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On a fait le sujet de philo du bac

Par Théo Denmat, en 4h, avec une banane et du Guronsan
9 minutes
On a fait le sujet de philo du bac

Top départ ! À 8h ce matin, les élèves de France commençaient leur bac avec l'épreuve de philosophie. Au programme : « La morale est-elle la meilleure des politiques ? » pour les ES, « Reconnaître ses devoirs, est-ce renoncer à sa liberté ? » pour les S, ou encore « Est-il possible d'échapper au temps ? » pour les L. C'est ce dernier sujet qu'on a décidé de traiter, en y incluant Sir Alex Ferguson.

Diam’s, à son échelle, l’avait théorisé en une lapalissade : « Jeune demoiselle recherche un mec mortel. » Au cœur de son album Dans ma bulle, sorti en 2006, la chanteuse explorait sans le savoir à travers la chanson Jeune Demoiselle le concept de mortalité, et de fait, la notion de temps. Car l’homme, être temporel par excellence ayant conscience du temps qui s’écoule, est aussi, à sa manière, un voyageur inter-temporel, capable de convoquer le passé par le biais de sa mémoire, et le futur par celui de son imagination. Mais ce pouvoir empêche-t-il factuellement le temps de passer ? Ce temps qui, comme Iniesta dans le jeu du Barça, est la clé de voûte de notre existence, rouage autour duquel se déploient nos aspirations, nos doutes, et, une fois le sablier écoulé, notre mort. En d’autres termes, sommes-nous nécessairement impuissants face à lui ?

I – L’homme ne peut échapper au temps

A – L’homme est mortel

Ils s’appelaient Marc-Vivien, Antonio, Cheik ou encore Papy, et sont morts de l’exercice de leur passion. Sur le pré, la gueule ouverte et les yeux écarquillés, victimes de crises cardiaques inexpliquées et inattendues, comme un oiseau décollerait d’une branche à la suite d’un courant d’air un peu plus fort que le précédent. L’homme, et voilà qui est inhérent à son existence, est mortel. Bien avant sa disparition naturelle, de vieillesse, il peut décéder sur un claquement de doigts du destin, en dégustant, au choix, le dessert d’un repas bien copieux (Louis Nicollin), en marchant dans la rue (Guy Béart), en faisant l’amour (Felix Faure) ou en jouant au foot (exemples cités ci-dessus). Le temps donne sa forme et sa limite à notre existence, et il est vain de vouloir s’en affranchir, comme l’explique Épicure dans ses Lettres à Ménécée. Il y fait du désir d’immortalité le pire des « désirs vides » , étant dénué de chances de succès. Les fontaines de Jouvence n’existent que dans Pirates des Caraïbes et, même si la clinique de Merano renvoie souvent chez eux des footballeurs « rajeunis » , ses effets ne sont que temporaires et, surtout, voués à un combat perdu d’avance. On ne bat pas le temps. La chirurgie esthétique ne peut que tromper le reflet de son miroir, et les opérations salvatrices sur les genoux fragiles de Ronaldo, par exemple, n’œuvrent malheureusement qu’à court terme. Bref, on peut tromper ses yeux, mais pas sa montre, et aller à l’encontre de ce constat est vecteur de souffrance.

B – L’homme est un être temporel qui fait exister le temps

Le temps, pour les philosophes, est une donnée à laquelle on ne peut se soustraire. Il renvoie finalement à la finitude de l’homme et au cadre indépassable de son existence, les deux étant liés par un contrat implicite. L’homme est défini par le temps qui s’écoule, et lui donne en même temps existence en essayant de s’en passer, comme le souligne l’œuvre de Saint-Augustin. Le temps est compris par le Français Henri Bergson de deux manières : soit par la conscience, soit par la technique. Le temps subjectif de la conscience est lié à nos représentations (cinq minutes de temps additionnel en finale de Coupe du monde peuvent paraître des heures), alors que le temps objectif est celui de l’horloge accrochée à la montre de l’arbitre, par exemple Néstor Pitana lors du France-Croatie de juillet dernier.

Les secondes s’écoulent et voilà que nous perdons des cellules, rapprochant chaque instant un peu plus Kylian Mbappé de la retraite et, in fine, de son enterrement. D’un autre côté, ne serait-il pas finalement préférable de ne pas avoir conscience de cet écoulement déprimant ? L’animal, insouciant, est en ce sens parfois enviable, délesté du poids de la conscience de sa propre mortalité. Les gazelles naissent et meurent sans y réfléchir, n’ayant conscience du danger représenté par les lions qu’à travers un mimétisme de geste transmis par la mère. C’est le sens de l’analyse nietzschéenne de l’oubli : si la mémoire qui nous rapporte au passé est également ce qui rend possible la connaissance, elle est aussi ce qui nous fait souffrir en ce qu’elle nous rapporte à tout ce que nous avons perdu. Or, comment « apprendre l’oubli » ?

II – Il est possible d’échapper au temps

A – Lutter contre son passage

Lors de son arrivée à la Juventus, en Italie, la nouvelle avait fait grand bruit : Cristiano Ronaldo, 33 berges au compteur, aurait le corps d’un homme de… 20 ans. Taux de masse graisseuse : 7%, contre 10-11% en moyenne. Masse musculaire : 50%, contre 46% en moyenne. Irréel. Sa légende raconte qu’il commencerait ses journées par un bol de lait et mille abdos, l’homme prenant son pied (et c’est le cas de le dire) à dépasser les limites de son corps en même temps que celles de son sport. Cette attitude pourrait ainsi, de fait, rendre caduque la pensée d’Épicure : lutter contre le temps qui passe n’est pas vain, et peut mener à une forme de dépassement de soi, non pas source de souffrance, mais de plaisir.

