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On était à la cérémonie des trophées UNFP

Par Maxime Brigand et Alexandre Doskov, à la cérémonie des trophées UNFP
On était à la cérémonie des trophées UNFP

Lundi soir, l’UNFP organisait sa petite sauterie annuelle au pavillon d’Armenonville, dans le cadre champêtre du bois de Boulogne. Une cérémonie tamponnée par l’ennui, une veste napoléonienne et une visio-conférence depuis Monaco pour récompenser les vraies stars de la soirée.

Cette fois encore, tout se passe comme prévu. Sur les hauteurs du pavillon d’Armenonville, il règne une ambiance digne d’un stand de poissonnerie au marché de Rungis. À la différence près que les clients sont costumés et que le commercial – lui aussi monté sur deux pièces – est serré par un service d’ordre qui refuse de lâcher son chronomètre. Le soleil de mai commence à se coucher, il est un peu moins de 21 heures. Derrière la balustrade médiatique, Thiago Silva débarque. Quelques minutes plus tôt, le capitaine du PSG était sur les planches et profite maintenant de son temps de parole pour féliciter Edinson Cavani, élu sur scène meilleur joueur de la saison devant Alexandre Lacazette, Marco Verratti et Bernardo Silva. Le Brésilien a les traits tirés, sans aucun doute saoulé de répondre chaque fois aux mêmes questions, devant les mêmes visages, et quittera la zone mixte au bout d’une dizaine de minutes en glissant qu’il « refuse de parler de son avenir » . C’est aussi le moment pour lui de s’incliner devant l’AS Monaco, qui devrait officialiser son premier titre de champion de France depuis 2000 lors de la réception de Saint-Étienne mercredi. « C’est nous qui avons perdu le championnat. Mais ils ont fait une bonne saison, c’est pour ça que je les ai félicités. » Le voilà reparti. Direction le tapis rouge où quelques supporters parisiens l’attendent pour gratter quelques selfies. Dans la salle où la presse a été parquée – soit une pièce sans bulle, où l’on regarde la cérémonie à travers un écran et où l’on n’a pas grand-chose à faire si ce n’est découvrir un balcon qui offre un angle de vue où seul Sébastien Valiela se serait senti dans son élément –, les images continuent de défiler. Alexandre Ruiz, DJ de la soirée pour beIN, a laissé sa place à Florian Genton, mais quelques plans qui se répètent en boucle laissent apparaître le geste technique de la soirée : Benjamin Nivet arrête Thiago Silva, lui sourit et se recule pour armer son selfie. Il aura donc fallu attendre que le rideau se baisse pour voir le vrai visage de la légende. Comment lui en vouloir ?

Le tapis rouge, seul lieu de spontanéité

Et pourtant. Quelques heures plus tôt, au moment où arrivaient les premiers invités, la fête promettait d’être belle. À l’étage, les journalistes commençaient à se morfondre en comprenant qu’ils avaient été piégés, condamnés à passer la soirée devant un écran plat à cinquante dans une pièce et en trinquant à la Vittel. L’homme de BFM TV, follement ambitieux, voulait simplement enjamber une barrière de la terrasse pour faire son duplex depuis un angle sympathique, et a dû négocier vingt minutes avec trois responsables de la sécu pour obtenir l’autorisation. Tout ça alors qu’au rez-de-chaussée, la grande et belle famille du football se retrouvait autour d’une coupe de champagne et transformait les lieux en un festival de Cannes avec encore plus de bon goût. Le peuple était également convié, mais relégué derrière une barrière sur le tapis rouge qui menait de la rue au pavillon. Pas de quoi décourager les trente fans qui avaient coché la date dans leur calendrier, et qui ont eu le mérite d’offrir un peu de spontanéité à la soirée en manifestant plus ou moins bruyamment à l’arrivée des vedettes. Et vingt-cinq mètres de tapis rouge, ça peut être très rapide si personne ne vous interpelle parce qu’on ne sait pas qui vous êtes, mais aussi très long. Et si Cavani et Thiago Silva ont eu la gentillesse de s’arrêter toutes les trois secondes pour un selfie, ils ont aussi pu entendre les « Ho, le 6-1 à Barcelone, fais pas le malin ! » qu’on leur lançait. Le seul moment où les joueurs verraient des gens qui ne sont pas là pour leur lustrer les rétroviseurs. Car après avoir franchi la porte férocement gardée par Anne-Laure Bonnet, Cerbère plantée sur des talons de vingt centimètres, tout n’était qu’amour.

