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- Avant-première de N.O.L.A Circus
On était à l’avant-première de N.O.L.A Circus
Bacary Sagna, Louis Saha, Michaël Ciani, Johan Djourou : voilà les footeux qui ont produit le long métrage N.O.L.A Circus en compagnie d'autres sportifs, avec qui ils forment les Illicit Producers. Hier soir, on a eu droit à une avant-première, en projection privée s'il vous plaît. Et les anecdotes qu'on y a entendues sont aussi poilantes que le film.
Partir de Louis Vuitton Champs-Élysées, le dos tourné à la tour Eiffel. Une fois esquivé le groupe de touristes chinois, tourner à droite pour emprunter une rue diagonale, puis descendre le trottoir, sur deux blocs. Obliquer à gauche au niveau du Café Kousmichoff, puis s’arrêter en face pour acheter des macarons Ladurée. Repartir, cheminer sur quelques mètres avant de stopper devant le Club Lincoln, dans la rue du même nom. « Vous êtes les gars de So Foot ? La salle de projection est en bas. » Le rendez-vous prévu à 20h, on est arrivé un peu en avance. Les voitures alignées dans la cour intérieure de la résidence sont de belle facture, conformes au standing attendu d’un immeuble campé à équidistance de l’Arc de Triomphe et de l’hôtel Matignon. De l’autre côté d’un tapis bleu foncé, un escalier en colimaçon tournicote en direction d’un salon de réception supposé accueillir les sportifs de la soirée. L’endroit est vide. Arnaud Bettan, producteur du film, ironise : « Johan Djourou devait être là, mais sa femme a eu des contractions hier. Bizarrement, il a préféré rester avec elle pour l’accouchement ! Mais Nicolas Batum devrait passer, normalement. Enfin, il y a une chance sur deux avec lui. » Le Batman ne se montrera finalement jamais, « il a dû se perdre » . Le réalisateur Luc Annest, lui, est en retard, « il répare sa moto sur la route » . La petite salle de 40 places se remplit doucement. Deux hommes taillent le bout de gras, lovés dans les fauteuils du milieu : « Le week-end dernier, j’étais à Grigny pour un match entre des U19 et des U17, il y avait deux nanas super bonnes ! »
« Détendez-vous le gilet, on va boire un coup après ! »
L’un des deux, jean et pull bleu, est un vieux de la vieille. « Je suis un ami de Luc Annest, il me parle de ce projet depuis… cinq ans au moins ! Ce qui est fantastique, c’est que des sportifs se sont vraiment pris au jeu, au-delà de leur investissement de départ, parce qu’ils sont vraiment fans de films. (…) Il faut être honnête, Luc savait où trouver du blé, il est allé le chercher et il a eu raison… » Vrai. Les joueurs ont mis entre 100 et 300 000 balles chacun pour atteindre 1,5 million d’euros, soit la moitié du budget total. Entre deux discussions sur l’avenir du Red Star, une femme soupire dans notre dos : « Putain, j’étais sûr qu’il n’y aurait personne. » Force est de constater que les guests manquent à la liste. Les footeux en particulier : Djourou occupé avec sa nana donc, Saha à un festoch, Sagna à Clairefontaine pour le match de la France contre la Belgique dimanche soir, et Ciani fait de la musique ou un truc du genre. Chacun son mot d’excuse. 20h15, la salle est pleine, les fauteuils sont larges, assez espacés pour étendre les jambes des journalistes et cinéastes présents. La projection débute par un court discours de l’enjoué réalisateur français, soucieux de prendre soin de ses invités, amis pour la plupart : « Bon, des fois, c’est chiant, ce genre de projections, alors détendez-vous le gilet, on va boire un coup après ! » Et c’est parti pour une heure trente d’un film rock’n’roll complètement allumé, façon Arnaques, crimes et botanique. On attendait de voir jouer Gérard Darmon, on a vu Erikah Badu et Vas Blackwood. En deux mots, le film raconte l’histoire de personnages vivant dans un quartier noir du Mississipi, où s’entremêlent racisme, sexe, drogue et règlements de compte. Le tout dans une ambiance assez comique. Pas de dodo ou de bâillement chez les spectateurs, mais des rires nourris lors de scènes assez marrantes, qui mettent en scène une conversation entre deux bègues par exemple, ou des membres du Ku Klux Klan s’engueuler avec des voix transformées par l’hélium. Bref, rien à voir avec le sport.
