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On a visité le musée du football allemand à Dortmund

Par Ali Farhat et Sophie Serbini, à Dortmund
On a visité le musée du football allemand à Dortmund

Inauguré il y a seulement quelques semaines dans la plus grande discrétion, scandale autour de l’attribution du Mondial 2006 oblige, le Deutsches Fußballmuseum se veut l'un des premiers musées consacrés au football hors les murs d'un stade. Avec ses 3700 m2 d'exposition, le musée balaye plus de 100 ans d'histoire du ballon rond en Allemagne avec une certaine réussite.

Le timing aurait clairement pu être meilleur. En ouvrant ses portes au public le 25 octobre dernier (soit neuf jours après les révélations du Spiegel sur la possibilité d’une caisse noire ayant permis à l’Allemagne d’obtenir le Mondial en 2006), le Deutsches Fußballmuseum n’a pas eu le droit à la meilleure des publicités. L’inauguration, qui s’est déroulée en catimini, n’a pas vraiment attiré les foules, puisque seules 1500 personnes se sont pressées pour admirer l’exposition permanente dès le premier jour. L’ouverture de ce musée se voulait l’aboutissement d’un projet vieux de dix ans, né (justement) après le succès de la Coupe du monde en Allemagne, le « Sommermärchen » de 2006 – une partie des recettes du Mondial (7,9 millions d’euros) ayant servi à la construction du bâtiment. Mais, par les temps qui courent, la population se montre méfiante envers tout ce qui touche à la DFB et le musée en est malheureusement une des premières victimes collatérales. Malheureusement, car ce nouvel espace gigantesque résume à merveille, grâce à une multitude d’objets d’époque, de vidéos et de témoignages, l’histoire du football à l’allemande.

Dortmund, l’heureuse élue

Avec sa façade pseudo-futuriste, le bâtiment principal, posé en face de la gare centrale de Dortmund, ressemble à s’y méprendre à un flagship store Adidas. Béton armé, façade en verre, sol aux couleurs neutres, tous les codes de l’architecture des grands magasins actuels sont réunis dans une seule et même structure. Si l’on excepte le logo sur le côté du bâtiment et l’écran LED au-dessus de l’entrée, rien ne permet réellement de distinguer l’édifice des autres actuellement en construction dans un centre-ville de Dortmund en profonde mutation. De fait, le musée s’incorpore très facilement à la nouvelle physionomie de ce qui est maintenant la ville la plus peuplée de la Ruhr. Choisie en 2009 comme ville-hôte du futur musée, Dortmund s’est rapidement imposée à l’époque comme le lieu idéal. Située en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, le Land le plus peuplé d’Allemagne avec 18 millions d’habitants, la ville compte à elle seule près de 600 000 âmes et possède un avantage de taille : celui d’être connue essentiellement grâce au football. Si en 2008, Gelsenkirchen avait failli être choisie à la place de sa rivale, l’emplacement privilégié à côté de la Veltins Arena possédait le désavantage de n’être attractif que les jours de match du FC Schalke 04. Dortmund, en proposant un emplacement central à deux pas de la 5e artère la plus fréquentée du pays, s’assurait de ne pas toucher que les fans du Borussia, mais aussi le commun des mortels venu dans la cité pour faire du shopping ou se balader.

Entrée dans l’arène

Si le monstre de verre et de béton semble froid de prime abord, il s’avère être chaleureux dès qu’on y pénètre. Pour accéder au premier étage consacré à l’histoire de la Nationalmannschaft, les visiteurs doivent emprunter un escalator décoré sur les côtés d’une grande fresque représentant les supporters des différents clubs allemands qui ont joué en première division, du Sud vers le Nord, sans oublier l’Ouest (le cœur du football allemand) et l’Est. Ça commence bien évidemment avec le Munich 1860 et le Bayern Munich, et c’est Bastian Schweinsteiger (seul joueur en activité représenté sur l’œuvre de Diana Köhne) qui accueille cette foule qui semble se diriger au stade. Tous les types de fans sont représentés, du visiteur occasionnel à l’ultra hardcore, en passant par les fameux « Kutten » , ces mecs avec leurs vestes en jean sans manches parées d’innombrables écussons sur tout le dos. Il y a aussi des supporters célèbres, comme le pilote de F1 Sebastian Vettel (fan de l’Eintracht) ou encore la chancelière Angela Merkel. Cette performance artistique est accompagnée d’une performance sonore, avec des bruits de conversations, des chants, bref, c’est comme si on était un samedi à 15h30. Une fois arrivé en haut de l’escalator, on se retrouve dans une autre ambiance, celle du stade en lui-même. Dans le couloir qui mène au cœur du musée, le visiteur devient joueur et s’imprègne des bruits de crampons et de discussions d’avant-match tout en ayant une oreille attentive aux chants du public. La partie est sur le point de commencer, et elle va durer un bon moment.

