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On était à Sarcelles pour la cérémonie en l’honneur de Riyad Mahrez
Vendredi après-midi, la mairie de Sarcelles (95) a organisé une cérémonie en l’honneur de l’enfant-héros Riyad Mahrez. L’international algérien vainqueur de la CAN, entouré de ses proches et de quelques officiels, s’est vu remettre la médaille d’honneur de sa ville de naissance. Très loin de la folie algérienne, entraperçue ces dernières semaines en France.
« Je suis effaré d’être le seul supporter. » Mohamed, fan algérien de 24 ans, est effectivement l’unique « non-invité » à pouvoir assister à la cérémonie d’honneur pour Riyad Mahrez à Sarcelles ce vendredi après-midi. Aucun drapeau algérien en vue, aucune communication au grand public et surtout aucune véritable effusion au moment où le capitaine des Fennecs débarque devant la salle de réception de l’hôtel de ville. Des flashs de photographes et quelques claquements de bises, tout au plus. Des proches, des éducateurs, des élus et des médias : voilà le parterre d’une quarantaine de personnes qui l’accueille, aux alentours de 16h15.
Besoin de calme
Une cérémonie souhaitée par le maire Patrick Haddad – suiveur du ballon rond –, mais qui se déroule, sur demande du joueur, un peu en catimini. L’environnement est loin des scènes de liesse observées un peu partout en France et en Algérie, au moment où les Verts ont soulevé la Coupe d’Afrique des nations 2019. Comme pour permettre à Mahrez de retrouver un peu de quiétude, de calme après avoir passé un mois éreintant. Sur le plan physique, d’abord. Et au niveau médiatique, aussi. Une réaction humaine, en somme.
Mais alors, comment le malin Mohamed s’est-il retrouvé dans cette réception privée ? « En suivant les réseaux sociaux, j’ai su qu’il y avait une remise. Tout simplement. Je n’avais juste pas l’heure, donc je suis là depuis 13 heures, explique celui qui vient du Plessis-Belleville (60). J’ai vu les images de la remise de la médaille pour Ismaël Bennacer à Arles, et c’était la folie. Alors là, pour Mahrez à Sarcelles, je me suis dit que ça allait être X10 ! (Rires.)Mais il n’y a pas d’autre concurrent, tant mieux pour moi ! » Autant dire que la chasse à l’autographe et au selfie, les deux objectifs avoués du jeune garçon, ne seront pas tâche ardue.
Disponibilité et discrétion
Bien que l’ambiance soit très officielle, le natif de Sarcelles fait parfaitement le job. Entouré de ses amis de toujours avec qui il a grandi dans la cité des Sablons, le discret Mahrez signe des maillots algériens, quelques cartes collectors et pose pour des photos-souvenirs. Un de ses amis de longue date, Mamadou, raconte sa fierté de voir son pote célébré par leur ville d’enfance. « Je trouve que c’est une belle cérémonie ! Mais ça aurait été tout aussi bien de la faire dans un stade avec du monde, comme on a pu le voir pour les joueurs français avec la Coupe du monde ou d’autres Algériens » , affirme celui qui est vêtu d’un maillot de Manchester City, floqué du nom de la star du jour.
Mais comme le confie le collaborateur du maire, Malek Scalbert, la cérémonie sera « express » . À l’image du joueur, surtout. La star des Fennecs débarque habillé sobrement et apparaît devant tout le monde juste pour quelques sourires, mains serrées et un petit discours. En effet, tandis que le représentant de la commune du Val-d’Oise refait élogieusement le parcours de l’ancien Havrais – rappelant que « son nom résonne outre-Manche, de l’autre côté de la Méditerranée, dans toute la France, et encore plus à Sarcelles » –, le numéro sept des Fennecs ne se contente que de deux courtes phrases : « C’est quelque chose de très cher pour moi. C’est une grande fierté, merci à tous. »
Leadership masqué
Ces quelques mots, prononcés par Riyad Mahrez, suffisent à clore la première partie de la cérémonie. À se demander si le Mancunien est vraiment le capitaine de l’équipe vainqueur d’une grande compétition internationale. C’est que le Sarcellois n’a pas forcément l’image, ou le physique du leader charismatique que les fans de football ont l’habitude de voir. Une façade, selon Samir. « C’est vrai que Riyad est très discret, et introverti. Vous voyez bien qu’il n’est pas une personne très démonstrative, devant les médias. Mais en huis clos, c’est quelqu’un qui va beaucoup te parler, te conseiller » , confie, lors du verre de l’amitié, celui qui a joué en U15 avec Mahrez à l’AAS Sarcelles. Une attitude confirmée par le joueur lui-même : « Le brassard est juste un bout de tissu, être un leader va au-delà du brassard. J’aurais été dans tous les cas un leader : je suis un peu plus vieux, je joue dans un grand club et je peux apporter une certaine rigueur qu’ils n’ont pas. »
Mais si ce bout de tissu lui est arrivé autour du bras, c’est parce que l’homme aux crochets dévastateurs fait l’unanimité sur le terrain. « Tout ce qui lui arrive, il le mérite. Il ne l’a pas volé, il a travaillé pour avoir tout ça » , souligne Samir. Oui, le parcours de Riyad Mahrez est semé d’embûches. Notamment à cause de son physique. Une difficulté qu’il a su surmonter à la force de sa sueur selon Boubacar Coulibaly, président du club de Sarcelles. « Je l’ai connu quand il avait dix, onze ans. On voyait qu’il était fort, mais il ne jouait pas du tout en équipe première jusqu’en U15. Il a su compenser avec le travail, la technique et la tactique. Ce n’est pas étonnant qu’il arrive à travailler sous les ordres de Pep Guardiola, mais physiquement, c’était un vrai problème pour lui. Le championnat anglais l’a endurci, c’est un joueur complet aujourd’hui. » Le leadership, l’Algérien l’a gagné sur le terrain et c’est uniquement dans ce cadre qu’il l’exprimera. En dehors de tout cela, Riyad Mahrez n’est qu’un jeune Sarcellois. Qui a seulement besoin de sa famille, de ses copains et d’un ballon pour être heureux.
Par Arthur Stroebele et Claude-Alain Renaud
Tous propos recueillis par AS et CAR
Photographies par AS