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Olivier Dall’Oglio : « À Dijon, je ne pense pas être sifflé »
Samedi soir, Dijon recevra Brest et un entraîneur qui a marqué l’histoire du club. Olivier Dall’Oglio, limogé le 31 décembre 2018, s’est installé depuis sept mois sur le banc breton. Heureux de retrouver la Cité des Ducs, le Cévenol raconte sa nouvelle vie à Brest, où il semble totalement heureux.
Êtes-vous heureux de revenir à Dijon ?Bien sûr. Ce sera malheureusement un peu trop rapide, puisque nous faisons l’aller-retour dans la journée. Je n’aurai pas le temps de voir tout le monde, mais je serai très heureux de recroiser des personnes avec qui j’ai eu de très bonnes relations. J’ai quand même passé près de dix ans à Dijon, en tant qu’adjoint de Patrice Carteron, puis responsable de la formation, et enfin entraîneur. J’y ai vécu une montée, en 2016, le maintien deux saisons de suite… Il y a eu de très bons moment, j’ai plein de bons souvenirs en tête. J’ai pu y nouer des amitiés, dans le foot et en dehors. J’ai aimé Dijon et les alentours. D’ailleurs, quand j’ai été limogé, j’ai continué à y vivre.
Vous allez croiser Stéphane Jobard, mais aussi Olivier Delcourt, votre ancien président. Vous êtes en procès avec le DFCO, l’affaire est devant les Prud’hommes…Oui. Je pense que c’est parti pour au moins deux ans. Là, ce sont les avocats qui discutent entre eux. La dernière fois que j’ai vu Olivier Delcourt, c’était il y a pile un an, pour une tentative de conciliation. Elle avait échoué. Si je le croise, je lui serre la main. Même si on ne s’engagera pas dans une grande discussion. Quant à Stéphane, il a été mon adjoint pendant plusieurs années, c’est une figure du club, puisqu’il a été joueur et capitaine. Quand il a été nommé en juin dernier, j’étais content pour lui. Il était prêt pour le poste.
Logiquement, vous devriez être très bien accueilli au parc des Sports.Je pense, oui. J’ai toujours eu de très bonnes relations avec les supporters. D’ailleurs, lors du match aller à Brest (2-0), les supporters du DFCO avaient déployé une banderole très sympa à mon égard, où ils me remerciaient. J’avais vraiment apprécié ce geste. Donc, samedi soir, je ne pense pas être sifflé.
Avez-vous digéré votre éviction, en décembre 2018 ?Cela appartient au passé.
Bien sûr, mon éviction de Dijon a été un moment difficile. Ça se poursuit devant la justice, je n’imaginais pas forcément les choses comme ça. J’étais bien à Dijon, j’avais un projet, le club continuait de se structurer. Moi, je m’inscrivais dans la durée. C’est comme ça. Pendant six mois, j’ai pu faire d’autres choses. Je suis parti en Laponie, j’ai redécouvert Marseille, où j’ai visité quelques galeries, je suis allé plusieurs fois à Paris. Je prenais du temps pour moi, ma famille, mes amis. Sans pour autant totalement couper avec le foot. J’ai vu des matchs, ressorti mes notes. J’ai beaucoup lu, ce qui, quand vous entraînez, n’est pas toujours évident. Des livres sur les sciences humaines, les neuro-sciences notamment. Je me suis par exemple intéressé à l’hypnose. Actuellement, à Brest, je travaille avec un kinésiologue sur l’impact qu’ont les émotions sur les joueurs. Essayer de comprendre pourquoi un mec ne va pas bien, c’est important. Il faut comprendre le joueur, mais avant tout l’homme.
Brest, c’était la meilleure opportunité que vous avez eue l’année dernière ?Oui. Il y avait eu des contacts avec Nancy, Lorient et Caen. Mon nom circulait sur des short lists, comme à Saint-Étienne. Mais la vraie proposition est venue de Brest. Je souhaitais en priorité rester en France.
Parce que je sais que pour les entraîneurs étrangers qui viennent dans notre pays, à cause de la langue, ce n’est pas toujours facile, ne serait-ce que pour la communication au quotidien avec les joueurs, pour faire passer des messages, expliquer des consignes. Donc, Brest m’a contacté. Le challenge me plaisait, car c’est une terre de foot. Dans les discussions, j’avais demandé à venir avec quelques adjoints, qui étaient avec moi à Dijon (l’adjoint Grégory Perès, le préparateur physique Benjamin Guy et l’analyste vidéo Maxime Flaman, N.D.L.R.). Pour gagner du temps, tout en m’appuyant sur des Brestois déjà en place, tels Bruno Grougi et Julien Lachuer.
