoir face à nous, ça peut être un atout. Face à une grosse équipe comme celle-là, il n’y aura pas énormément d’opportunités, donc à nous de les mettre au fond en démarrant très concentrées d’entrée de jeu ! » Surtout quand on sait que, contrairement aux Françaises, les Néerlandaises savent, elles, marquer en deuxième période. Beaucoup même : cinq fois sur huit très exactement. Contre zéro pour les Bleues, rappelons-le. Mais comme se plaît à le répéter à l’envi Wendie Renard et ses coéquipières : « Avec les quarts de finale, c’est une nouvelle compétition qui commence. » Il n’est donc pas trop tard pour renverser la tendance. Et écrire l’histoire au passage ?
Par Julien Duez, à Rotherham