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On était au tournoi organisé par Manu Koné à Villeneuve-la-Garenne

Par Andrea Chazy, à Villeneuve-la-Garenne
7 minutes

Ce dimanche, l’international espoirs Manu Koné organisait la deuxième édition de sa MK Cup chez lui, à Villeneuve-la-Garenne dans les Hauts-de-Seine. L’un des premiers gros événements post-émeutes à la suite de la mort de Nahel, qui s’est déroulé dans une ambiance bon enfant aux antipodes du tumulte des derniers jours.

Crédits : Yohan Goudeau
Crédits : Yohan Goudeau

N’importe quel dirigeant de club le sait : pour réussir son tournoi de foot de fin d’année en extérieur, peu importent les moyens alloués, il ne faut surtout pas qu’il pleuve. Bonne nouvelle, les premières gouttes de la journée sont de la sueur et perlent sur le front du jeune Marwan. Venu avec ses potes au centre sportif Philippe Cattiau, l’ado s’apprête à se faire couper les cheveux par deux barbers hermétiques au bourdonnement ambiant et aux matchs qui se déroulent à quelques mètres de leurs tondeuses. À deux pas, d’énormes structures gonflables en forme de cible géante ou de quilles ont été prises d’assaut par des enfants et leurs ballons, tandis qu’en face des coiffeurs en herbe, des ingénieurs du son déroulent leurs câbles XLR sur une petite scène qui verra se produire, le soir, des rappeurs plus ou moins connus de Villeneuve-la-Garenne et d’ailleurs. Si la recette « rap-foot-dégradé à blanc » est connue et adopté par tous les jeunes footballeurs ou presque, elle a cette fois une spécificité : elle ne coûte pas un centime aux plusieurs centaines d’ados et adultes, sportifs ou simples spectateurs, qui ont répondu à l’appel de la deuxième édition de la MK Cup.

«  Les coiffeurs sont devenus importants dans le monde du sport, et puis je suis jeune, j’écoute beaucoup de musique et il y en a plein ici qui ne peuvent pas forcément se permettre d’aller voir des rappeurs performer sur scène. Alors pourquoi ne pas mettre tout ça à la disposition de tout le monde ? » interroge Manu Koné, le milieu de terrain de l’équipe de France Espoirs et du Borussia Mönchengladbach, qui se cache derrière les initiales « MK ». Malgré sa blessure au genou droit subie pendant le tournoi en Roumanie, le gamin de Villeneuve-la-Garenne est bien présent. Ce tournoi de foot, ouvert à quatre catégories d’âges allant des U11 aux adultes sans oublier les féminines, Manu Koné le désirait depuis toujours. «Quand j’étais petit, il n’y avait pas tout ça et je me suis toujours dit que je voulais renvoyer l’ascenseur si je devenais pro, détaille dans un ensemble de jogging jaune et noir l’ancien joueur du Toulouse Football Club. William Gallas a grandi ici, mais j’étais trop petit quand il a fait son tournoi. Quand j’étais petit, je m’entraînais ici, ainsi que dans le gymnase à côté des terrains. Ça me rappelle des souvenirs : regarde, là j’ai revu une dame qui s’occupait de moi quand j’étais petit, à l’époque où je me faisais pipi dessus à la crèche. (Rires.) » Pas les mêmes gouttes, certes, mais la pluie n’est toujours pas à l’horizon.

Avec Elye Wahi, Loïc Badé et Rachida Dati

Comme l’an dernier, l’objectif de la MK Cup à destination des administrés de la commune du 92 et des autres gamins des villes alentour est le même : « vendre du rêve aux petits ». Tous les ingrédients d’un tournoi de foot de fin d’année sont là, mais avec d’autres moyens : deux food-trucks restaurent les participants, un écran géant diffuse les moments forts de la saison de Manu Koné en Bundesliga et la sono est gérée par deux « MC » et un DJ, Frankie, pas avare en « pull-up ». « On met le maillot de Florian Neuhaus à gagner pour celui qui bouge le mieux les épaules, s’époumone Souleymane, alors que les premières notes de Disco Maghreb by DJ Snake retentissent. Attention, les mamas vont s’y mettre, ça va se terminer très vite ! » Effectivement, ça bouge bien. Mais au-delà des tuniques à glaner de cette manière via la tombola, ce sont surtout les guests du jour qui sont attendus.

