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« On s’est contentés de trouver des plans »

Propos recueillis par Yann Bouchez
«<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>On s’est contentés de trouver des plans<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Ce mois de juin sera sous le signe de la soirée barbeuque devant les matchs de l’Euro. Avec la petite bière qui va bien. Enfin, pas pour tout le monde. Certains ont décidé de tenter l’aventure et d’aller voir du pays, direction l’Ukraine et la Pologne. Témoignages de lecteurs de So Foot qui ont décidé de faire quelques infidélités à leur canapé. Et qui, pour leurs vacances, éviteront donc les juilletistes et les aoûtiens.

Sur le coup, on a pensé avec compassion aux ministres du Tourisme polonais et (surtout) ukrainien. Qui ne doivent pas forcément porter Michel Platini dans leur cœur. Faut dire que niveau business hôtelier et gastronomique, le président de l’UEFA n’a pas fait dans la dentelle, mi-avril. Il a même porté un sacré coup au moral des indécis qui se demandaient encore si ça valait le coût de se rendre à Varsovie et (surtout) à Kiev, en déclarant : « C’est bête d’avoir fait beaucoup d’investissements et puis de dire aux gens qu’ils ne peuvent pas venir, car il y a des bandits et des escrocs qui veulent gagner beaucoup d’argent à l’occasion de cet Euro. » Pointés du doigt, les prix élevés des hôtels et restaurants ukrainiens.
Comme si ça ne suffisait pas, deux semaines plus tard, le 27 avril, une série d’attentats à Dnipropetrovsk, en Ukraine, faisait 27 blessés et mauvais genre avant le début de la compétition. Un mois plus tard, le PS enfonçait un peu plus Kiev : pas question pour les membres du gouvernement de se rendre au pays du peu respectable Viktor Ianoukovytch. Un signe de protestation contre la détention de Ioulia Tymochenko, ex-Première ministre et figure emblématique de la Révolution orange.
Quels souvenirs de Brandao gardent les Ukrainiens ?
Et pourtant, il y en a qui ont décidé de partir à l’Est. Des inconscients ? Des curieux aux questions existentielles du type « Comment prononce-t-on Błaszczykowski en Polonais ? » ou « Quels souvenirs de Brandao gardent les Ukrainiens ? » , comme nous l’a suggéré un internaute ? Sofoot.com a sollicité ses lecteurs pour comprendre les raisons d’un voyage. Témoignages de ces Erasmus du ballon. « On est tout excités, on attend ça avec impatience. » Charles Virgile, 27 ans, travaille « au service financier d’une entreprise américaine » . Pas super funky, dit comme ça. Mais notre homme ne tient plus en place depuis quelques semaines, tel un vulgaire fan de Justin Bieber juste avant (ou pendant, ou après) un concert de son idole.

