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On a retrouvé la seule personne qui a regardé PSG-Saint-Étienne
Dimanche soir, hiver glacial. Dans son salon, Louis Henryque, soldat de DAZN, brave la solitude et la brume pour s’offrir l’affiche de la semaine. Celle que Vincent Labrune, visionnaire du marketing télévisuel, aurait vendue comme un filet de bar à la criée. Bol de petits pois wasabi pour le croquant, une bière HK 0% pour l’hydratation et le pseudo-lâcher-prise : au programme, PSG-Sainté.

Un duel aux relents de nostalgie : des massacres zlatanesques, des bastons générales, et cette fameuse défaite parisienne en 2012, l’ultime éclat d’un Sainté conquérant. Depuis, 20 matchs d’invincibilité pour Paris. Sur le papier, une boucherie à prévoir, surtout avec Luis Enrique qui aligne enfin un vrai numéro 9. Les étoiles semblent alignées pour un carnage façon 8-0 de City. Retour sur la soirée du seul spectateur de PSG-Sainté : Louis Henryque.
Je reçois un message de mon beau-frère qui me propose une raclette triple morbier vacherin. La tentation est énorme, mais non, je reste fidèle au sourire Colgate de mon capitaine, Marquinhos, soulevant un trophée éco-friendly. Le bonheur, c’est parfois simple : des pâtes au pesto rosso, l’autre côté de l’oreiller, et un match de Ligue 1.
Étoiles soviétiques, Telegram et Forza Barça
Sur le terrain, le match démarre avec des Stéphanois aux noms d’étoiles soviétiques qui tentent leur chance face à Donnarumma. Une audace qui pourrait même émouvoir la cellule de recrutement parisienne, récemment passée de l’exotisme portugais à celui de l’Europe de l’Est. Au-dessus, mon voisin hurle comme si un Lego avait signé un attentat sous son pied. Sainté aurait-il encore des fans ? Dembélé finit par décocher une frappe au premier poteau. Je murmure un « Oui » constipé, qui sort presque malgré moi. Fini le temps où le PSG m’arrachait des cris de joie. Maintenant, même un frisson discret fait le taf.
Un Dembélé XXL. 🎥 @DAZN_FR pic.twitter.com/rzL0wM4cuL
— Ligue 1 McDonald's (@Ligue1) January 12, 2025
Luis Enrique s’impose un jeûne intermittent, mais nous impose un jeûne constant d’émotions. Je bataille avec mes addictions aux réseaux sociaux, et je reste concentré sur le match. Il a fallu 20 minutes pour que le stream plante. DAZN ? Je m’excuse du mensonge. Merci Telegram et ses liens qui me supplient de m’abonner à des chaînes de paris sportifs. Affalé sur le canapé, téléphone en main, je ressemble à un joueur simulant une crampe. Mon écran Xiaomi, fissuré depuis une défaite rageante contre l’Atlético, laisse les corners devenir des taches noires. Mais bon, qui croit encore aux corners en Ligue 1 ?
Soudainement un hurlement du voisin : « J’AI MAL, J’AI MAL, J’AI MAL ! » Je sors de chez moi en courant, en quête d’adrénaline et d’une bonne action comme un scout et tambourine à sa porte. Il m’ouvre, larmes aux yeux, bonnet vissé, écharpe enroulée, pull de Noël édition Lamine Yamal. Au fond, une télé 4K diffuse… Barça-Real, en clair, sur la chaîne L’Équipe. Mon voisin, Italien devenu Catalan par passion, m’attrape et hurle : « Forza Barça ! » avant de claquer la porte.
En catimini
Je me retrouve seul sur le palier, avec mon écran aussi blessé que la cheville de Neymar, et le penalty de Dembélé apparaît vaguement devant mes yeux embués. Doublé. « Oui », je murmure encore une fois, poing levé mais regard noyé dans l’oreiller. Puis en deuxième mi-temps, je lutte, lutte pour rester fidèle. Les notifications m’assaillent, les petits pois wasabi sont morts et la bière 0% m’a bourré sous placebo. Je craque, j’allume la télé et tape 21 sur ma télécommande. Un canal clair, des commentateurs français, des passes, du soleil, un Kylian incroyable. Mon œil retombe sur mon téléphone. Après un horrible cafouillage, Barcola marque… but refusé. Je souris par dépit.
Mon voisin, lui, exulte : Raphinha crucifie le Real dans l’euphorie catalane. Pendant ce temps, Sainté remonte à un but de l’égalisation. Personne n’y croit. Ni les Stéphanois ni les Parisiens. Le match s’efface doucement dans le brouillard.
Lundi matin, machine à café. Les cernes bien accrochés, Jules Kounté, mon collègue autoproclamé expert en style et en foot, débarque boosté sous caféine et highlights.
« T’as vu la passe de Jules, la tête de Raphinha, les dribbles de Yamal, même Mbappé était en feu ! » Pas l’énergie d’avouer que j’étais devant PSG-Sainté. Alors je lâche : « Ouais, c’était d’un tout autre niveau… »
Et m’enfonce chercher un soupçon de réconfort dans des tweets partageant mon vécu solitaire, mon café tiède déjà oublié.
Par Mathias Jobert
Attention, ceci est une fiction (pour ceux qui auraient eu un petit doute et qui ont eux aussi un voisin fan du Barça)