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Nos régions ont du talent : Occitanie

Tous propos recueillis par Nicolas Jucha
Nos régions ont du talent : Occitanie

On continue la revue d'effectif de ce que les régions françaises ont de mieux à offrir question football. Histoire de mieux se familiariser avec le nouveau découpage administratif et ce que cela implique pour le ballon rond. Nouvelle étape en Occitanie, où il n'y a pas que le rugby. Enfin presque.

« Le foot, c’est le second sport ici, nettement derrière le rugby. Il suffit de regarder la densité de clubs de haut niveau en rugby alors qu’en football, le gros des clubs est plutôt en niveau CFA. Il y a plus de ferveur en rugby, les stades sont pleins en Top 14 et en Pro D2, alors qu’à Toulouse et Montpellier en Ligue 1, cela sonne assez vide. » Entraîneur des U15 à Colomiers, Yohan Garric n’a pas peur de dire qu’il pratique un sport secondaire en Occitanie. Voire qui ne cadre pas avec elle : « Les valeurs du rugby collent mieux à la région, un Loulou Nicollin par exemple, cela passe très bien en rugby, où l’on se dit plus directement les choses. » Il faut dire que la proximité de Toulouse peut créer un petit complexe : ce n’est pas demain que les Violets gagneront une Coupe d’Europe comme leurs cousins de l’ovalie. Mais la généralisation d’une prévalence du rugby sur toute l’Occitanie ne tient pas forcément. À Montpellier, le patron du centre de formation, Henri Stambouli, considère que dans sa zone « un jeune qui peut devenir sportif de haut niveau se tournera le plus souvent vers le football, même si c’est vrai qu’ailleurs cela peut être le rugby » . Manager général de Rodez, Grégory Ursule confirme que le nouveau découpage régional peut être trompeur, car pour lui, à Rodez dans l’Aveyron, le ballon ovale « n’est que le cinquième sport, loin derrière le foot » . De quoi espérer trouver quelques perles dans un bassin régional qui approche les six millions d’âmes ? « On a beaucoup de licenciés senior, précise Ursule, et donc notre pyramide des âges ressemble plus à un cylindre, il faut que l’on travaille sur la venue de plus de jeunes au foot. » Et aussi sur le développement d’une pratique plus urbaine et spontanée, pour le moment l’apanage de la région toulousaine.

Le foot urbain de Toulouse, l’esprit famille de Montpellier

Yohan Garric, de Colomiers, explique le contexte : « Autour de Toulouse, il y a beaucoup de petits clubs où l’on retrouve des gamins très techniques, qui pratiquent un vrai football de quartier comme en Île-de-France. Ces gamins finissent souvent attaquants dans leur club, et pour le reste des équipes, on n’a pas forcément des génies, mais on a des joueurs courageux qui sont attachés à leurs couleurs. C’est un peu cela la caractéristique majeure du joueur originaire d’Occitanie, c’est qu’en général, il est attaché à son équipe. » Une particularité qu’un club comme Montpellier met en avant : esprit familial, attachement aux couleurs… Mais si le portrait-robot du joueur occitan n’est ni Messi, ni Ronaldo, de nombreuses structures professionnelles sont à l’affût pour dénicher l’oiseau rare. « On est en concurrence avec Toulouse, Monaco, Marseille, Lyon, Saint-Étienne, qui ne sont pas très loin géographiquement » , explique Stambouli. Qui doit aussi composer avec « les clubs étrangers qui viennent suivre nos gamins très tôt, dès douze ans » . Avec pour ambassadeurs des « recruteurs français qu’ils emploient pour être leurs yeux sur place » . Un classique sur le territoire français, qui a débouché sur quelques débauchages médiatisés comme ceux de Paul Pogba (Manchester United) et Antoine Griezmann (Real Sociedad), pour citer les réussites, ou Gaël Kakuta (Chelsea) pour mentionner un gâchis. Stambouli relativise néanmoins la menace : « On est quand même protégés par les lois FIFA qui interdisent à un gamin de se déplacer en Europe avant seize ans. Et s’ils prennent des jeunes, ils doivent les faire signer pro, alors que nous, on a les contrats classiques. »

Joue-la comme Lucas Tousart

Pour Yohan Garric, les recruteurs étrangers travaillent essentiellement pour des clubs espagnols, comme le FC Barcelone, « avec des collaborateurs venus voir quelques jeunes joueurs très talentueux, mais plus pour lancer un processus d’observation et de suivi qu’un vrai recrutement. » Pour lui, de toute façon, la plupart des gamins du coin, s’ils sont réalistes, donnent la priorité à Toulouse, car « le club a une vraie image d’équipe qui lance des jeunes » . Du côté de Rodez, c’est en revanche Montpellier qui fait office de référence selon Ursule. « Chez nous, cela manque d’émulation, tous les meilleurs jeunes d’Aveyron sont chez nous dès les U13, et après, l’étape la plus évidente c’est Montpellier. » Pour lui, le football de sa région ne progressera qu’à deux conditions : le développement d’une pratique plus spontanée – « car actuellement il n’existe qu’une pratique encadrée, fédérale » – et la signature de conventions avec les écuries professionnelles pour que les talents locaux comme Lucas Tousart ne partent plus sans contrepartie. « Même si on est très content qu’il soit passé pro à Valenciennes, devenu champion d’Europe U19 et qu’il évolue maintenant à Lyon. » Rugbyman, il n’aurait pas eu à s’exiler…