Roger Milla, par exemple, reste à ce jour le plus vieux buteur de l’histoire du Mondial, à 42 ans, et Gianluigi Buffon restait, à 40 ans, titulaire en équipe nationale, préféré par son sélectionneur à ses jeunes successeurs. Échapper au temps est donc possible dans une certaine mesure, comme lorsque la technologie remplace une articulation défectueuse par un morceau de métal insoumis aux lois de la biologie. De même, le mythique entraîneur de Manchester United Sir Alex Ferguson expliquait un temps que le football le rajeunissait, quand la majorité des entraîneurs à succès ont désormais dépassé la barre des soixante ans. Œuvrer vieux, en football, est la norme. Et ce n’est pas Guy Roux qui dira le contraire.

B – Créer l’immortalité

Aussi étonnant que l’idée puisse paraître, il est également possible pour l’homme de créer l’immortalité. C’est le sens de l’analyse par Hannah Arendt de l’œuvre d’art : elle est, dit-elle, la seule création humaine indépendante du temps, capable d’accéder à une « immortalité potentielle » . Les tableaux, palpables, mais aussi les grands matchs s’inscrivent dans cette mouvance, extrayant l’homme de son existence le temps d’un regard à la Joconde, d’une mi-temps du miracle d’Istanbul entre Liverpool et l’AC Milan en 2005, ou même d’une tête salvatrice d’Ole Gunnar Solskjær contre le Bayern Munich, en finale de Ligue des champions 1999. Certaines rencontres sont devenues, de fait, immortelles. Comme le France-RFA de 1982, l’Argentine-Angleterre de 1986 ou l’Italie-Brésil de 1982.

Il est impossible pour l’homme de s’extraire biologiquement du temps, mais il peut s’opposer à son passage, ou en tout cas en faire fi l’espace d’un instant, au stade ou devant sa télévision. « Par la magie du ressouvenir, le passé pouvait être restitué » , disait Proust en parlant de mémoire affective. L’idée de mortalité étant définie par l’angoisse qu’elle provoque en chacun de nous, celle d’immortalité ne serait-elle pas simplement définissable par un instant où la notion de mort nous échappe ? En somme, devenons-nous immortels à l’instant où nous arrêtons de penser ? « Tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, énonçait Pascal, qui est de ne pouvoir rester en repos. » Raison pour laquelle de nombreux joueurs sont victimes de syndromes dépressifs à l’orée de leur retraite, une étude du Dr. Vincent Gouttebarge, responsable du secteur médical de la FIFPro, montrant que 35% des anciens joueurs interrogés présenteraient des syndromes de dépression et d’anxiété dans les quatre semaines précédant son questionnaire. La retraite ramène les hommes à leur propre mortalité, et Frank Lebœuf en première ligne.

III – On peut échapper à l’idée que le temps nous condamne

A – Nous pouvons fuir l’idée de notre propre mort

Penser le temps étant un premier pas vers l’idée de sa propre mort, un esprit simple aurait l’idée d’arrêter d’y penser afin de s’en soustraire. Mais sommes-nous simplement capables d’échapper à la souffrance induite par l’idée que nous allons mourir ? Cette dernière étant inévitable, il paraîtrait censé de la mettre de côté, l’homme ne pouvant lutter contre ce qui, de toute manière, surviendra. Dans les Pensées, Blaise Pascal évoque le divertissement comme biais trouvé par l’homme pour fuir l’idée qu’il va mourir. Le football serait, suivant cette logique, l’équivalent d’une pilule d’immortalité temporaire, moyen, non pas de retarder l’écoulement de l’horloge, mais d’oublier son tic-tac l’espace d’un instant. Et à défaut de se soustraire au temps, l’homme pourrait ainsi oublier qu’il va mourir et fuir la tristesse de cette pensée.

B – L’idée de la mort face au souci de bien vivre

Héraclite, philosophe grec de la fin du Ve siècle av. J.C, énonçait ceci : « On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve. » Nabilla n’y verrait probablement là qu’une histoire de shampoing, mais comprendre ici que tout est changement, tout est mouvement. Le fleuve est celui de la vie, et s’il s’écoule sans discontinuer, alors autant en profiter du mieux que possible. Mais est-ce réellement le temps qui nous condamne, ou l’idée que l’on s’en fait ? Dans Lettre à Ménécée, Épicure nous explique comment se délivrer de la crainte de la mort qui nous empêche de vivre. Selon lui, la mort constitue une réalité qu’un humain ne rencontrera jamais, la chose étant précisément antinomique au principe d’existence. En ce sens, ce n’est pas la mort qui est à fuir, mais la tristesse découlant de sa pensée. Or, cette dernière pourrait être combattue en se rappelant de l’inverse, soit la joie de ne pas être décédé. Ainsi Marcelo, latéral gauche du Real Madrid, s’étant fait tatouer « Carpe Diem » sur l’avant-bras gauche, on peut penser qu’il a fait de son existence une fuite permanente du temps, tout en y étant ramené sans cesse puisque l’ayant à vie sur la peau.

Conclusion

En définitive, s’il est impossible de ne pas mourir, il est bien en notre pouvoir d’échapper au temps en nous délivrant de la souffrance et de l’impuissance produites par l’idée que le temps nous condamne à la mort. Échapper au temps équivaudrait alors à se libérer de la tristesse et regarder en face l’idée de notre propre mort pour profiter du temps qui nous est compté. Une manière de dire que Diam’s est déjà immortelle, et qu’il ne faut pas trop penser à l’après-carrière de Benjamin Nivet.

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