- France
- Tempête Alex
« Notre stade ressemble à une piste d’aéroport »
L'arrière pays niçois a été lourdement touché par la tempête Alex, avec l'équivalent de trois mois de précipitations en l'espace de 24h entre vendredi et samedi. Bilan, quatre personnes sont décédées et plusieurs centaines ont dû être évacuées. Un drame qui a également fortement touché les clubs de la région, dont certains ont perdu l'intégralité de leurs infrastructures. Retour sur ce désastre avec des membres de trois clubs frappés de plein fouet.
Casting
Florian Guigonis : Président du Club Sport VésubieMichel Gilli : Président de l’AS RoquebillièreFabien Bernaud : Trésorier, entraîneur et joueur à Sospel
Pouvez-vous nous décrire ce qu’il s’est passé ce week-end ?Florian Guigonis : C’était le pire depuis qu’il y a des données météo, il n’y a jamais eu autant de tombée d’eau en 24h. On n’est que 1 000 habitants sur la commune, et on a perdu la moitié des maisons, donc on ne pense pas au football. Il y a des personnes recherchées, mais croisons les doigts qu’il n’y ait personne de notre club.Fabien Bernaud : Honnêtement sur Sospel, on a vraiment été bénis pour une fois. C’est vraiment du costaud ce qu’ils ont eu à Saint-Martin et à Breil-sur-Roya.
À quel point vos clubs ont-ils été touchés ?FG : Nous, on a été très fortement touchés, le stade ressemble à une piste d’aéroport. On n’a pas d’électricité, pas d’eau, on vient à peine de récupérer la communication. On est en vie, c’est déjà ça.Michel Gilli : Je ne peux pas me déplacer jusqu’au stade. Je sais qu’il y est toujours, mais il y aurait pas mal de centimètres de boue. Mais vous savez, si vous ne voyez pas les choses de visu, chacun donne sa version. L’un dit qu’il n’y a plus de stade, l’autre que c’est juste de la boue.FB : Nous à Sospel, à part le fait que le stade soit réquisitionné pour héliporter, il n’y a aucune conséquence. La vallée de la Bévéra est beaucoup moins touchée. À titre de comparaison, apparemment Breil-sur-Roya n’a plus de stade, à Saint-Dalmas il n’est plus fonctionnel. C’est vraiment une bonne galère.
Qu’en est-il du football dans tout ça ? Dans quel état d’esprit sont les joueurs ?FG : Niveau football ça va être dur, c’est un désastre. Là pour l’instant, je n’y pense même pas. C’est de la survie, on va dire. Il y a des joueurs qui ont été évacués en hélicoptère, ils ont été un peu choqués.MG : Cette catastrophe a été un vrai choc, je pense que le football risque d’être mis entre parenthèses. Il y a déjà tous les problèmes matériels, le réseau d’eau est sommaire, pour se nourrir c’est la mairie qui donne à manger…
Vous n’avez plus moyen de jouer ni de vous entraîner ?FG : Non, il n’y a plus rien. Déjà qu’on était un petit village et que c’était un exploit d’avoir une équipe d’entreprise et une équipe en U15. Il y a plus urgent que de refaire des installations, les trois quarts du village dorment par terre dans des gymnases. MG : On peut chercher un autre terrain, mais le problème c’est qu’avec les routes, tout ça, il faut qu’on puisse se déplacer. On ne peut même pas aller de Saint-Martin Vésubie à Roquebillière en voiture.
Comment envisagez-vous la suite de votre saison ?FG : Pour jouer, il faudrait redescendre sur Nice. Et là, à part en hélicoptère, il n’y a pas moyen. Pour au moins un mois voire plus, le football, ce n’est pas la peine d’y penser. MG : Sincèrement, je pense que ça risque d’être une année blanche. Peut-être dans un mois ou deux quand les moyens de communication, les routes seront rétablis. Et pour le terrain, ce ne sera pas la priorité de la mairie, ce qui est normal.FB : L’avantage pour nous en n’étant pas en FFF, puisqu’on s’est mis en FSGT, c’est que nos matchs sont déjà à domicile sur Nice. On n’a que des clubs de quartier ou proches de Nice contre nous, à part Saint-Martin de temps en temps quand ils étaient en FSGT. Du coup, on n’est pas affectés par ça.
Vous avez des nouvelles du district ou de la Fédération ?FG : Pour l’instant, je n’ai eu aucune nouvelle. Peut-être qu’ils ont appelé le vice-président qui est en sécurité un peu plus bas, je ne sais pas.MG : Le district a essayé de m’appeler, je le sais, mais ils ne pouvaient pas me joindre parce qu’on récupère juste les communications.
La solidarité s’organise-t-elle par le biais de vos clubs ?FG : Il y a une énorme solidarité. J’ai un joueur qui travaille avec moi, on est sur le pont depuis trois jours, sans eau et sans électricité. Il y a eu une entraide entre joueurs, notamment plus bas dans la vallée. On a fini chez l’habitant. Dans les autres villages, ils ont pu s’entraider, en récupérer un ou deux.FB : La solidarité va se mettre bien en place, j’espère en tout cas. Avec nos clubs amis, on essaie de s’entendre parce qu’on est en difficulté dans les vallées. C’est un peu foutu pour eux, là. Ou en tout cas, ce n’est vraiment pas la joie. Ce qui risque d’arriver, c’est qu’on aille les soutenir, histoire que leur club soit encore viable le temps qu’ils aient de nouveau un stade, s’ils arrivent à en avoir un.
Cette tempête va-t-elle avoir des conséquences économiques pour vos clubs ?MG : Pour les conséquences financières, il n’y en aura pas trop. Le club avait une petite réserve, et puis ce sont que des bénévoles, donc ce n’est pas le problème principal. Le problème, c’est de pouvoir se déplacer et de retrouver le punch pour le faire. Là, on a d’autres soucis avec ce qu’on a traversé.
Propos recueillis par Tom Binet