Les grands clubs formateurs régionaux : Toulouse et Montpellier

En Occitanie, on n’a pas la ferveur de la région PACA, la densité de l’Île-de-France ou la force populaire des Hauts-de-France. Mais on a un esprit et deux vrais clubs formateurs. D’un côté Toulouse, qui selon Grégory Ursule, « localise très étroitement son recrutement, car ils bénéficient d’une part d’une grosse densité de population, et d’autre part d’une pratique très urbaine, un peu comme sur le modèle francilien. » De l’autre côté, il y a Montpellier et un recrutement qui porte sur « tout le Sud de la France, de la région PACA à l’Occitanie » , dixit Stambouli. Un club qui profite notamment à plein de l’image négative de l’OM question formation. « Sur les U17 et U19, on a 30% de joueurs issus de PACA, 30% de l’ancienne région Midi-Pyrénées, et 30% du Languedoc-Roussillon, donc autour de 60% pour l’Occitanie. C’était notre base de recrutement traditionnelle, même si cette année on s’est ouvert à l’ensemble de la France. » Ce qui veut dire essentiellement regarder sur Paris, comme le TFC et le reste des centres de formation français, car « c’est la logique mathématique. Douze millions d’habitants, un seul club en première division qui ne peut pas tout absorber, forcément, c’est un superbe vivier, comme Lyon désormais, la deuxième région la plus productive en joueurs. »

Paris, Lyon, et déjà avant Marseille, à l’image de Bryan Dabo formé au MHSC, c’est l’apport « du foot de quartier » dans les profils du centre. Même si « notre priorité, notre base, cela doit rester la région » tempère Henri Stambouli. Pour des raisons identitaires et pratiques : « la base de notre équipe, de notre centre, doit être régionale, car on a une particularité, on a un mode de vie, un mode de fonctionnement. Et puis on sait que les gosses qui partent loin de chez eux trop jeunes, avant quinze ans, c’est 90% d’échecs, même si dans les 10% restant on peut avoir un Griezmann. Mais c’est rare, car il y a un vrai déracinement, cela demande un accompagnement très spécifique. » Grégory Ursule, de Rodez, délimite les plates bandes de chacun : « Depuis longtemps, c’est Montpellier qui quadrille le plus la région avec ses recruteurs, Toulouse est sur du très local et complète avec des recruteurs en Île-de-France. Clermont se spécialise dans la post-formation en prenant des joueurs de 18 ou 19 ans qui n’ont pas percé dans les plus gros clubs, c’est une manière de récupérer de bons joueurs pour la Ligue 2. » Bientôt, l’OM viendra rebattre les cartes avec une nouvelle virginité de club formateur aux ambitions européennes ? Henri Stambouli, qui a officié pour le centre de formation phocéen, se dit qu’il a le temps d’avoir peur : « Marseille qui deviendrait un club formateur, ce serait une difficulté en plus pour nous, mais pour y arriver, il va leur falloir du temps. On a encore l’argument massue de dire aux parents : « Regardez combien de joueurs formés au centre évoluent dans notre équipe première. Marseille doit recruter les meilleurs joueurs, et les gamins de treize ans qu’ils prendraient maintenant, ils ne seront pas prêts avant cinq-six ans. Nous, on a un modèle économique qui parle pour nous. On doit former des jeunes et ensuite les vendre dans un plus grand club. Le gamin qui a du talent, il ne peut pas échouer chez nous. »


L’équipe type :

Lafont – Clichy, Deplagne, Yanga-M’Biwa, Diop – Rabiot, Capoue – Cabella, Belhanda, Sissoko – Delort


La liste des 23 :

Gardiens : Alban Lafont (Toulouse), Rémi Vercoutre (Caen), Goeffrey Jourdren (Montpellier)

Défenseurs :Mathieu Deplagne (Montpellier), Dennis Appiah (Anderlecht), Gaël Clichy (Manchester City), Cheick M’Bengue (Saint-Étienne), Mapou Yanga-M’Biwa (Lyon), Issa Diop (Toulouse), Mathieu Peybernes (Lorient), Daniel Congré (Montpellier)

Milieux : Adrien Rabiot (PSG), Étienne Capoue (Watford), Benjamin Stambouli (Schalke 04), Lucas Tousart (Lyon), Rémi Cabella (Marseille), Franck Tabanou (Grenade), Younès Belhanda (Nice), Jonas Martin (Betis Séville), Moussa Sissoko (Tottenham), Yann Jouffre (Metz)Attaquants : Andy Delort (Toulouse), Nicolas de Préville (Lille), Enzo Crivelli (Bastia), Rony Rodelin (Caen)


Dans cet article :
Nos régions ont du talent : Pays de Loire
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Tous propos recueillis par Nicolas Jucha

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