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On était au rassemblement des nostalgiques de la Serie A
Vendredi dernier, un curieux événement a eu lieu du côté de Milan. Les maillots les plus fous ont envahi la cité lombarde, tandis que quelques vieilles gloires sont venues prendre un bain de foule, au bon souvenir de la belle époque de la Serie A.
17h, place San Babila, en plein cœur de Milan et à quelques encablures de la gigantesque cathédrale. Les touristes de plus en plus nombreux depuis l’ouverture de l’EXPO se mêlent aux Milanais et Milanaises tirés à quatre épingles. Autour de la fontaine, un étrange bal de couleurs attire l’attention. Le 10 argentin de Maradona, le 7 de Fuser à Parma, le 10 de Schwoch à Vicenza, le 34 de Diana à la Samp. Ils sont d’abord cinq, puis dix, puis quinze. Chaque nouvel arrivant est accueilli par un tonnerre d’applaudissements, plus le maillot et le nom floqué est méconnu, plus ils sont intenses. Au bout d’une grosse heure, cette bande de joyeux lurons ne peut plus passer inaperçu. D’ailleurs, le rendez-vous était donné à 18h pour une soirée mémorable.
Que la nostalgie soit avec vous !
Affublé d’un maillot de la Salernitana saison 1998-99 floqué Marco Rossi et portant une casquette avec les tresses de Gullit, Andrea Bini annonce sa présence en hurlant dans un mégaphone de l’autre côté du trottoir. Il est l’organisateur de cet événement « Rendez-vous des nostalgiques de la Serie A des années 90 » et admin de la page Facebook éponyme qui a atteint le chiffre de 130 000 fans en même pas un an.
Le message était clair, venez vêtus d’un bon vieux maillot d’époque, de contrefaçon si possible, pour assister à un programme copieux. Ils seront désormais plus de 400, la plupart vient de Milan, mais certains ont fait le voyage comme Barone de Palermo venu de Francfort après 13h de bus et qui repartira le soir même. Curieux, les badauds s’informent. Que se passe-t-il ? On est à Milan et presque aucun ne porte le maillot des glorieux clubs de la ville ? Non, mieux vaut un Spinesi de Castel di Sangro ou un Padovano de la Juventus. Quelques collectionneurs tentent même de négocier les paletots, mais ils perdent leur temps, ces pièces de choix n’ont pas de prix.
Soudain, Le Tissier de Southampton hurle : « C’est lui, c’est Hubner ! » L’ancien buteur de Piacenza et de Brescia est l’un des invités d’honneur. Qui mieux que lui peut représenter l’époque dorée de la Serie A faite de grands champions certes, mais surtout de « gueules » de province. Bedaine de quadragénaire, jeans, chemise bleue et paquet de Malbak’ rouge qui dépasse de la poche, « Darione » est accueilli par des chants en son honneur. Un peu plus loin, côté Corso Vittorio Emanuele II, un arbitre est en train de diriger le concours de jongles entre Igor Protti (ex-buteur de Bari et Livorno) et Massimo Paganin (ancien défenseur de l’Inter).
Le premier arbore un costard blanc démodé… et en parfaite adéquation avec le thème de la soirée. Le second revient tout juste du Congo où il était parti disputer une rencontre de charité avec les vieilles gloires italiennes. Fabian Valtolina, ancien milieu offensif du Venezia de Zamparini, complète ce splendide quatuor. Les yeux pleins d’étoiles, les nostalgiques assistent à ces quelques échanges, puis c’est l’heure de la photo de classe vue du ciel. Un cliché déjà entré dans l’histoire, mais le meilleur reste à venir.
Concours de T-shirts floqués
Rendez-vous en face, au musée Football Heroes, co-organisateur de l’événement, et qui expose les maillots des plus grands champions depuis mai dernier. En son sein peut alors se dérouler un autre concours, celui du meilleur maillot. Un par un, les candidats défilent devant le jury et racontent l’histoire de leur vareuse sous les applaudissements : Chimenti de Lecce, Neqrouz de Bari, Maini du Milan, Dalmat de l’Inter, Bierhoff du Chievo, Kallon de la Reggina ; Francesca a opté pour un Poborsky du Spartak. La crème de la crème ! On croise même un Pauleta du PSG et un Juninho de l’OL. Protti, à la vue de certains noms comme Sottil du Genoa et Colonnese de Siena, s’exclame : « Alors eux, ils cognaient ! À l’époque, tu étais obligé de montrer la radio de ta fracture à l’arbitre pour qu’ils les avertissent ! » Pas de place pour les rivalités lourdingues, chaque nostalgique est félicité tandis que les quatre vieilles gloires ne cessent de s’ébahir devant des noms de plus en plus inattendus.
Le jury a statué, le quinté vainqueur en ordre croissant est le suivant : Di Vaio de la Salernitana, Protti du Napoli, Cozza de la Reggina, un maillot de l’Alzano Virescit et Hubner de Brescia. Les médailles pour les dauphins, la coupe pour le lauréat venu d’Hambourg. Exténué, Andrea savoure quand même : « Je n’arrive pas à réaliser, c’est quelque chose d’extraordinaire. On a rendu hommage à des champions qu’on ne fait plus, humbles et simples. J’espère que ce n’est que le premier rendez-vous. » Plus loin, Hubner tente d’expliquer cette incroyable popularité : « Peut-être parce que j’étais attaquant, et que j’ai fait gagner beaucoup de matchs au Fantacalcio. » Puis il quitte le musée, s’exécute pour un dernier selfie, enfile son sac à dos sur l’épaule gauche, et s’engouffre dans la bouche de métro. Vivement la prochaine édition.
Par Valentin Pauluzzi, affublé d'un maillot de Vicenza « Schwoch »