Musée 4 étoiles

« Der Anstoß » (le coup d’envoi) est donné par la victoire de la RFA à la Coupe du monde 1954. Tout sauf un hasard, car c’est bel et bien ce « Miracle de Berne » qui a permis à l’Allemagne de commencer son entreprise de réhabilitation auprès du monde entier. En avançant dans la galerie, on redécouvre sur une télé d’époque le doublé d’Helmut Rahn qui permet de battre une équipe hongroise invaincue depuis quatre ans (32 matchs officiels) avec le fameux commentaire d’Herbert Zimmermann : « Aus aus aus ! Auuus ! Das Spiel ist aus ! » « Il faut savoir que Zimmermann a commenté le match pour la radio. Il y a eu un commentaire télé, mais il s’est perdu, et n’avait pas été archivé » , raconte Christian Schönhals, l’attaché de presse du musée. « Du coup, c’est la voix de Zimmermann qui a été calée sur les images, et c’est la version qui est restée aujourd’hui. » Outre la retransmission de la finale, on découvre également des pièces de collection, comme par exemple la machine à écrire de Sepp Herberger, qui échangeait beaucoup de lettres avec ses joueurs. Le sélectionneur, qui était aussi connu pour ses expressions absurdes mais pleines de sens ( « Das Runde muss ins Eckige » , le truc rond doit aller dans l’angle) est d’ailleurs l’objet d’un jeu interactif, où le visiteur doit tester ses connaissances et retrouver les bonnes expressions d’Herberger. C’est là tout l’intérêt du musée : il ne s’agit pas que de passer devant des maillots, des chaussures, des textes ou des images. On est aussi là pour retirer quelque chose de cette visite, apprendre quelque chose. Et quoi de mieux que d’apprendre en s’amusant ? C’est ainsi qu’il est par exemple possible de choisir si le 3e but anglais de la finale de la World Cup 1966 est rentré ou non, et de voir ensuite en animation 3D les différents angles de la frappe de Geoff Hurst et de consulter les résultats des votants.

La première partie de l’exposition suit un ordre chronologique, avec les différentes performances de la Nationalmannschaft à la Coupe du monde et à l’Euro. Divers objets viennent temoigner des exploits de l’époque. Mention spéciale au point de penalty depuis lequel Andreas Brehme a marqué le seul but de la finale du Mondiale 1990, un carré d’herbe qui est resté pendant 25 ans en possession de Frank Farian, le producteur de Boney M. Sur le côté gauche de la salle principale, un espace est dédié au football d’ex-RDA, tandis que sur le côté droit, une frise rappelle les grandes dates de la Fédération allemande de football. À chaque année son événement : 1970 est celle du premier carton jaune jamais distribué (il est l’œuvre de Kurt Tschenscher, arbitre allemand), tandis que 1996 est symbolisé par le maillot d’Oliver Bierhoff, auteur du doublé en finale de l’Euro face à la République tchèque. Par ailleurs, les années noires ne sont en aucun cas omises : il est question de l’interdiction du football féminin par la DFB dans les années 30, ou encore du sort de Julius Hirsch et de Kurt Landauer quelques années plus tard, grands artisans du football allemand de l’époque, mais considérés alors comme « différents » car juifs. Heureusement, pour que le musée ne vire pas trop au truc barbant et un poil trop sérieux, une salle sert de soupape de décompression : le studio d’enregistrement. Dans cette petite pièce à l’acoustique parfaite, on peut réécouter les plus belles chansons écrites pour soutenir la Nationnalmannschaft, dont certaines ont même été chantées par les joueurs eux-mêmes.

Bundesliga et Hall Of Fame

Une fois arrivé au rez-de-chaussée, la salle des trophées fait son apparition. Spoiler alert : l’Allemagne en a gagné beaucoup. Et si le musée est surtout celui de la DFB, quelques salles sont tout de même consacrées à ce même étage à la Bundesliga, de sa création en 1963 à nos jours. Les pièces y sont moins intéressantes – hormis celle qui retrace l’histoire de la tactique – et les objets exposés de moins grande valeur, mais le tout reste extrêmement bien fait avec une grande vitrine pour chaque décennie. Au fond de cette salle, l’attraction est sans conteste le carrousel de buts, une grande salle où les sièges tournants permettent de revivre à 360 degrés les plus beaux buts de l’histoire de la BuLi, mais aussi les plus grands ratés. Nul doute que le quintuplé de Robert Lewandowski face au VfL Wolfsburg devrait bientôt y faire son entrée. La visite s’achève dans une grande salle à dominante noire, où sont inscrits les noms de tous les joueurs qui ont un jour porté le maillot frappé de l’Aigle. Au centre de cette salle, un Hall of Fame devrait bientôt voir le jour, dans le but d’offrir une consécration définitive aux joueurs et aux joueurs, aux entraîneurs (hommes et femmes) de l’Allemagne, aussi bien de l’Ouest que de l’Est.

Le prix de la discorde

Évidemment, tout n’est pas parfait et le point d’achoppement numéro un est naturellement le prix d’entrée qui est de 17 euros. Certains membres du Bundestag ont jugé ce dernier trop élevé à de nombreuses reprises surtout lorsqu’on sait que le musée a été largement financé par la Rhénanie-du-Nord-Westphalie elle-même, donc par les contribuables. 17 euros, ce n’est pas vraiment à portée de toutes les bourses, et ce, même si le transport est compris dans le prix du billet. La construction du musée a coûté cher, plus cher que prévu, et comme à chaque fois dans ces cas-là, ce sont les citoyens qui casquent. Heureusement donc que le musée est à la hauteur des espérances en matière de qualité. Pour le parcourir dans son intégralité, lire toutes les explications, regarder toutes les vidéos, etc, il faut penser à poser une demi-journée. Rapporté au temps et surtout à la qualité de l’exposition proposée, le tarif ne paraît plus aussi scandaleux. Il ne reste plus qu’à convaincre 276 000 visiteurs par an pour rentrer dans les frais. Un cap qui devrait être rapidement franchi.

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