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On était à l’expo Co-Workers avec Djibril Cissé

Par Nicolas Taiana
8 minutes
On était à l’expo Co-Workers avec Djibril Cissé

Jeudi, le musée d'Art moderne de Paris lançait son exposition Co-Workers pour discuter réseau entre amis. Sans petits fours mais avec pas mal de Djibril Cissé, un peu de Marcel Duchamp, et un semblant d'Andy Warhol et de Mao Zedong. Rien que ça. Récit de la ruée vers l'art du Djib'.

Entre Alma-Marceau et Iéna, les bouchons garnissent l’avenue du Président-Wilson dans le 16e arrondissement de Paris. Le soleil se tasse, les parapluies débauchent et les berlines noires rythment le son du Sud-Ouest de la capitale. Il est bientôt 18h, et le musée d’Art moderne a le monde à ses pieds. Du moins, une file assez imposante et bariolée pour qu’elle s’aperçoive du boulevard. Des blousons longs jusqu’aux chevilles, avec option blouse bleue de chimiste, des bombers rouge flashy, des coupes au bol, des cheveux peroxydés, des ourlets à perte de vue, qui s’accordent parfois avec des paires d’Asics, mais plus souvent avec un style à la Dr. Martens, et des combos costard-moustache. En somme, un mix entre Las Vegas Parano, Trainspotting et Human Traffic, pour un petit bout des nineties façon perfide Albion. Une bonne partie du Tout-Paris est là. Celle qui se plaît en vernissages hauts en couleur. Et celle, aussi, qui s’occupe du vestiaire, où une dame sympathique vient d’apprendre que Djibril Cissé sera de la partie. « Il est au PSG lui maintenant ? En tout cas, je vais essayer d’avoir un autographe pour mon fils ! » Normal. Au rez-de-chaussée, l’expo Warhol Unlimited, « unique en son genre » selon le sous-directeur maison Philippe Crepin, n’a vraiment pas de limite. Entre les vidéos reproduisant les mêmes images en noir et blanc et les traditionnelles répétitions de portraits sous plusieurs gammes, avec un Mao presque souriant à l’honneur, les « Oooôh » et les « Aaaaâh » se perdent dans les salles immenses du MAM. Mais, l’attraction n’est pas là. Elle se trouve à l’étage, où l’exposition Co-Workers – Le réseau comme artiste est la reine de la soirée. Le concept est d’inspiration new-yorkaise : faire venir des artistes nés dans les années 80, formés en 2000, qui bossent en réseau, par et pour le réseau. Ça promet.

« On a voulu parasiter les droits télé de beIN Sports »

Une télé 15 pouces et une métisse aux lèvres pulpeuses, face caméra. Seule, elle déblatère, mange grassement et joue la Youtubeuse. Quelques marches plus loin, une jeune femme dit bonjour, à l’envers, la tête entre ses jambes. Le mur d’en face souhaite aussi la bienvenue. « Félicitations ! Vous êtes le 1000e visiteur de ce site ! Merci. » Devant la scène, des toiles sous verre cohabitent avec des nappes arc-en-ciel trempées dans une sorte de javel, dont l’une s’étend au mur, et sont scrutées par des sosies de King Krule. Version féminine comprise. Comme quoi, tout moment est bon à prendre pour faire le ménage. « Les machines parlent de plus en plus souvent entre elles dans votre dos. Faites une pause et respirez profondément. Maintenant, appuyez sur la touche dièse. Faites semblant d’être mort. Effacez tout. » Ici, les murs portent conseil. Mais difficile de faire semblant. Parmi toutes ces fresques du futur, un pan de mur entier est réservé au Djib’. Au centre, une photo de son dernier match à Bastia. Son numéro 9, son nom et l’étoile sur l’arrière de son crâne, sont illuminés par des néons blancs. Noël n’est jamais bien loin. Sur un large fond bleu, l’œuvre débute par une autre photo, celle de Marcel Duchamp, prise chez le coiffeur par Man Ray en 1919 et qui est également exposée au MAM. Pour faire face à une épidémie de poux en Argentine, l’artiste de référence du XXe décide de se raser le crâne, mais d’abord de se faire dessiner… une étoile. « On travaille beaucoup sur la circulation des images dans le temps et dans l’espace. On a cherché à transposer la photo de Duchamp sur un joueur de foot pour infiltrer la culture populaire. Les coupes des footballeurs, comme les nuques longues, ça en fait vraiment partie, explique l’un des membres du Nøne Futbol Club, auteur du pied de nez. Notre choix s’est porté sur Djibril qui a tout de suite accepté de se faire couper les cheveux pour reproduire la scène. Mais il a aussi participé à l’œuvre. Il a voulu le faire à sa sauce, en gardant son iroquois. C’est un peu son identité. »

