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OL-Puel : faites la guerre, pas l’amour

Par Arnaud Clement
OL-Puel : faites la guerre, pas l’amour

Olympique lyonnais-OGC Nice, c'est l'assurance de voir une nuée de sifflets descendre des tribunes de Gerland au moment de la simple prononciation du nom de Claude Puel par le speaker. Résumé des épisodes précédents.

Si la Renaissance d’inspiration italienne eut lieu au XVe siècle, celle des supporters de l’OL remonte précisément au 15 juin 2011, jour du début de la procédure de rupture de contrat entamée par Jean-Michel Aulas et Claude Puel. Au terme de trois années de purge footballistique, vierges de titres malgré une demi-finale de C1 en guise de rare érection supportériste, le Monégasque de toujours prend ses cliques et ses claques et se taille cinq jours plus tard. Non sans avoir dans un coin de sa tête l’envie de soutirer quelques millions d’euros pour salaires à verser et dommages et intérêts pour préjudice moral aux Prudhommes. Le temps de la procédure, et JMA de lâcher encore quelques piques dont il est friand. « Il a trahi l’OL et m’a désespéré. Le plus dur aura été de sortir de cette sinistrose créée par Claude Puel. (…) Il a jeté le doute sur la capacité de l’OL à être performant et de ne plus prolonger la suite logique de ce que l’on avait fait, et donc de notre ambition » , clamait le boss de la Cegid et de l’OL en avril dernier dans un entretien au Progrès, quelques mois avant que l’appel de son ex-employé ne soit rejeté.

Pour comprendre comment le meilleur communicant du monde pro en est venu à une telle diatribe après avoir soutenu contre vents et marées son entraîneur plus que jamais seul au monde, il faut remonter trois années plus tôt. Comme toute histoire d’amour qui finit mal (en général…), le commencement est autrement plus souriant. À l’été 2008, l’arrivée du coach d’un LOSC qui grandit année après année au volant de la F1 lyonnaise sonne comme une bénédiction. « On pourrait mettre un sac poubelle sur le banc de touche que ça marcherait quand même. Alors Claude Puel… » , se disent en cœur les supporters, dans la foulée de leur septième (et dernier) titre. Malgré les départs de Ben Arfa, Coupet ou Squillaci, les recrutements de Lloris, Pjanić ou Makoun et un mois d’août quasi-parfait laissent entrevoir la prolongation de l’emprise rhodanienne sur la France du football pour au moins une saison de plus. Sauf qu’à la fin de la foire, le décompte de bouses est loin d’être à la hauteur des attentes des fans de l’OL.

Quand Gerland chante Gérard Houllier

Bordeaux champion, un spectacle bien moins enthousiasmant, des recrues qui peinent à justifier leur mise de départ, excepté Hugo le Niçois, un onze de départ qui ressemble un peu trop souvent à une annexe lilloise avec Bodmer, Keita, Makoun et Michel Bastos, une fois l’arrivée du Brésilien entérinée au terme du mercato stratosphérique de 2009 – 70 millions balancés et Lisandro, Cissokho ou Gourcuff alpagués – ou les départs non retenus par Puel de Juninho et Benzema et voilà que la crispation autour de l’ancien aboyeur des terrains se forme. D’abord au sein du vestiaire. Bien avant le coup de gueule aigu de Lloris, Jérémy Toulalan est le premier à rentrer dans son coach le 31 octobre 2009, à la mi-temps d’un derby pourtant victorieux à Geoffroy-Guichard. Quand Puel lui reproche ses gestes osés dans son secteur, l’ancien Nantais répond du tac au tac : « Ce n’est pas parce que tu n’as jamais su dribbler qu’on ne peut pas le faire. » Il faudra l’intervention du policier Cris pour calmer tout ce petit monde.

Au cœur d’un automne mi-figue mi-raisin, les premiers signes d’une désapprobation du public se font sentir fin 2009. Contre la Fiorentina, les « Juninho, Juninho » qui descendent des tribunes lorsque Kim Källström s’apprête à botter un coup franc ne sont pas destinés au Suédois, mais bel et bien à son coach. Son équipe bafouillant de plus en plus son football, ses interventions auprès des médias après des échecs se résumant à une insupportable langue de bois selon les soutiens du club et la perspective d’un hiver pourri font comprendre à Claudio qu’il est désormais l’ennemi public n°1. Le 16 décembre, au soir d’une victoire contre Boulogne-sur-Mer (2-0) qui s’est déroulée « à huis clos » selon ses dires en conf’ d’après match, Gerland conspue Makoun comme jamais, les virages en appellent à la démission et scandent même le nom de Gérard Houllier. La chasse à l’homme est lancée et va prendre des formes pour le moins originales, puis graveleuses.

Le cauchemar des fables claudiennes

C’est d’abord l’histoire d’un chant. Si on ne peut pas enlever aux groupes de supporters un certain talent en matière de créativité, les Bad Gones vont faire fort en reprenant à leur sauce Mon amant de Saint-Jean. Même si vous n’êtes pas branchés sur Chérie FM ou Nostalgie, vous n’aurez aucun mal à vous représenter ce que peut donner le refrain à la mode BG87. Au lieu des bras audacieux et des doux mots d’amour dits avec les yeux chantés par Bruel, c’est l’ami Puel qui se retrouve au cœur du couplet : « Mais comment ne pas perdre la tête, après sept titres d’affilée ? Mais ça fait deux ans, qu’on a rien gagné, Puel va te faire enc****. » S’il s’est toujours amusé à esquiver toute question relative aux réactions du public, le technicien de 51 ans ne peut qu’entendre ces diatribes à son encontre tant le virage Nord va le reprendre à l’unisson jusqu’à sa destitution. Le « deux ans » étant bien entendu remplacé par « trois ans » la saison d’après.

