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OL-OM : la soirée qui a mis en lumière la lâcheté du foot français

Par Mathieu Rollinger
4 minutes
OL-OM : la soirée qui a mis en lumière la lâcheté du foot français

En faisant poireauter l'ensemble des acteurs et des suiveurs de ce Lyon-Marseille, interrompu après l'agression de Dimitri Payet par les tribunes, les instances et autres dirigeants du foot français ont donné à voir une preuve terrible de leur incompétence face à ces situations de crise, mais aussi de leur lâcheté au moment d'assumer les conséquences.

Il est environ 20h50 quand les caméras se braquent sur Dimitri Payet, le visage enfoui dans la pelouse du Groupama Stadium de Lyon, les mains pressant son crâne endolori. Déjà ciblé par des premiers projectiles sur le premier corner de cet OL-OM, le meneur marseillais a cette fois été touché en pleine tête par une bouteille d’eau remplie. La mise en garde faite quelques secondes plus tôt par le speaker n’aura rien changé : le virage nord continue de vociférer sa haine — le communiqué de la LFP parle « d’insultes à caractère discriminatoire » — contre un homme à terre, et le match est interrompu. Dans cette scène malaisante, tout porte à l’indignation. Personne ne se rend à un match de foot pour assister à ça. Que ce soit aux tréfonds des divisions amateurs ou à un sommet de l’élite comme était censé l’être cet Olympico. Mais puisqu’il est question d’élite, on aurait justement attendu des instances un geste fort, une décision aussi nette que précise, une prise de position intransigeante face aux violences dans les stades. Au lieu de ça, ce head shot aura marqué à la fois la fin précoce d’une partie qui s’annonçait palpitante, mais aussi le début d’un sketch à montrer dans toutes les écoles d’incompétence.

Le jeu de la bouteille

Les joueurs renvoyés aux vestiaires après l’incident, le foot français privé de son affiche dominicale a dû se regarder dans les yeux. Et forcément, une fois envolée la magie que l’on espérait voir sur le terrain pendant 90 minutes, la réalité d’une farce qui est loin d’être terminée est bien plus crue. Pendant tout ce temps de flottement, chaque entité devant représenter l’autorité s’est défilée, se renvoyant la patate chaude comme on pouvait, pour rester dans la thématique, relancer la bouteille dans un jeu auquel on a tous joué pendant notre adolescence. Autour du cercle, il y a le préfet de région se dédouanant en affirmant que le sort du match est entre les mains de l’arbitre. Cette même institution régionale sera ensuite incriminée par la LFP, assurant de son côté tout faire pour lutter contre ce fléau venu des tribunes.

Une Ligue dont est notamment administrateur Jean-Michel Aulas, ici présent en tant que responsable du club recevant, minimisant la gravité des faits, favorable à une reprise du match alors qu’il prônait il y a peu l’intransigeance et de lourdes sanctions (notamment la pénalité de points pour le club hôte) dans ce genre de situation. Pourtant, au moment d’annoncer à 22h05 la reprise du match, le speaker de son formidable outil a préféré parler d’un « acte isolé » réalisé par un individu immédiatement interpellé. En effet, il est toujours plus simple de se défausser de la sorte plutôt que de se regarder dans une glace : d’autres projectiles ont atterri sur le terrain, des filets de sécurité étaient prévus, mais pas déployés, le service de sécurité était loin de Dimitri Payet et, surtout, ce n’est pas la première fois que le football français fait face à ces dérives.

Buquet final

C’est la sixième fois cette saison que la Ligue 1 est rattrapée par ses démons, et l’arbitre M. Ruddy Buquet était déjà présent à Nice, autre simulacre notoire. Sauf que ce dernier est cette fois sorti de sa réserve pour démêler ce sac de nœuds. « Ma décision in fine, c’était d’arrêter la rencontre. C’est une décision importante, mais je l’assume complètement », assurait-il sur Prime Video. Il en allait de l’intégrité des joueurs, mais aussi d’un spectacle qui était déjà foutu.

On peut ici louer l’effort de communication de l’arbitre de cette rencontre. Mais cela met surtout en lumière la lâcheté des hautes sphères, coincées entre le devoir de sévir et celui de mettre en valeur leur trésor. Il faut voir la LFP vanter « l’attractivité retrouvée sur les terrains » d’une Ligue 1 Uber Eats pénalisée par « ces graves incidents répétés qui détruisent l’image du championnat en France et à l’international ». Aux dirigeants les balbutiements ; aux joueurs, spectateurs, diffuseurs et téléspectateurs l’expectative puis la désolation. Sur les antennes de Prime Video, pimpant diffuseur d’un championnat qui pourtant essuie toujours les effets de la période Covid et du désastre Mediapro, le seul moyen de voir du foot ce dimanche soir était donc d’attendre un magnéto avec les plus beaux buts de l’après-midi. Certes, cette lucarne de Le Douaron avec Brest était magnifique, oui Amine Gouiri est un bijou qui rapportera gros à Nice, certes Metz et Bordeaux n’arriveront pas à se satisfaire d’une partie à six buts… C’est pourtant cette triste image qui restera. Et cette bouteille, finalement, donnera bien plus de maux de tête aux dirigeants du foot français qu’à Dimitri Payet.

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