Brest venait de se séparer de Jean-Marc Furlan, alors qu’il avait fait remonter le club en Ligue 1. L’avez-vous contacté, avant ou après votre signature ?J’avais prévu de l’appeler. Jean-Marc, je le connais très bien, quand il était à Troyes, je m’étais occupé pendant un certain temps du centre de formation. Mais finalement, je ne l’ai pas fait. Il avait quitté Brest en étant en désaccord avec certaines personnes. Il y avait eu des tensions, des divergences, et quelque part, je ne voulais pas être plus ou moins influencé. Je me suis donc contenté de regarder plusieurs matchs disputés par Brest l’année de la montée, pour me faire une idée de l’équipe, puisque beaucoup de joueurs ayant pris part à l’accession allaient découvrir ou redécouvrir la Ligue 1.
Avec Furlan, vous partagez une certaine philosophie de jeu. Vous avez un penchant pour le football offensif car, comme vous l’avez souvent déclaré, vous n’aimez pas « vous emmerder sur votre banc » .
Pour moi, qui aime faire jouer mes équipes, ce qu’avait réalisé Jean-Marc avec son effectif était forcément intéressant. En arrivant à Brest, je n’allais pas demander à mes joueurs de cesser de jouer. Mais j’ai aussi voulu insister sur l’importance de bien défendre, un discours que j’ai adressé aux attaquants notamment.
Vous nous faites du Dall’Oglio. Huitième attaque (28 buts), mais aussi une défense parfois perméable (27 buts). On ne s’emmerde pas en regardant votre équipe.Ouais, c’est vrai qu’on a pris l’eau à Montpellier (4-0), à Monaco (4-1), à Nîmes (3-0). Mais on a aussi réalisé quelques gros scores face à Strasbourg (5-0), à Toulouse (2-5), on a pris des points à Bordeaux (2-2), à Saint-Étienne (1-1), contre Lyon (2-2). On a vingt-huit points, cela semble plutôt bien parti pour le maintien. On prend des risques dans le jeu. Parfois, ça marche, parfois non. Mais n’oubliez pas que j’ai beaucoup de joueurs qui évoluent pour la première fois à ce niveau. Ou qui y reviennent après plusieurs saisons en L2. Honnêtement, je pense que le bilan est plutôt positif. Même si on prend trop de buts à mon goût.
Et puis, le public brestois a l’air d’apprécier…D’abord, il se dégage du stade Francis-Le Blé une vraie atmosphère. Il y a une énergie incroyable. On la sent descendre des tribunes, comme lors de la difficile victoire contre Amiens (2-1, le 25 janvier, N.D.L.R.). Cela nous aide beaucoup. J’adore ce stade, avec ses tribunes très proches de la pelouse. Les supporters aiment le beau jeu, c’est vrai. Ils veulent aussi que les joueurs mouillent le maillot, comme on dit. Même si le mec ne fait pas un super match, tant qu’il s’est battu, il se fait applaudir.
Brest a connu, dans les années 1980 et au début des années 1990, une période où ont défilé les regrettés Roberto Cabanas et José Luis Brown, mais encore David Ginola, Vincent Guérin, Corentin Martins… Avec un président, François Yvinec, ambitieux, et qui aimait bien que ça brille…Brest a vu défiler de très bons joueurs. Je ne sais pas exactement comment ça se passait à l’époque, mais ça avait l’air assez animé. Il y a ici un vrai intérêt pour le foot. Je le redis : le Finistère est une terre de foot. Quand j’ai signé, j’ai ressenti une vraie attente de rejouer en L1. Je ne suis pas du tout certain que les dirigeants actuels aient envie de mener une politique comme celle que vous évoquez, même si le club, au cas où on décroche le maintien, aura plus de moyens grâce à l’augmentation des droits télé. La gestion est rigoureuse, les structures du club s’améliorent.
Vous avez eu l’occasion de peindre ces derniers mois ?J’ai profité de mes six mois sans club pour ressortir les pinceaux.
Quand vous êtes occupé par le job d’entraîneur, cela laisse assez peu de temps pour peindre. J’ai tenté des choses, plus spontanées. J’aime beaucoup Jean-Michel Basquiat. D’habitude, mes toiles – des visages, par exemple – demandaient un travail plus réfléchi. Là, j’ai essayé des choses plus primitives, plus abstraites. Parfois, le résultat n’est pas celui que j’espérais, et je recommence. J’ai toujours aimé le street art, qui demande de la spontanéité dans le geste. Attention, je ne suis pas en train de vous dire que la nuit, je sors avec mes pinceaux et ma peinture pour aller peindre les murs de Brest. (Rires.) Dans ma maison, juste à côté de la ville, je me suis installé une pièce, spécialement réservée à la peinture. Mais depuis que je suis ici, je n’ai pas encore eu le temps de peindre. Et je n’ai pas vu d’expos. En revanche, j’irai, dès que possible, visiter le Fonds Hélène et Edouard Leclerc, à Landernau.
Brest a la réputation d’être une ville assez animée. Vous en profitez un peu ?Il y a effectivement une réelle énergie. C’est une ville portuaire, il y a donc pas mal de choses à faire autour. Des restos, des bars… J’ai aussi remarqué qu’à Brest, ou aux alentours, il y a pas mal de festivals. Dont les Vieilles Charrues, en juillet, une véritable institution. Je me suis promis de trouver le temps d’y faire un saut avec ma femme.
Propos recueillis par Alexis Billebault