Alex Song, Squillaci ou Hoarau auraient pu en être
Les lumières se rallument, les applaudissements retentissent, les gens quittent la salle tranquillement. Certains restent un peu et rigolent en se remémorant les scènes avant de lever leurs fesses. Direction la pièce de réception, où attendent sagement Sobieski, Whisky Grant et Saint-James. Sans oublier le coca, évidemment. Entre les félicitations classiques adressées au réalisateur et les cinéphiles qui évoquent un « film spécial » , Arnaud Bettan offre des T-shirts et collecte les avis. « En France, il n’y a clairement aucun marché pour N.O.L.A Circus pour le moment. Il faut que le film fasse son tour aux États-Unis, récolte quelques prix et c’est comme cela que vous pourrez revenir » , guide un distributeur en sifflant son verre de rosé. « Au début, ça part dans tous les sens ! Mais j’aime beaucoup la suite, le film est bien, il reste un peu de travail dans l’étalonnage » , glisse Jessica Morali, l’actrice principale, visiblement satisfaite. On commence alors à parler sport avec producteur et réalisateur. On apprend que la liste des footballeurs qui composent les Illicits Producers aurait pu être bien plus longue : Alex Song, Sébastien Squillaci, Alou Diarra ou Guillaume Hoarau ont failli être de la partie. Certains réfléchissent encore à rejoindre le groupe. En même temps, les gars ont l’air de bien se marrer. Il suffit de regarder leurs prestations dans les trailers décalés censés faire de la pub pour le film, où ils arborent tous une magnifique perruque. « Dans le clip, t’as l’impression que Bacary danse bien. Alors qu’il est totalement nul ! Je lui ai dit : « C’est qui le black, c’est qui qui a le rythme dans la peau ? Mets un peu de groove ! » » , rigole Luc. La vidéo de Sagna, diffusée sur beIN Sport et Téléfoot, a fait fureur. « Tous ses potes l’ont appelé, il était comme un gosse ! »
Un nouveau gros poisson en vue
Du coup, on a voulu avoir le témoignage d’un des principaux concernés. Vu que Ciani n’est pas venu, autant l’appeler vite fait pour vérifier son alibi et, effectivement, un bruit de fond ressemblant à une guitare couvre en partie sa voix : « J’adore faire l’acteur ! Les petits trailers, c’était bien cool. » Le joueur, qui quitte la Lazio et qui ne se voit « ni en Italie ni en France » , avoue être un amoureux du cinéma. Ses films références : les Parrains et L’Enfer du dimanche. Et en dit plus sur ses motivations pour le projet Illicit Producers : « J’ai envie de me faire une petite place dans le monde cinématographique. J’ai mis de l’argent pour N.O.L.A Circus, mais c’est un vrai investissement financier, histoire de pouvoir lancer d’autres projets par la suite. Et puis, il y a le côté caritatif qui entre aussi en compte. » Parce 5 % des recettes du film sont versés à des associations pour l’enfance. Téléphone raccrochée, la discussion avec Arnaud et Luc reprend sur le trottoir de la rue Lincoln. « Louis Saha, un des plus investis, était littéralement explosé devant le film au festival de Cannes, c’est un fan absolu ! » Le festival, où N.O.L.A Circus a été diffusée en projection privée, a été l’occasion de monter les marches pour l’ancien Mancunien. Et Boris Diaw, également membre des Illicit Producers, en a profité pour faire un petit selfie avec Benicio Del Toro. Avant d’enfourcher son scooter, Luc, casque au bras, serre les dernières mains et balance une ultime petite info : son ambition de recruter du gros poisson pour le projet. Style Didier Drogba. Et aussi de réaliser une petite série, genre « Les footballeurs font leur cinéma » . Drogba, acteur avec une perruque, ça peut être drôle.
Par Théo Denmat et Florian Cadu, au Club Lincoln