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« On n’a vraiment pas de pot »
La Coupe de France ce n'est pas que la belle histoire du Petit Poucet qui tape le gros club. C'est aussi des tirages au sort compliqués et beaucoup de rencontres obscures entre clubs amateurs qui se connaissent. Exemple, ce samedi à 18h30, avec le périlleux déplacement de Trélissac, pensionnaire de CFA, à Luçon, équipe de National.
Le 10 janvier 2010, le Trélissac Football Club, alors en CFA2, reçoit l’Olympique de Marseille en 32es de finale de Coupe de France. C’est un événement dans cette terre d’ovalie qu’est la Dordogne. Encore mieux : les Trélissacois désertent leur traditionnel stade Firmin-Daudou à cause de ses 2800 places et prennent possession du Francis-Rongiéras, l’enceinte du CAP, le club de rugby de la « grande » ville. Normalement, le Rongiéras ne peut accueillir que 10 000 personnes, mais ils sont 200 de plus ce jour-là pour voir les hommes de Didier Deschamps. Si Marseille s’impose finalement sur des buts de Cheyrou et Ben Arfa (2-0), la fréquentation fait chaud au cœur. Bientôt cinq ans plus tard, si le TFC – rien à voir avec Toulouse – est depuis monté en CFA et vise à terme une montée en National. Mais pour revivre une telle affiche le mois suivant, il va falloir d’abord se taper un 8e tour. À l’extérieur, à Luçon, dixième de National et qui n’a pas perdu depuis le 5 septembre en championnat, dans un stade de 5500 places, chez un club d’un niveau plus haut, mais sans grand prestige… La magie de la Coupe de France est bien loin et a cédé la place à la grisaille d’un tirage pourri.
« Ce n’est pas le meilleur tirage »
Le pire possible ? « Ce serait manquer de respect à cette formation qui est une belle équipe de National, indique Régis Vergne, l’entraîneur adjoint trélissacois. C’est un match intéressant pour voir où on est. Ils sont très costauds, espérons qu’ils privilégient davantage le championnat à la Coupe, car l’important pour eux, c’est de se maintenir. Mais c’est vrai qu’on s’est dit : pas de bol ! Après, il y a toujours pire, mais ce n’est pas le meilleur tirage… » « On aurait préféré un gros club de Ligue 2 ou une équipe de division inférieure » , regrette pour sa part le défenseur Jordane Chevalier. Živko Slijepčević, l’entraîneur bosniaque du club, va plus loin : « Je voulais jouer à la maison, moi. On aurait préféré n’importe quelle équipe, même de Ligue 2. On n’a vraiment pas de pot, car on a déjà beaucoup joué à l’extérieur. » Et notamment en Nouvelle-Calédonie, au dernier tour, le 15 novembre dernier, face au club de Magenta, pour une victoire 3 à 0. Le déplacement dans les Pays de la Loire sera à l’évidence moins sexy que celui à Nouméa. Selon Slijepčević, la trentaine d’heures de vol et le décalage horaire étaient d’ailleurs encore dans les jambes de ses joueurs samedi dernier, lors de la défaite en championnat face à la réserve de Lorient (2-1). Une rencontre à laquelle ont assisté des scouts du club de Luçon : « Oui, j’ai vu, rigole Živko, mais moi aussi, je connais chacun de leurs joueurs, du gardien à l’avant-centre. »
Attention aux arbitres de touche
Car oui, les deux clubs se connaissent bien. Et pour comprendre pourquoi, il faut faire un flashback en décembre 2011. Cette année-là, Vendéens et Périgourdins se retrouvaient déjà à ce stade de la compétition. À l’époque, les deux équipes évoluent un étage au-dessous. Au stade Jean de Mouzon de Luçon, les locaux l’emportent au terme d’une partie qui laissera un goût amer aux Trélissacois. Réduits à dix contre onze avant la pause, « avec un carton rouge immérité » selon le gardien remplaçant Eymeric Rucart, les visiteurs craquent au bout du temps additionnel et s’inclinent 1-0 : « La dernière touche était pour nous, pestait Živko dans Sud Ouest, et l’arbitre la donne pour Luçon : ils marquent sur cette action ! En plus, il avait donné trois minutes d’arrêt de jeu, et le but intervient après 94 minutes et 17 secondes exactement ! » Le traquenard parfait. Trois ans après, le Bosniaque se méfie donc : « Je n’ai pas peur de l’adversaire, mais plutôt des arbitres assistants. À chaque fois, entre les joueurs et avec l’arbitre de centre, ça se passe bien, mais les arbitres de touche sont sous la pression du public et ils signalent des choses. J’ai vraiment peur de ça… »
Luçon : la bête noire
Pour motiver ses troupes, le staff devrait donc rafraîchir la mémoire des joueurs et leur causer de cette élimination : « Ce match sera présent dans les têtes de tout le monde » , assure Régis Vergne. Parmi les vaincus de 2011, Jordan Chevalier : « Quand on a vu le tirage au sort, on s’est dit « Encore eux… » On va se servir de cette expérience, car cette défaite nous reste entre les dents. On aura à cœur de se racheter, car la défaite n’était pas forcément méritée, on avait fait un bon match, hélas il y avait eu des faits de jeu défavorables. » « C’est aussi une déception sportive, regrettait à l’époque l’entraîneur périgourdin, car nous avions le monopole du jeu. On a été cohérents, on a eu des possibilités : on pouvait marquer. » « Si on vient à perdre encore, on se dira que c’est vraiment notre bête noire » , lance Jordan Chevalier. En effet, lors de la saison 2012-2013, les deux équipes s’étaient également retrouvées en CFA et avaient ferraillé ensemble pour monter en National. Mais, à la fin, Luçon – encore une fois – gagne les deux confrontations en championnat (0-1, 4-1), finit premier et monte. Trélissac deuxième et se mord les doigts. En trois confrontations, les Périgourdins n’ont donc jamais battu Luçon et s’y rendent ce samedi pour conjurer le sort. C’est peut-être aussi ça la magie de la Coupe.
Par Antoine Beneytou