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Neal Maupay, diaboliquement attachant
Recruté sur le gong en fin de mercato, Neal Maupay revient en France pour poursuivre une carrière qu’il a pris le temps de construire après avoir débuté si jeune. Et le Classique OM-PSG qui s’annonce est idéal pour mettre en lumière toute sa personnalité.
Petit jeu pour débuter : sans partir direct sur Wikipédia, quel âge donneriez-vous à Neal Maupay ? Si vous aussi, en réfléchissant rapidement, vous l’avez emmené au-delà des 30 ans, rien de bien surprenant. Mais Maupay, c’est 12 ans de carrière, pour seulement 28 ans au compteur. « J’ai l’impression qu’il est toujours jeune, tellement il a commencé tôt, sourit Jessy Moulin, son ancien coéquipier à Saint-Étienne (2015-2016). Neal, c’est la jeunesse éternelle ! » Souviens-toi, ce Nice-Brest, en septembre 2012, et Neal Maupay qui remplace Éric Bauthéac dans les arrêts de jeu. Pour ses débuts en Ligue 1 à 16 ans et 32 jours, troisième plus précoce de l’histoire de la Ligue des talents à l’époque. Si le premier but est rapidement inscrit (trois mois plus tard, contre Évian-TG), le jeune Neal ne devient jamais réellement incontournable au Gym. 53 matchs, 8 buts, à peine 10 titularisations cumulées dans l’élite en trois ans. Mais, déjà, la personnalité interpelle. « En un mot ? Déterminé, lâche tout de suite Kévin Gomis, ancien partenaire sur la Côte d’Azur. À 16 ans, il a toujours été poli, courtois, respectueux. Mais, sans aucune arrogance, on sentait qu’il n’avait pas de gêne. S’il fallait qu’il prenne ta place, il allait la prendre. Il savait où il allait. À Nice, quand il estimait qu’il devait jouer, il l’a dit, comme un adulte. Et il a fait comprendre qu’il devait partir. Il a roulé sa bosse. »
L’Angleterre, terrain de jeu parfait
Arrive le choix de l’ASSE de Christophe Galtier, alors engagée en Ligue Europa. Mais le temps de jeu reste maigre derrière Romain Hamouma, Kévin Monnet-Paquet, Nolan Roux ou Alexander Søderlund. « Il y avait beaucoup d’attentes autour de lui, note encore aujourd’hui Benjamin Corgnet, à ses côtés dans le Forez. Cette étiquette d’un des plus jeunes à avoir commencé en Ligue 1 lui a un peu collé à la peau pendant quelques années. Je sais qu’à l’époque, ça l’avait beaucoup affecté. Il n’était pas malheureux, mais quand on voit son ascension et la carrière en Angleterre, ça lui a fait du bien de bouger à ce moment-là de la France. »
Redescendu en Ligue 2 à Brest, Maupay claque 11 buts et fait le choix de Brentford, en Championship. « Il n’arrivait pas à vraiment exploser comme il le souhaitait, pense Yoann Barbet, qui le voit arriver en 2017. Mais n’importe quel joueur qui vient à Brentford, ce n’est jamais une connerie… Il marque 12 buts. Pour une première saison, ce n’est pas dégueulasse. » Jusqu’à planter 25 pions en 2018-2019, avec la confiance du génial Thomas Frank. La Premier League et Brighton s’offrent à lui. Sa carrière au très haut niveau peut véritablement démarrer. Avec des buts, oui, mais aussi du buzz. Neal Maupay trouve en Angleterre le terrain de jeu parfait pour développer cette personnalité et ce personnage. Des petites phrases, des brouilles (n’est-ce pas Mattéo Guendouzi ?) et des posts qui claquent sur les réseaux sociaux.