La campagne électorale des gars d’Angers

Juste avant de pénétrer dans l’immense salle où avait lieu la cérémonie, tout ce petit monde était invité à patienter dans une autre salle au moins aussi grande qui donnait sur un jardin dans laquelle les maîtres d’hôtel assuraient le service des boissons et des petits fours. Entre le concours de costumes très largement remporté par un Memphis Depay impeccable en tenue de Monsieur Loyal du cirque Pinder, et le coin des vieux briscards dans lequel Luis Fernandez descendait un cigare XXL et où Thierry Laurey évoquait ses souvenirs cyclistes, le football français brillait de mille feux. Joueurs, stars de la télé, entraîneurs, anciennes gloires qui n’ont plus beaucoup d’activité donc beaucoup de temps libre, tout le monde se mélangeait en oubliant le temps d’un instant les malheurs de ce monde. Seuls quelques intrus étaient venus sans leur insouciance, à l’image de Pierrick Capelle et des quelques autres joueurs du SCO qui étaient là en tant que délégués UNFP de leur club. « C’est important pour nous d’être là » , embraye Capelle, tandis que Vincent Manceau acquiesce de la tête : « On vient représenter le club auprès de l’UNFP, on bosse avec eux toute l’année. » Presque une campagne électorale, en somme. Baptiste Reynet, lui, est loin de tout ça et pianote sur son téléphone en attendant de savoir s’il remportera le trophée du meilleur gardien de Ligue 1, très à l’aise en nœud papillon : « Je connais pas encore le résultat des votes. Mais si je gagne, je n’ai pas préparé de discours, je ferai au talent ! J’essaierai quand même de caser quelques trucs drôles. »

Des lions en cage

Puis, il y a donc eu cette cérémonie. Un moment où les intrus se font gentiment exclure vers le premier étage. En même temps, c’était le second avertissement et un mec en polo, ça peut faire tache. Ruddy Buquet a réussi son coup et en sera récompensé quelques minutes plus tard sous le titre de meilleur sifflet de la saison. Retour dans la salle de jeux. Au rez-de-chaussée, Alexandre Ruiz a déjà pris les platines. Baptiste Reynet voulait des trucs drôles, le voilà servi. C’était justement la mission des humoristes sélectionnés pour remettre les prix. Bingo : Ahmed Sylla glisse sur une imitation ratée de Didier Deschamps – qui arrive même à gêner Kylian Mbappé en duplex de Monaco pour recevoir son titre de meilleur jeune de la saison – alors qu’Alban Ivanov décide de jouer le tout pour le tout sur les vannes lourdes. Peu importe, public et journalistes n’étaient pas là. Pour eux, ce sera les miettes. Et comme des lions qu’on avait affamés avant de les lâcher dans le Colisée contre des gladiateurs, les médias, assommés par la longue soirée passée dans leur cage, étaient prêts à se jeter comme des bêtes sur les lauréats qui avaient apporté leur plus belle langue de bois. Avec au menu, les caméras de Yann Barthès, des questions hurlées au milieu de la meute, des « Edinson, que représente ce trophée pour toi ? » sans intérêt, des « Lacazette, est-ce que tu seras encore à Lyon la saison prochaine ? » auxquels tout le monde sait qu’il ne répondra pas ou même la palme pour un « Thiago, est-ce que tu comprends quand ton entraîneur te parle en français ? » Et au milieu de tout ça, personne pour poser la seule vraie question importante de la soirée : « M. Silva, savez-vous qui est ce bonhomme chauve qui vous a demandé un selfie tout à l’heure ? Avez-vous de l’admiration pour la carrière de Benjamin Nivet ? » Trop tard, le bal était déjà terminé.

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Par Maxime Brigand et Alexandre Doskov, à la cérémonie des trophées UNFP

Tous propos recueillis par MB et AD

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