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Nos régions ont du talent : Bourgogne-Franche-Comté

Par Nicolas Jucha
7 minutes
Nos régions ont du talent : Bourgogne-Franche-Comté

On continue la revue d'effectif de ce que les régions françaises ont de mieux à offrir question football. Histoire de mieux se familiariser avec le nouveau découpage administratif et ce que cela implique pour le ballon rond. Nouvelle étape en Bourgogne-Franche-Comté, où le bonnet de Guy Roux reste une référence.

La Bourgogne-Franche-Comté n’a pas la plus grande population de France – onzième région sur dix-huit – et encore moins la plus grande densité, seizième sur dix-huit. Difficile donc d’y voir un vivier naturel de talents comme peuvent l’être la région parisienne ou l’Auvergne-Rhône-Alpes. Mais aux pays des chablis et du comté, la notion de terroir a trouvé son écho dans le football. L’AJ Auxerre et le FC Sochaux ont été parmi les premiers à se lancer dans la formation comme on la connaît aujourd’hui. « Sochaux, comme Auxerre, ont été des précurseurs » , estime Olivier Baudry, ancien pilier du FCSM et aujourd’hui responsable de la pré-formation sur place. « Nous sommes des clubs formateurs historiques, cela fait partie de notre ADN, j’aime bien le dire ainsi. Même quand Sochaux ou Auxerre étaient en Ligue 1 et européens, ils formaient. » On parle d’une belle époque avant l’arrêt Bosman, quand les deux clubs de la France profonde du foot s’offraient même des exploits continentaux. « En Ligue 2, Auxerre et Sochaux doivent encore former, on n’est pas moins bons qu’avant, c’est juste qu’on a moins d’exposition » , assure l’ancien milieu de terrain. La preuve ? « Sochaux, c’est victoire en Gambardella 2015 et demi-finale en 2016. » Net et précis. À leur palmarès, les deux institutions comptent une dizaine d’internationaux français – autant d’étrangers – et pas des moindres : deux champions du monde (Charbonnier, Diomède), un champion et un finaliste d’Euro (Ferreri, Sagna), une légende de Manchester United (Cantona), deux vainqueurs de C1 (Boli, le Djib) dont un buteur en finale (Boli) pour l’AJA, deux vainqueurs de l’Euro (Bats, Genghini), deux vainqueurs de C1 (Sauzée, Mathieu) et deux ex-futurs Zidane (Meriem, Martin) pour les Lionceaux.

« Vis-à-vis des parents, on a plein d’arguments. » Olivier Baudry (responsable préformation à Sochaux)

En 2016 néanmoins, les deux anciennes places fortes de la formation française ont été reléguées au second plan, essentiellement parce qu’elles n’ont pas réussi à prendre le virage économique du football post-Bosman. Ou tout simplement pas su capitaliser sur leur héritage, comme dans l’Yonne où Guy Roux n’a pas su, ou voulu, façonner un successeur pour être le Sir Alex Ferguson de Bourgogne. Et aujourd’hui, AJA comme FCSM végètent en Ligue 2, quand Dijon parvient à faire des immersions dans l’élite, sans forcément se substituer aux deux historiques comme roi de la formation locale. Ce qu’Olivier Baudry explique par des bases solides. « Vis-à-vis des parents, on a plein d’arguments, notamment le fait qu’on donne du temps de jeu aux jeunes en équipe première, qu’on a des résultats chez les jeunes, mais aussi qu’on a le potentiel de revenir rapidement en Ligue 1 et d’y faire jouer nos jeunes. » Le rachat du club par Ledus, le fabriquant de LED chinois, n’est à ce titre pas anodin : plus qu’un investissement pour faire de Sochaux un futur concurrent du PSG en Ligue 1, les repreneurs asiatiques ont surtout mis la main sur un fleuron de la formation française, un secteur dans lequel la Chine cherche des sources d’inspiration. Jusqu’au rachat du jouet de Peugeot, l’Empire du milieu avait dû se contenter de partenariats sans résultat avec des écuries européennes comme l’Ajax, Everton ou même Le Mans. Et pourrait donc faire du Doubs son bureau d’études en vue de façonner une équipe nationale compétitive ? Des préoccupations dont Olivier Baudry reste encore très loin. Pour lui, c’est surtout système D et travail de terrain au quotidien. « On a des réseaux et des partenariats/filiations avec des clubs locaux, mais ce ne sont que des formalisations d’échanges existant depuis longtemps et basé sur du relationnel, entre des hommes… » Et qui permettent de repérer les meilleurs talents du coin. Car pour Sochaux, pas question de dépenser à tort et à travers pour un casting national, voire international. Pas la philosophie locale, mais aussi pas dans les cordes financièrement. « Un club de foot donne en moyenne 10% de son budget au centre de formation. À Sochaux, on a un budget d’environ 18 millions dont 2,5 à la formation. On est peut-être un peu au-dessus de la moyenne. On a perdu des moyens avec la descente en Ligue 2, mais la formation reste essentielle pour nous. »

