- Ligue 1
- J7
- Marseille-Strasbourg (3-2)
OM : feu de joie ou feu de paille ?
Mené au score à la demi-heure de jeu, réduit à dix, rattrapé juste avant le temps additionnel : ce mercredi, l’Olympique de Marseille avait réuni tous les éléments contraires pour se faire exploser à domicile par Strasbourg. Et pourtant c’est la victoire et le podium que les hommes de Rudi Garcia ont trouvés au bout de leur chemin. Ou quand la force de caractère, aussi bénéfique soit-elle, sert surtout à cacher ses faiblesses.
« Il n’y a que mon groupe pour me faire des choses comme ça. » Ce genre de phrases peut basculer dans n’importe quel sens : les remontrances ou les louanges. Pourtant, dans la bouche de Rudi Garcia, gagner de cette manière face à Strasbourg est une preuve de qualité et surtout de caractère. Tout pour lui plaire. « Se voir égaliser après avoir bataillé trente minutes au moins à dix contre onze (expulsion d’Amavi, N.D.L.R.), et on tenait, puis finalement, Strasbourg a fait une belle action et a égalisé carrément au bout du match, narrait le coach marseillais après la rencontre. Mais on a profité du temps additionnel – à dix ! – pour aller chercher la victoire chez nous. C’était un grand moment au niveau émotion. » Des sensations fortes comme celles de se pencher un peu trop au bord du vide pour finalement rester sur la terre ferme. Les seules qui vaudraient le coup d’être vécues, à entendre Rudi Garcia.
Le mythe de l’équipe à réaction
Quelques jours après le bouillon pris à Lyon, Marseille s’est fait bouger contre un Racing construit pour défendre en bloc pour mieux frapper en contre. Exactement le genre de situations qu’a exploité Kenny Lala, venant effacer d’un lob astucieux un capitaine Mandanda de retour dans ses cages. Il aura fallu une décision heureuse du corps arbitral – la faute de Grimm sur Thauvin étant très légère même après vérification de la VAR –, ceux que Rudi Garcia ne manquent jamais d’égratigner, et un penalty transformé par Payet pour que les Olympiens ne rentrent pas sous la bronca du Vélodrome. Et au terme d’une fin de match complètement folle, l’OM s’en est sorti presque miraculeusement. Une réaction qui semble convenir au coach, puisque celui-ci appelait avant la rencontre à ce que « cet OM se fâche » . Un discours à base d’orgueil, de sueur et de cojones. Car c’est ce que demanderait le peuple.
En effet, tout le monde avait encore en tête le succès décroché début septembre à Monaco (2-3), dans des conditions comparables. À Louis-II, l’OM avait dû son salut à Florian Thauvin et Valère Germain. Ce dernier va finir par s’accommoder de son statut de héros ordinaire, puisque c’est encore lui qui a délivré son équipe ce mercredi. Pour un type qui ne fait pas l’unanimité, l’attaquant a apporté quatre points à son équipe, grâce à ses buts au buzzer. De quoi donner une aura à cette équipe : celle qui ne peut trouver son bonheur que lorsque tout est chaos autour d’elle. Pourtant, cette image qui se dessine, tant par quelques exemples récents que par les déclarations faites, brouille la réalité. Marseille n’a jamais eu autant besoin d’être cette équipe à réaction qu’aujourd’hui. La preuve : depuis l’arrivée de Rudi Garcia en octobre 2016, seules 8 de ses 56 victoires ont été acquises après avoir été mené au score. Jouer la carte du feu et de l’émotion, puisque c’est ce que l’entraîneur veut que le public retienne, ressemble plus à un stratagème pour camoufler les défaillances actuelles.
Têtes brûlées
Car rarement l’OM a été aussi fébrile défensivement. Invoquer l’absence de Mandanda sur plusieurs rencontres pourrait être un argument en partie recevable, mais Yohann Pelé n’est clairement pas le plus visé par les critiques. Luiz Gustavo montre chaque journée un peu plus ses limites au poste de défenseur central, Kevin Strootman a du mal à faire le travail en sentinelle, alors que Ćaleta-Car et Amavi sont soit à la rue, soit expulsés, ou les deux en même temps. « On a encore pris deux buts, mais on en a encore marqué trois, donc pour l’instant, on est fidèle à ce qu’on fait, renvoyait Rudi Garcia. Continuons à marquer, puis essayons de moins en prendre, ça nous aidera à gagner des matchs plus facilement. » Pas sûr que cela soit une volonté réelle, puisque pour l’instant, ça marche. L’OM compte 13 points et est troisième de Ligue 1, avec 19 buts marqués et 13 encaissés. L’an dernier, il présentait exactement le même nombre de points après sept journées, mais avec un autre bilan comptable – 11 buts inscrits contre 10 pris – pour finalement n’être que cinquième au classement… Le calcul est vite fait : « Continuons à nous faire peur, si c’est ça qui nous fait avancer. » Soit la définition même de l’expression « jouer avec le feu » .
Par Mathieu Rollinger