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N’Zogbia, un Charles de Gaule
Charles au Congo, Charles en Angleterre, Charles en équipe de France. D'origine congolaise, Charles Nzogbia, né à Harfleur et formé au Havre, est devenu un homme en Angleterre. Il espère devenir un grand sous les couleurs de l'équipe de France. Coup de projecteur sur la patte gauche la moins médiatisée de l'Hexagone.
Quotas, bi-nationalité. Ces mots qui dérangent ont fait couler l’encre et la salive, des cours de récréations au Palais de l’Elysée, en passant par la totalité des rédactions curieuses de l’Hexagone. À une heure où couleur de peau et choix internationaux sont au centre des débats, Charles N’ZEurogbia se fait discret. Comme souvent. Pourtant, son CV a doit quoi interloquer. Oui, Charles, d’origine congolaise, est noir. Oui, Charles aurait pu jouer la CAN avec le maillot du Congo sur les épaules, ou la Coupe du Monde sous les ordres de Fabio Capello. Pourtant, si la tendance est aujourd’hui à la délocalisation des talents, la patte gauche de Wigan s’est toujours battue pour être sélectionnée en équipe de France. Ancien cadre des Bleuets, N’Zogbia veut s’imposer en EDF comme il a su s’imposer en Angleterre, où ses entraîneurs se sont vite rendus à l’évidence : le joueur est pétri de talent.
Né en France, formé au Havre, devenu homme en Angleterre
Entre le Havre et l’Angleterre, tout est une histoire de ferry. Comme beaucoup de crac du ballon rond, Charles N’Zogbia, à peine majeur, est un gamin courtisé. Bien dans ses baskets au HAC, où il a été formé, le joueur souhaite signer un contrat pro qui tarde à arriver sur son bureau. Les dirigeants havrais tergiversent, et comme souvent, de l’autre côté de la Manche, on flaire la bonne affaire. Cette fois-ci, pas de Wenger ni de Ferguson, c’est Bobby Robson himself qui saute sur l’occasion. Le Sir n’est pas déçu. Charles mûrit. Si de plus en plus de jeunes talents quittent la France direction l’Angleterre la tête dans les étoiles, les fesses dans l’Eurostar, le portefeuille déjà plein, Charles lui, est allé grandir au pays de ses idoles. Déjà doué, quasiment prêt à en découdre avec les sympathiques défenseurs anglais, Charles a, en quittant la France, pu bénéficier d’un peu de calme et de tranquillité. Une denrée rare voire rarissime lorsqu’on sait qu’au même moment, la génération du dessous, le fameux cru 1987, est déjà surexposée médiatiquement. Dans l’ombre, Charles fait ses gammes, profite du climat paisible et des opportunités qui s’offrent à lui. C’est le début d’une histoire d’amour franco-britannique à la Birkin et Gainsbourg. Muse efficace, Nzogbia récite à merveille les partitions pianotée par ses entraîneurs et rentre dans le cœur des groupies. Jason Taylor, président de l’association des supporters du Wigan Athletic aime sa rockstar : « Charles est un joueur sûr et régulier. Il est plein de qualités et donne toujours tout pour son équipe. Il ne triche jamais. Il est le joueur préféré des supporters » . Adulé par les fans, Charles tape également dans l’œil des entraîneurs. Longtemps courtisé par la sélection congolaise, N’Zgobia, qui réside en Angleterre depuis assez longtemps pour porter le maillot des Three Lions a été sollicité par Fabio Capello quelques mois avant la Coupe du Monde sud-africaine. L’occasion est belle, l’offre difficile à refuser. Charles réfléchit mais garde le cap. Ce sera non. Non à l’Angleterre, non à l’Afrique du Sud. Son truc à lui, c’est les Bleus.
Des Bleus à l’âme
La patience et l’acharnement paient toujours. Le 5 août dernier, Charles N’Zogbia fait parti de la liste de Laurent Blanc, en révolution altermondialiste après le bordel Knysna. Enfin récompensé, l’homme providentiel de Wigan va connaître des débuts galères en bleu. Première sélection face à la Norvège, première défaite. N’Zogbia ne jouera qu’une mi-temps avant d’être remplacé par Hatem Ben Arfa, qui ouvrira le score trois minutes après son entrée. Le baptême est difficile. Le retour à la réalité presque insupportable. Une série de transferts avortés laisse Charles à Wigan. La saison s’annonce galère et Clairefontaine devient semaine après semaine, un mirage dans le désert des regrets. Embourbé dans une pénible lutte pour le maintien avec son club, le Français suivra avec attention les listes et la reconstruction de la maison bleue, sans jamais y figurer. Incompréhensible pour Jason Taylor : « Il est notre meilleur buteur cette saison. C’est un joueur clé de notre maintien en Premier League. On espère qu’il restera, mais le club a déjà annoncé que si une grosse offre arrivait, il quitterait le club pour un autre qui disputera la Coupe d’Europe la saison prochaine. Honnêtement, je pense qu’il a largement le potentiel » . Un potentiel qui a donc toujours échappé à la Ligue 1. Après sept saisons et plus de 200 matches en Premier League, Charles se verrait bien quitter le club et offrir ses talents à un grand d’Europe. Annoncé à Marseille l’été dernier, le gaucher est désormais courtisé par Tottenham et Liverpool. Prophète en son pays d’adoption, le Prince Charles pourrait donc ne jamais rentrer au bercail. Une raison de plus pour être brillant sous la tunique bleue dès ce soir.
Par Swann Borsellino, avec Léo Ruiz.
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