Côté joueurs, Amine Adli, Elye Wahi, Loïc Badé ou encore Bafodé Diakité ont répondu à l’appel. Si certains d’entre eux sont représentés par le même cabinet d’agents, tous sont venus avant tout pour Manu Koné. « Manu, c’est mon gars depuis Toulouse, glisse « Bafo », le latéral droit du LOSC. Quand on était petits, on aurait forcément adoré que des gens fassent ça pour nous. Et puis, j’aime trop ces ambiances décontractées de tournois de fin d’été. Il fait chaud, tout le monde est content, les parents sont là et regardent les matchs… Du fait de notre statut, c’est une ambiance que je regrette un peu par moments. »

« Manu, c’est un symbole »

Sous cette chaleur écrasante où « Black Mamba », « Los Colchoneros » ou encore la « Team Adli » se livrent des duels acharnés, on en oublierait presque qu’une semaine plus tôt, Villeneuve-la-Garenne n’avait pas vraiment la tête au foot. Située à dix minutes de voiture de Nanterre, la ville n’a pas échappé aux affrontements entre jeunes et policiers à la suite de la mort de Nahel. En déambulant dans la foule, tout en échangeant des sourires et en serrant quelques mains de gamins du coin, le maire Pascal Pelain (UDI) le garde à l’esprit : « C’est le premier gros événement depuis les émeutes d’il y a quelques jours, on est la ville la plus jeune du département, on voit qu’aujourd’hui, il n’y a que des ados ou des jeunes adultes, et que ça se passe parfaitement bien. C’est très important que cet événement puisse se tenir avec Manu Koné qui représente l’exemplarité. Manu, c’est un enfant de la ville et c’est un symbole. »

Un symbole qui réunit toutes sortes de personnalités, même celles qu’on n’attend pas forcément au premier abord. À l’image de Rachida Dati. Derrière ses lunettes de soleil, la maire du 7e arrondissement, venue sur invitation et car elle est aussi la « tante d’un ami de Manu », appuie à sa façon l’importance d’un tel événement : « Je suis régulièrement invitée par des associations en banlieue, et à chaque fois dès que je peux, j’y réponds favorablement. C’est important d’être là, et vu le contexte en ce moment, c’est bien aussi d’avoir cette image-là. » Lorsqu’on lui rappelle les mots très durs de certains membres de sa famille politique envers les jeunes de banlieue ces derniers jours – dont elle s’est elle-même un peu désolidarisée –, la réponse est plus directe : « Là, on est loin de l’irresponsabilité parentale et loin de l’habitant de banlieue voyou ou émeutier. On a l’impression qu’à chaque fois que l’on montre quelque chose, c’est une exception. Simplement, il faut aussi que vous fassiez votre travail. Je suis allé à Trappes, à Mantes-la-Jolie, je vois très peu de journalistes quand il y a des animations comme celle-là. »

Du côté des organisateurs et de Manu Koné, la réponse a toujours été la même : ne pas politiser l’événement et accueillir tout le monde. « Je voulais que la ville se répare, que les choses avancent et s’arrangent avant de penser à mon tournoi, glisse l’homme du jour. C’est un peu ingrat de ne penser qu’à son événement lorsqu’il se passe des choses comme ça. Les gens dans la ville sont parvenus à apaiser les tensions, le tournoi peut se produire, et je leur en suis reconnaissant. Peut-être qu’un événement comme ça aide aussi à calmer les choses, ramène de la joie, de la bonne humeur. » Bafodé Diakité abonde : « Notre parole compte, car beaucoup de gens nous suivent et regardent ce que l’on fait. Dès que l’on peut montrer notre soutien, dire ce qu’il y a à dire, on le fait. Après des derniers jours compliqués, ça fait du bien d’avoir des moments comme ça. »

Alors que le soleil se couche, que les matchs se terminent, que le concert se prépare, les regards sont déjà tournés vers une troisième édition l’an prochain. « Aujourd’hui, les joueurs venaient d’un peu partout, à l’image de Gennevilliers, Asnières, Villeneuve… L’essentiel, c’est d’élargir et de faire grossir d’année en année l’événement », confie Hermann, le grand frère de Manu. Un peu à l’image de ce qu’est l’international espoirs de 22 ans, annoncé dans un grand club européen cet été, qui, au moment de saluer en boitant un peu, arrive quand même à botter en touche sur son avenir : « On va se reposer, récupérer, et on va voir ce qui va se passer. »

Au fait, il y a les Bleues qui jouent

Par Andrea Chazy, à Villeneuve-la-Garenne

Crédits photos : Yohan Goudeau

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