Djib’ prend donc la pose, à côté d’une affiche qui vente ses « marrons chauds et raffinés » . Une gastronomie intense et un goût pour la mode qui collent parfaitement au personnage. « Cette infiltration, c’est comme un collage. Du coup, l’étoile filante est en mouvement. C’est comme s’il avait joué le match avec la photo. Le foot, c’est les jeux du cirque. Par là, on a voulu parasiter la culture de masse et les droits télé de beIN Sports. » Elle est peut-être là, la relève du hacking. Sur les flancs, une autre télé diffuse des bribes du jubilé corse de Cissé, où son coup de casque finit dans les tribunes, et de son passage chez le coiffeur, où Djib’ se veut perfectionniste : « Je la veux bien droite. » Toujours. Un montage-photo remplace sa tête par celle de Duchamp en plein match et est reproduit sur des tee-shirts exposés sur des cintres. « L’idée était aussi de reproduire l’ambiance d’un magasin Nike, continuent les électrons libres du NFC. Un peu à la manière d’Andy Warhol qui multipliait les placements de produits. » Derrière, dans un espace parfumé, des serviettes sèchent au mur, et des sacs à l’effigie de la marque américaine, suspendus à des grandes colonnes blanches, sont remplis de bouteilles d’eau. Productions de deux artistes différents. Du grand art. « Quand tu portes un sac Nike, tu ne te rends pas compte de tout ce que t’as dedans. » Tandis que ce jeune fou donne son idée du vestiaire, un gamin allemand tape un selfie devant l’œuvre, cravate sur chemise à carreaux et bonnet vert fluo vissé sur la tête. En face, la tonsure 2.0 du Nøne partage l’espace avec le travail complètement barré de Ryan Trecartin. Huit télés, cinq ou six acteurs à demi-nus, sapés pour le carnaval ou le visage peint, pour dix millions de scènes qui s’enchaînent et parodient la télé-réalité. « Tu as enculé mon style de vie ! » , lance une teen en mini-short un peu grossière. À côté, deux sexagénaires discutent déclaration de décès. Plus loin, les diapos offrent des minuscules formes 3D, des visages sans yeux, des ours polaires, puis des raisins en gros plan, écrasés à la force des doigts. Puis, des ours, encore. Et des raisins écrasés, encore. « Les mecs sont un peu perturbés, quand même. » Visiblement, certains restent cois devant cet art moderne. Enfin, des humains de tout âge, installés sur des poufs ornant une rampe de skateboard, assistent à la météo d’un homme cagoulé, portant un tee-shirt hibou. « Vous pourriez être fous. » Peut-être. Mais toujours pas de Djib’.

« Je me suis juste assis sur un fauteuil de coiffeur »

Sans bruit, sans mouvement de foule, Cissé vient seul, avec une petite demi-heure de retard. Il découvre l’œuvre dont il est le joyau, mains sur les hanches. « Vous êtes frais les gars ! » Le graal pour le Nøne FC. K-way noir jusqu’aux cuisses et grosses lunettes noires, Mr Lenoir a fait du Mr Lenoir. Comme un gosse aux étrennes, il observe chaque recoin de son cadeau, le décortique et le prend inlassablement en photo et en vidéos avec son portable. Un vrai rendez-vous en terre inconnue pour lui. « Franchement, je m’attendais pas à ça. Je pensais qu’il allait y avoir une petite photo, pas tout un mur, s’étonne le Djib’. En plus, on m’a dit que le musée d’Art moderne, c’est pas pour tout le monde. C’est vraiment fort. L’idée m’a chauffée de suite. Je leur ai dit : « Vous avez bien choisi le gars à qui proposer. » » Photos, vidéos, coups de fil. Cissé n’en revient pas, accoudé à la description de l’objet, qu’une femme lit sans se préoccuper de sa présence. « C’est un truc de ouf, je te jure ! Ils ont peint le mur et tout ! Si si, c’est comme au stade ! » Puis, c’est le moment de l’autographe. Djib’ signe un des tee-shirts exposés pour « terminer l’œuvre » . La boucle est bouclée, le festival des félicitations et des photos peut commencer. Ou presque. « La dame, là-bas, elle me regarde, comme ça, je crois qu’elle a compris. » Alors qu’il pose avec ses nouveaux fans, et que la photographe s’excuse du « contre-jour » , un couple en chemise de soie, rentrée dans le pantalon – rose (pour lui) et bleu (pour elle) -, marque l’arrêt. « Je n’ai toujours pas l’éclairage sur cette œuvre… » Le début d’une mauvaise blague. Djibril, lui, a tout compris et se prend à rêver pour la suite, après un exil réunionnais compliqué et une opération probable de la hanche en janvier. « Mon actu, c’est Danse avec les Stars. Mais là, ça me fait mettre un pied dans l’art, c’est bien. Je peins pas, je dessine pas, mais j’aimerais bien bosser avec quelqu’un qui fait de la photo. Aujourd’hui, il faut surtout féliciter les artistes. Moi, je me suis juste assis sur un fauteuil de coiffeur, basta. » Et Bastia même, où, selon lui, il aurait pu accrocher le bon wagon pour le Mondial brésilien. « Sincèrement, physiquement et mentalement, j’étais bien. Je pense que j’aurais pu en être. Mais bon, on ne sait jamais hein… » Vrai. On peut toujours finir avec une pipe et des poux.

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Lucas, Digne de confiance
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