🗨️ "Certains de leurs joueurs doivent apprendre ce qu'est l'humilité. Spécialement l'un d'entre eux"
Grosses tensions en fin de match entre les Français Neal Maupay et Mattéo Guendouzi… 😳 pic.twitter.com/h3tSQKUUPs
— CANAL+ Foot (@CanalplusFoot) June 21, 2020
Exemple avec un extrait du film Les Évadés publié sur X lors de son départ d’Everton à l’OM, comme pour illustrer qu’il sortait de prison, lui qui n’était plus vraiment en odeur de sainteté chez les Toffees. Et, plus récemment, lors de l’incroyable victoire marseillaise à Lyon (3-2), Maupay, lui l’ancien Vert, n’a pas hésité à poster une photo le montrant buvant une bouteille d’eau à l’effigie de l’OL. « Il y a deux Neal Maupay, sourit Yoann Barbet, parti de l’enfer des Girondins de Bordeaux direction l’Arabie saoudite l’été dernier. Ce n’est pas du tout le même sur et en dehors. Sur le terrain, il a cette image d’être un peu casse-couilles, un râleur, un chambreur. C’est un très gros bosseur, avant tout. Mais c’est une certitude : je préfère l’avoir avec que contre moi. Avec son caractère bien trempé, je comprends qu’il puisse se mettre beaucoup de personnes à dos. Mais il aime ça, aussi. Et je pense qu’il ne va pas changer. »
Transféré pour plus de 15 millions d’euros à Brighton à la suite de sa saison de l’explosion à Brentford, Maupay met un petit peu de temps pour se faire adopter. Toujours chez les Seagulls, Adam Webster a vu l’évolution de Neal Maupay, l’homme : « Au départ, il n’a peut-être pas approché certaines personnes de la bonne façon, reconnaît-il. Ce n’est pas qu’il n’était pas sympa, mais c’était un peu plus compliqué. Tout le monde ne s’est pas pris d’affection pour lui comme ce fut le cas quand il est parti. Car tout le monde l’adorait, vraiment. »
« J’ai pris le parti d’être moi-même »
Sportivement, Webster n’oublie pas de souligner les importantissimes buts de Maupay en 2019-2020, la saison du Covid : « Sans ces buts, on ne serait peut-être plus là, continue le défenseur anglais. Il a eu un énorme impact pour nous permettre de ne pas descendre. » Une maturité sportive pour trouver son rythme de croisière sur le pré, et une maturité humaine avec l’expérience. Webster se souvient avoir présenté Maupay à sa femme deux ans après l’arrivée du Français : « Elle m’a dit que c’était l’homme le plus gentil qu’elle ait rencontré. Et il l’est vraiment. Il y a une certaine perception de Maupay : quand il joue, et beaucoup sont comme ça, c’est “business only”, il fera tout pour gagner. Mais en dehors, il peut être le plus sympa. »
Trente-trois buts en Premier League jusqu’en 2024, avant de signer à l’OM et de marquer son premier but mi-septembre contre… Nice. En célébrant, bien sûr ! « Chambrer fait partie de sa nature, recadre Kévin Gomis. Je pense qu’il a besoin de ça pour s’exprimer. C’est sa manière de rester concentré, concerné. Et il ne faut pas l’oublier : c’est un Argentin, il a des origines. Il a ce truc un peu latin, la grinta. » L’intéressé détaillait récemment cet état d’esprit dans La Provence : « J’ai pris le parti d’être moi-même, témoigne Maupay. Si je veux chambrer un ami ou faire un truc dans un match, je n’ai pas envie de me priver. J’ai toujours eu ce côté chambreur, ça fait partie du jeu. Je trouve dommage que des joueurs se retiennent. »
Neal Maupay pour sa première titularisation ! 💪💙
Le résumé complet de #OMOGCN disponible ici 👉 https://t.co/cnySG6SSHr#SublimeCôtedIvoire ✨ pic.twitter.com/3G9AKG83GK
— Olympique de Marseille (@OM_Officiel) September 15, 2024
Dans une fournaise comme celle d’un OM-PSG, il faudra scruter la rencontre et l’après-match. Il est certain que si la soirée est belle pour Adrien Rabiot et consorts, Neal Maupay sortira son meilleur post tant les contours d’un Classique rassemblent tout ce que l’attaquant aime. « C’est un vrai guerrier, loue Jessy Moulin. Sur le terrain, il a une vraie envie de marquer, d’aider l’équipe, avec un vrai sens du but. Et si on le chambre, il va répondre… et en rajoutera toujours un peu plus. Il aime avoir le dernier mot. Pour l’adversaire, il faut vraiment être certain qu’il ne revienne pas dans la partie parce que si Neal a l’occasion, il va rendre la monnaie. Mais ça reste bon enfant, ça ne sort jamais du cadre. » Yoann Barbet abonde : « Quand je vois tout ce qu’il prend dans la gueule quand il chambre sur Twitter, il faut aussi être costaud et savoir ce qu’on fait, explique-t-il. Il gère à merveille. Dans le fond, ce n’est pas du tout méchant. Mais je comprends que trois quarts des gens puissent le détester, car parfois il a une attitude détestable. Mais quand on le connaît bien, c’est totalement l’opposé. »
Le chambrage est même une véritable discipline à en croire Maupay. « Je suis le premier à chambrer, mais ça doit rester dans les règles de l’art. On n’insulte personne, on ne menace personne. » Webster enchérit : « Contre Crystal Palace, à l’extérieur, on ne méritait rien du match. À la dernière minute, il se retrouve devant le gardien. Il décide de le lober. Avec son calme, sa sérénité, pour ensuite aller devant les supporters adverses. C’est ça, Neal. »
Jusqu’ici prêté à l’OM, Neal Maupay pourrait-il être un visage de la Ligue 1 en quête de renouveau… et d’argent ? « Le voir à l’OM, franchement, c’est amplement mérité. Il mériterait même un peu plus, promet Kévin Gomis. Ça fait du bien de le voir revenir en Ligue 1, ça met un peu de personnalité. En France, dès qu’un joueur sort un peu de l’ordinaire, on le met directement dans une case. C’est dommage. J’espère qu’il y aura d’autres Neal Maupay en L1, ça ramènera, j’espère, des droits TV. Car depuis qu’il n’y a plus Kylian… » Sûr que DAZN réfléchira à le mettre en avant s’il fait tomber Paris dimanche soir.
Par Timothé Crépin
Tous propos recueillis par TC, sauf mentions