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Olympique Marseille – Milan AC, 1993 : la bonne étoile de Boli
Seul le club français le plus fada, en talent, en ferveur et en démesure, pouvait offrir au football tricolore sa première Coupe d’Europe. En 1993, c’est donc l’Ohème qui remporta la plus belle des trois, celle aux grandes oreilles. Un succès prometteur qui permettra l’éclosion du triomphe de France 1998...
Olympique Marseille – AC Milan (1-0) – Finale de la Ligue des champions – 26 mai 1993 Buteur : Boli (43e)
Quand Didier Deschamps impatient grimpe sur le podium pour aller brandir la coupe aux grandes oreilles, il n’a pas encore à l’esprit le précieux conseil technico-tactique prodigué par Michel Platini en 1998 :« Didier, quand tu vas à la tribune, vas-y doucement, lentement… Prends ton temps, ces moments-là sont rares, alors savoure. » Et puis le capitaine de l’OM a levé le trophée très haut dans le ciel de Munich.« À jamais les premiers » ! Oublié la main de Vata en 1990, la désillusion de Bari en 1991 et l’élimination honteuse en 8es de C1 1992 par le Sparta Prague ! La France remporte enfin la Ligue des champions grâce à l’OM de Tapie, Goethals et Boli. Le bon Basile a été bien sûr le grand héros de la soirée contre le redoutable AC Milan de Berlusconi, Capello et Van Basten…
« P… ! Ils sont trop grands, les Milanais »
À la 42e minute et 59 secondes, il a inscrit l’unique but de la victoire légendaire (1-0). Un but forcément mythique, tel qu’il l’a raconté pour le magazine GQ : « La balle arrive sur moi. Il y a Rijkaard et Baresi qui me retiennent complètement ! Et c’est là que je dis que les « génies du foot » étaient avec nous parce que c’est en redescendant que je prends le ballon de la tête (le haut de son crâne, NDLR). C’est Rijkaard et Baresi qui me « redescendent » quand la balle frappe ma tête ! Et puis là, la balle part ! Linéaire… Et je la suis, je la vois partir derrière moi, quand je redescends… Elle part vers l’histoire… Au fond ! »Avant le match, son pote Abedi Pelé lui avait glissé avec conviction : « Écoute, Baze. D’habitude, je centre toujours mes corners au deuxième poteau. Mais, là, p… ! Ils sont trop grands, les Milanais. Alors, cette fois-ci, je vais frapper mes corners plus court. Essaye d’aller couper au premier poteau. » Et bingo ! Les génies du foot étaient bien avec l’OM :« Le but de Basile ? Il n’y avait pas corner ! Moi et d’autres joueurs marseillais, on l’avait bien vu ! » en rigolait encore 20 ans plus tard Franck Sauzée. En effet, dans le duel entre Maldini et Pelé qui amène au corner, il apparaît que c’est bien l’attaquant phocéen qui touche le ballon en dernier… En pénétrant sur la pelouse de l’Olympiastadion de Munich 50 minutes plus tôt, l’AC Milan, favori, était là pour renouer avec ses deux derniers succès européens de 1989 et 1990. Face à l’armada rossonera impressionnante (Baresi, Maldini, Rijkard, Van Basten) disposée en 4-4-2 conquérant, Raymond-la-science oppose un 5-2-3 bien adapté au choc avec sa défense axiale à trois (Desailly, Boli, Angloma), ses deux latéraux (Di Meco, Eydelie), ainsi qu’un trident offensif menaçant Völler-Bokšić-Pelé… La première mi-temps d’un match hyper tactique qu’on aurait cru fermé offre en fait un spectacle haletant. Tête de Rijkard à côté (4e), puis tête de Massaro, préféré à JPP, qui passe également de peu à côté sur un centre de Van Basten (5e) ! Marseille réplique aussitôt sur une échappée solitaire de Völler dont le shoot est repoussé par Rossi (6e). À la 11e, Maldini place une tête sur corner passée au-dessus… À la 17e, Massaro talonne pour Van Basten qui tire en pivot du gauche au point de penalty : but ! Non : Barthez repousse ! Fabien de Lavelenet, 22 ans à peine, chevelu et incroyablement zen, garde la cage marseillaise à la suite de la fracture du péroné de Pascal Olmeta survenue plus tôt dans la saison. Dans la foulée, Fabien détourne par miracle d’une manchette réflexe la reprise violente de Massaro du gauche au deuxième poteau.
Boli-Pelé : la récidive !
Basile Boli se remet à souffrir atrocement de ce genou qui lui pourrit la fin de saison. Il demande à sortir… Colère de Rudi Völler, warrior qui en a vu de plus rudes : « Ça ne va pas, non ?! Tu restes ! Il faut que tu t’accroches ! »Alerté, Bernard Tapie appuie, via le docteur Bailly, l’injonction de Rudi, Deschamps et Desailly de rester sur le terrain. « Cet épisode, c’était une minute juste avant l’action du but. Vous vous rendez compte ? Si j’étais sorti, eh bien, c’était fini. Je n’aurais pas marqué », confiera Basile. Et Black Boli marqua… Le samedi 29 mai suivant, c’est le même duo Pelé-Boli qui récidivera contre le PSG, avec un coup de casque du second sur un centre du premier ! En seconde mi-temps, Fabio Capello passe à trois attaquants à la 58e minute en remplaçant le milieu Donadoni par Jean-Pierre Papin, ex-idole du Vélodrome. Trop fébrile dès son entrée, sa papinade passera à côté à la 77e. Encouragés par leurs 23 000 supporters, les Olympiens défendent leur avantage avec acharnement : « Dans cette équipe-là, je me suis senti invincible, parce qu’il y avait un esprit de combattant, racontera Éric Di Meco sur RMC Sport.À l’intérieur d’un match, on avait tous un duel, et chacun voulait le gagner, pour s’imposer collectivement. On aimait le défi physique, parce qu’on était forts physiquement, mais aussi intelligents tactiquement. »Un excès d’engagement qui pousse Boli à sécher durement Van Basten, sorti à la 86e : « C’est un regret car il n’a plus rejoué après : c’était son dernier match. Il a arrêté sa carrière le 26 mai 1993. Je me suis dit parfois que tout n’était pas de ma faute. Il était déjà sérieusement diminué durant cette fin de saison. » La fin du match approche, et des travées phocéennes, les huées s’abattent sur l’arbitre : « SIFFLE ! SIIIIIFFLE ! »Et c’est sifflé ! L’OM est champion d’Europe ! Basile se rue alors vers le virage des Marseillais, en hurlant : « »Non, je ne pleure plus ! » En 1991, après la finale perdue de Bari, j’avais éclaté en larmes. Les Africains avaient mal ressenti ces pleurs. Parce qu’en Afrique, on ne pleure que quand il y a un mort, pas pour un match de foot. » Bernard Tapie, descendu sur la pelouse pour étreindre ses gars, a réussi son pari de décrocher la Ligue des champions. « On a ouvert la voie au football français : c’était la première fois qu’un club français gagnait la Coupe d’Europe, analysera Jean-Philippe Durand entré à la 62e. En France, ça a décomplexé les joueurs, les clubs et plus tard, sans doute, l’équipe de France. En 1998, des gars comme Barthez, Desailly, Deschamps, des héros de Munich 1993, ont apporté à leur façon cette certitude qu’on était capables de gagner. » Le 12 juillet 1998, Deschamps ira à la tribune, doucement, lentement pour mieux savourer un autre moment d’éternité…
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