À la parole se joignent ensuite les banderoles. Là encore, on comprend pourquoi Lyon est le berceau de personnalités littéraires comme Saint-Exupéry, Ampère ou, plus récemment, Bernard Pivot. En matière de prose, on n’a rien à envier à personne entre Saône et Rhône. Durant l’année civile 2010, les bouts de tissu ou les pancartes en carton en lice pour le prix Tristan-Tzara – récompensant les meilleurs œuvres poétiques – vont se multiplier. Notamment lors d’un déplacement à Caen en août. Sur place, le parcage déploie ses plus belles productions. Déjà à l’époque, l’heure est aux métaphores motorisées avec, par exemple, la maxime suivante : « Claude Puel, l’homme qui transforme la formule 1 en voiture à pédale » . Quelques-uns des autres vers dédiés à l’entraîneur lyonnais sont aussi bien tournés : « On voulait du jeu, voire des titres, pas passer pour des pitres » , « Ton charisme est à la hauteur de ton palmarès lyonnais » , « Un pouvoir élargi, un budget surélevé, un échec non assuré » ou encore, clou du spectacle, « Les tables claudiennes, c’est notre histoire. Les fables claudiennes, c’est notre cauchemar » .

Les lions sont lâchés

Le pire dans tout ça ? Que la tempête ne soit même pas encore passée. Les heures les plus éprouvantes pour Claude Puel arrivent à la fin de l’année 2010 et vont sceller son départ proche. C’est d’abord l’histoire du sit-in des Bad Gones en virage Nord après avoir vu Dimitri Payet clouer l’OL au pilori dans le derby aller de la saison 2010-2011. Ne souhaitant pas quitter le stade, les ultras lyonnais font savoir à leur président qu’il leur doit une explication quant à la lente agonie de leur machine de guerre d’équipe. L’homme fort s’exécute, demande un soutien indéfectible au club – pas à Puel – et ironise sur la Playstation pour ne pas avoir à faire ce que tous attendent en tribunes : appuyer sur le bouton « siège éjectable » avant la fin de saison. Parce qu’en coulisses, plus personne ne le soutient. Il suffit pour cela de lire entre les lignes du communiqué du club au lendemain des faits : « Le président Aulas a discuté avec les supporters après le match contre Saint-Étienne, et l’on connaît donc leur position. On la respecte et on préfère ce mode d’expression calme, sachant que les supporters continuent d’affirmer leur soutien au club. » Plus déshonorant pour CP, tu meurs…

Quelques jours plus tard, après une victoire contre l’Hapoël Tel-Aviv, les Bad Gones font alors encore plus fort et déploient une opération commando jamais vue jusqu’alors en France. Le 2 octobre, une cinquantaine de banderoles avec l’expression « Puel démission » sont accrochés partout dans la ville à des points stratégiques et visibles : basilique Notre-Dame de Fourvière, place Bellecour, berges du Rhône, ponts enjambant les fleuves ou les autoroutes, tout y passe et l’affaire fait grand bruit. À tel point que Claude Puel pense alors même à un coup monté. « On voit que cela a été orchestré. Avec quels soutiens ? » , s’interroge-t-il dans Le Progrès dans la foulée, comme pour pointer du doigt sa direction le lâchant irrémédiablement. À l’image d’un Bernard Lacombe qui flingue alors à tout va, avec la bénédiction de Fleury Di Nallo, encore très influent dans les hautes sphères du club. « Au bout de quelques semaines, Fleury m’a dit :« Il va tuer ton club. »Trois mois plus tard, il m’a lancé :« Je me suis trompé. Je ne pensais pas que ce serait aussi rapide… » » , raconta même le bras droit du président dans L’Équipe.

Tags et menaces de mort

C’est finalement au printemps 2011 que l’emballement atteint son paroxysme, via un coup isolé, que chacun des groupes de supporters prendra soin de condamner, réalisé par un gamin de 17 ans dans le quartier de la Croix-Rousse. Profitant de la nuit, le Gone va s’emparer de sa plus belle bombe et tagger une dizaine d’inscriptions tout près du domicile de l’actuel coach des Aiglons, situé alors dans les hauteurs du 4e arrondissement. « Puel, je te hais. Puel je t’aurais » , « Puel, laisse pas traîner ton fils » ou « Nous oublie jamais sale traînée  » sont quelques-unes des écritures inscrites sur la pierre. L’orgueil personnel et familial est touché, le point de non-retour est atteint, tout comme le pic de la connerie humaine. Le chassé porte immédiatement plainte pour injures et menaces de mort et la fin de l’aventure est désormais scellée.

Malgré les centaines de kilomètres le séparant aujourd’hui de la promenade des Anglais, Claude Puel se sait attendu samedi. Si ça s’annonce prometteur sur le pré, le spectacle autour devrait encore virer à la catharsis de la tomate, comme au petit théâtre de Guignol. D’autant qu’en fin stratège qu’il est, Jean-Michel Aulas a déjà chauffé à blanc ses armées à grands coups de raffut médiatique. « Claude Puel est parti de Lyon en mauvais termes avec une appréciation extrêmement difficile à l’époque de l’ensemble de la communauté du football. Il a été l’entraîneur de Lyon pendant trois ans (2008-2011) et cela n’a pas été une bonne période pour l’OL » , a-t-il balancé en préambule. Avant de conclure sur la voix de l’apaisement : « Il n’y a pas de rancune, simplement une mémoire réactivée, mais qui ne jouera pas sur mon comportement. » Même si tout ça se soldait par une victoire niçoise et un succès tactique de l’adversaire de Rémi Garde, Jean-Mimi ?

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