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« Celui qu'on a envie de sortir du club, c'est Nasser »
Trois jours après avoir vu leur équipe s'enfoncer encore un peu plus dans le ridicule contre Lorient, les supporters parisiens ont manifesté leur colère mercredi soir devant le siège du club. Avec l'espoir que le PSG redevienne aussi – un peu – à eux.
Le rendez-vous fixé ce mercredi à 18 heures par le Collectif Ultras Paris est dans plus d’une demi-heure, mais ils sont déjà plusieurs dizaines, maillot (Hechter de préférence) sur le dos, à attendre devant la Factory. Ou attablés à la terrasse de l’Initiale Café, qui fait face au siège du Paris Saint-Germain. Entre deux débats pour savoir qui de Marco Verratti, Christophe Galtier, Lionel Messi ou autre est le principal responsable de l’état délétère dans lequel se trouve leur club, les supporters du club de la capitale espèrent surtout se faire entendre. Sur toutes les lèvres un mot revient inlassablement : « ras-le-bol ». Une lassitude vis-à-vis de la direction, de la politique qu’elle mène, de l’indifférence et du manque de respect des joueurs, des prestations indigentes qui se succèdent, encore plus vite que les déceptions sportives. Mais cette colère ne date pas du revers face aux Merlus. Elle remonte en réalité à de longs mois, des années même, devant la direction prise par le projet de QSI.
« Bravo aux Qataris pour le marketing »
Partout chez les quelques centaines de supporters venus se faire entendre, une même inquiétude : se voir déposséder d’un club qu’ils considèrent leur appartenir. « Ils ne nous respectent pas, ils ne respectent pas nos couleurs, regrette Paulo, venu accompagné de deux amis. On ne les a pas attendus pour venir au Parc, nos parents non plus. C’est un plaisir de jouer des matchs de Ligue des champions, d’avoir un statut comme le nôtre, mais d’un autre côté l’équipe perd son âme. Nous, on ne la perdra pas. » Un message repris en chœur par l’ensemble des présents, à l’image de Lenny : « On est parisiens de naissance, mais je m’identifie à qui dans cette équipe ? Kimpembe est bien le seul, mais il ne joue plus. Même le petit Warren Zaïre-Emery, je m’identifie plus à lui, alors qu’il ne joue jamais. » En tout cas, le recrutement de joueurs médiocres venus de Liga, très peu pour lui.
Dans l’identité défendue par les joueurs sur le pré, mais aussi en dehors, tout va mal. « Aujourd’hui notre seule possibilité de parler, c’est ici ou au Camp des Loges, on ne peut plus se payer une place au Parc des Princes. On ne se sent plus respectés par les joueurs, par la direction, se plaint Stéphane, lui aussi venu avec quelques potes. Le PSG aujourd’hui, c’est devenu 100% marketing. Bravo aux Qataris pour ce qu’ils ont fait avec le marketing, c’est une réussite internationale. Mais on nous promet des choses depuis une dizaine d’années et aujourd’hui tout ce qu’on a, ce sont des joueurs qui nous crachent à la gueule comme Lionel Messi. On ne veut plus du tout de lui. »
Le cas de l’Argentin, parti en Arabie saoudite pour une opération promotionnelle sans l’accord du club, fait beaucoup parler. D’autant que pour une fois, la direction a réagi, en suspendant la Pulga pour deux semaines. Enfin le bon exemple ? « Je pense que le club s’est juste rendu compte qu’il serait incapable de le prolonger, donc ils ont voulu sortir la tête haute de ces deux ans qui n’ont rien apporté sur le terrain, imagine plutôt Stéphane. Je pense que contre Lorient, c’était son dernier match, je ne le vois pas rejouer. » Mais qu’il se rassure, le récent champion du monde est loin d’avoir la palme des incriminations au sein du club.
Nasser out !
Non, l’homme qui génère le plus de tension s’appelle désormais Nasser Al-Khelaïfi, devenu président symbole de toutes les dérives imputées au club de la capitale. Avant de prendre la parole devant la foule, les responsables du Collectif Ultras Paris font tourner un communiqué listant tous les maux qui frappent l’institution et appelant QSI à « faire du foot ». Premier à prendre le mégaphone, Romain Mabille, président du CUP, dégaine : « On veut un vrai capitaine à bord du bateau, on veut un président qui soit présent et qui accepte de nous recevoir. Ils nous ont foutu la honte toute l’année, on en a marre des mercenaires. Il y a une histoire derrière ce club. Le Paris Saint-Germain, c’est nous ! » Un premier slogan repris en chœur par la foule, derrière une banderole « PSG qui es-tu ? Où vas-tu ? M’entends-tu ? ». S’en suivent des insultes à l’intention de Neymar, Messi ou même Verratti, loin d’être épargné malgré son statut de joueur le plus ancien du vestiaire rouge et bleu. Un discours achevé par un appel à continuer de « mettre la pression » et « ne pas lâcher les joueurs », dès dimanche pour ceux qui iront à Troyes. Avant un dernier chant, « Ensemble nous sommes invincibles », à grand renfort de fumigènes.
QSI VOUS AVEZ ACHETÉ UN CLUB DE FOOT… FAITES DU FOOT !!! pic.twitter.com/Ec3zt8GRxZ
— Collectif Ultras Paris (@Co_Ultras_Paris) May 3, 2023
« Les insultes ça ne fait pas plaisir, il y a d’autres manières de s’exprimer, mais à un moment donné, le mécontentement s’exprime comme ça. Les mots ont été durs, mais il y a un fond derrière, et c’est ça qu’il faut retenir », débriefe Paulo, qui espère voir son club repartir sur des bases saines cet été. « Je ne m’attends pas à gagner la Ligue des champions la saison prochaine, mais à ce qu’on ait un vrai projet maintenant. Parce que pour l’instant, ça n’en est pas un. » Un nouveau plan porté par de nouvelles têtes ? « Avant, avec Zlatan, Pastore, Thiago Silva, on sentait qu’ils mettaient du cœur sur le terrain », se lamente encore Stéphane. Avant de se projeter : « Je n’incrimine pas forcément Christophe Galtier, même si on voit bien que c’est fini, il a pris dix ans. Luis Campos, je suis partisan de lui laisser ce dernier mercato, si c’est mal fait il dégagera du club. Mais surtout, l’homme qu’on a envie de sortir du club, c’est Nasser Al-Khelaïfi. On nous promet des révolutions tous les ans… Si on peut avoir d’autres investisseurs qui portent un projet qui ne soit pas que marketing, ça ferait un grand bien au club de retrouver une vraie identité. » La question est désormais de savoir si le message sera entendu, et si ce rassemblement pourra faire avancer les choses. « Est-ce que je le pense ? Non, mais si on ne le fait pas, ça ne bougera jamais, répond clairement Paulo. Pour autant, je ne m’attends à rien. » Attention à ne pas être quand même déçu.
Par Tom Binet, à Boulogne
Propos recueillis par TB.
Photos : Tom Binet.