À partir du 21 juin, il sera en Ukraine, avec ses deux meilleurs potes. « C’est la première fois depuis 1998 que je vais voir une grande compétition internationale autrement qu’à la télé. » Une joie d’autant plus compréhensible que choper des billets n’a pas été une mince affaire. « En décembre dernier, les premières séries de ventes étaient déjà passées, je suis alors allé sur une plate-forme de revente de billets. J’étais posté à « faire du refresh » toutes les journées. C’était une bonne galère. » Qui finit par payer, après plusieurs semaines de patience : « On a trouvé des places à 40 euros pour deux quarts de finale et à 45 euros pour une demi-finale. C’est des catégories 3, créées pour les locaux, à la base. Des prix très corrects parce que, dès que tu montes en catégorie 2, tu paies plus de 120 euros. »
« Une auberge de jeunesse sur rail »
Le budget, Charles a dû y faire gaffe. « On a réservé un Paris-Kiev en avion à 150 euros l’aller-retour en réservant plusieurs mois à l’avance. Je pense qu’en tout, on devrait s’en sortir pour 800-900 euros par personne, pendant huit jours. » Il faut dire qu’il ne devrait pas trop abuser sur les notes d’hôtel : « On va passer notre temps dans les trains. On atterrit à Kiev, on va voir le premier quart à Donetsk. On retourne à Kiev pour le second quart. Puis direction Donetsk pour la demie. Et retour à Kiev pour reprendre l’avion. » De quoi regretter de ne plus pouvoir bénéficier de la Carte 12-25 ? Même pas : « C’est pas cher : 13 euros les 13 heures de train. Et ça économise l’hôtel. Bon après, sur les forums Internet, ils disaient de ne pas prendre de places en catégorie 3… Ça va être comme une auberge de jeunesse sur rail. » Mais pas sûr que Charles et ses potes aient le temps de visiter le pays, en dehors des gares et des stades. « On connaît rien du tout à l’Ukraine et je ne sais pas trop à quoi m’attendre » , avoue Charles. Ce qui est sûr en tout cas, c’est qu’il sera rentré en France fin juin, « pour voir tranquillement la finale à la maison » .
« Match des coiffeurs ou de la peur »
Nicolas Puchat verra aussi la finale à la télé. Avec son accent suisse, cet employé d’un « service industriel à Genève » a pu se libérer douze jours, du 8 au 20 juin. Qui seront bien remplis : six matchs (pour 350 euros), soit un tous les deux jours, 2 500 kilomètres en avion et en train. Avec un fort tropisme pour les rencontres de l’Angleterre, « parce que c’est à ces matchs qu’il y aura le plus de supporters chauds » . Budget total : 2000 euros par personne. Pas vraiment donné, même s’il ne s’est pas permis de folie : « On dormira dans des deux étoiles niveau Ukraine, on ne s’attend à rien d’extraordinaire. Niveau bons plans, pour l’instant, on s’est contentés de trouver des plans, à défaut de les savoir bons. » Quentin « Tino » Terrisse, lui, se montre plus optimiste. Entouré d’une dizaine de potes, « formés à l’ESC (École supérieure de commerce) Rennes » – « une équipe génération 86, pour mêler habilement fougue et expérience, et parce qu’on a toujours un peu de mal à s’identifier à la génération 87 » -, « Tino » partira du 16 au 24 juin en Ukraine. Avec des places réservées pour France-Suède, « match des coiffeurs ou match de la peur » . Une rencontre qui devrait rameuter pas mal d’Hexagonaux, à l’image de Fabien Billet le bien nommé, 25 ans, qui a su en trouver quatre, à 125 euros la place. Et qui fera le trajet, avec trois amis originaires de Troyes, en voiture. Cinq mille kilomètres en bagnole – « louée 660 euros avec kilométrage illimité » – qui ne l’effraient pas. Avec environ sept jours de voiture au programme, pour un ou deux à Kiev, faut quand même aimer manger du bitume…
Mini road trip et portables débloqués
De son côté, l’équipe de « Tino » , composée aussi de « non-footeux » , ne bouffera pas du ballon toute la semaine : « Un mini road-trip de 3 jours est prévu, au lendemain du match, en direction de la mer Noire et de l’ambiance sudiste d’Odessa » , détaille « Tino » , expliquant qu’un membre de l’équipe est « infiltré depuis deux ans en terre hostile, afin de solutionner efficacement les problématiques d’hébergement, de transport et surtout de langage. » « Il bosse en VIE à l’ambassade de France à Kiev et il est russophone, explique Fabien, alias « Fabizevitch ». Il nous a briefés : avoir des portables débloqués pour pouvoir s’appeler, essayer de pas trop avoir d’argent sur soi, avec certains policiers qui sont corrompus. » Lui veut profiter du séjour pour « palper l’ambiance, avec les supporters. Après, il faudra voir s’il y a du monde, parce que la Pologne attire, mais l’Ukraine ça rebute un peu. Mais la nuit à Kiev, c’est quelque chose à faire. Et puis, on pourra en profiter pour voir la différence entre l’image que le pays essaiera d’envoyer pendant la compétition et ce qu’il se passe à l’intérieur… » En attendant, un des onze larrons n’est pas encore au courant qu’il fait partie du voyage : « Seul membre de la troupe à ne pas avoir osé franchir le cap, son périple a malgré tout été organisé en coulisses : billets achetés, congés négociés, valise préparée… » , s’amuse « Tino » , qui compte le prévenir la veille.
Parmi les aventuriers qui se rendent à l’Euro, nombreux sont ceux qui partent en terre inconnue. Ludovic Massenot, lui, sera l’un des rares en terrain connu. Du 13 au 17 juin, il posera ses bagages à Wrocław, sans avoir besoin de feuilleter le Guide du routard. « C’est la quatrième plus grosse ville du pays, explique ce Nordiste d’origine polonaise, dont une cousine vit à Wrocław. Il y a pas mal d’Erasmus, et des boîtes avec des prix intéressants. Pour de la bière basique, la pinte est à 1 euro… Enfin, ça, c’est en dehors de la période Euro. » Mais Ludovic risque de descendre les bières en terrasse, à défaut de pouvoir les siroter en tribunes, la faute à des places vendues à 190 euros. Trop cher pour notre homme, qui n’assistera donc pas à Pologne-République Tchèque dans le stade, mais sur la grande place de la ville.
Le prix, finalement, c’est un peu le casse-tête de presque tous nos globe-trotters. Fabien Billet et ses potes troyens, qui espèrent s’en tirer pour « une vingtaine d’euros » par personne lors des étapes nocturnes jusqu’en Ukraine, ne se font pas d’illusions : à Kiev, la chambre risque bien d’être inabordable. « Vu les tarifs qu’on a vus sur les sites Internet, on a préféré prendre une tente pour là-bas » , raconte Fabien. Et au fait, Michel Platini, il dort dans quel hôtel ? L’UEFA aurait pas une chambre dispo pour Fabien et ses potes ?

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Propos recueillis par Yann Bouchez

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