« Sochaux et Auxerre, leur histoire c’est de l’acquis » Vincent Mathey, directeur du Pôle espoirs Dijon

Ce qui vaut aussi pour Auxerre, dont le modèle économique n’a finalement pas tellement changé avec la baisse des ambitions sportives du groupe professionnel. Directeur du pôle espoirs de Dijon, Vincent Mathey voit presque un avantage dans la présence des deux anciens mastodontes en Ligue 2. « Cela facilite la sortie de jeunes joueurs, car pour un club de division inférieure, il n’y a rien de plus rentable que le centre de formation. » Pour Olivier Baudry, « un club de Ligue 2 avec une ossature de jeunes formés au club en équipe première est clairement meilleur formateur qu’un club de Ligue 1 qui préfère recruter à l’extérieur » . De là à faire de la Bourgogne-Franche-Comté une capitale de la formation française, peut-être pas. Car en 2016, l’Olympique lyonnais est devenu une référence intouchable. Mais Vincent Mathey se gargarise néanmoins de voir en Auxerre et Sochaux, plus que dans Dijon, des clubs parfaitement adaptés à la vie entre Ligue 2 et Ligue 1, de part leur envergure et leur identité. « Sochaux et Auxerre, leur histoire, c’est de l’acquis. Ils ont aussi gagné des Gambardella récemment, c’est un gage de qualité de la formation en Bourgogne-Franche-Comté, surtout que ces deux clubs ont de superbes outils de travail. » Mais les deux entités doivent continuer à évoluer, à chercher le travail de pointe, « car pour les tops joueurs, chez les jeunes, la force économique et le prestige européen sont des arguments majeurs. » Que l’AJA et le FCSM n’ont plus. « Nous, on doit compenser par autre chose, un projet global qui allie le sportif au scolaire. »

Auxerre et Sochaux, complémentaires plus que rivaux

Deux gros clubs formateurs dans la même zone administrative selon le nouveau découpage des régions, on pourrait facilement imaginer une rivalité frontale. Qui n’existe pas selon Vincent Mathey, car « l’AJA a un impact sur l’Yonne et la Nièvre, mais leur recrutement se fait aussi en Île-de-France. Dans notre région, c’est plus Dijon, Sochaux, voire Lyon qui ont une influence, cela se ressent pour nous au pôle espoirs. » Pour le dirigeant, Sochaliens et Auxerrois ont donc des territoires de recrutement bien distincts, sauf quand il s’agit de tenter sa chance pour « un top joueur à l’échelle nationale » . Si Sochaux comme Dijon sont très locaux, voire régionaux pour les Lionceaux, l’AJA de son côté n’hésite pas à aller taper dans la mine d’or qu’est l’Île-de-France. « Le vrai concurrent de l’AJA sur son sol, c’est l’ESTAC, qui n’est pas loin de la ville de Sens, un vivier intéressant, car cela ressemble à la région parisienne, avec des cités, du foot de rue, et un football qui peut faire office de moyen de progression sociale » , estime Mathey. À Sochaux, Olivier Baudry consent qu’on regarde parfois du côté de la région parisienne pour compléter les effectifs, mais que l’idée générale reste de « de ne louper personne dans notre bassin » . Autant par philosophie que par pragmatisme. « Entre un joueur moyen de la région et un joueur un peu meilleur, mais qui vient de loin, on opte pour le joueur local, car il y a moins de risques d’échec, on pourra l’amener plus loin. Parce qu’on considère aussi que c’est important de bosser longtemps avec eux. Si on prend à l’extérieur, forcément, on passe moins de temps à le former, car on le récupère plus tard, après quinze ans le plus souvent, et qu’il appréhende moins bien les valeurs du clubs et de la région. Si ce n’est pas un objectif ou une finalité, c’est quand même un avantage d’avoir des joueurs auxquels les supporters peuvent s’identifier, des joueurs qui ressentent en profondeur ce qu’est le club pour lequel ils jouent. À une époque, on a eu Frau, Pedretti… Et c’est à cette époque que l’on a eu de très bons résultats. À Sochaux, notre salut passe par la formation. » Locale.

L’équipe type

Nardi – Roussillon – Mathieu, Zouma, Sagna – J.Martin, Diaby, Boudebouz – Hamouma, Griezmann, Ntep

La liste des 23

Gardiens : Paul Nardi (Rennes), Matthieu Dreyer (Caen), Maxence Prévost (Sochaux)

Défenseurs : Jérôme Roussillon (Montpellier), Aly Cissokho (Aston Villa), Jérémy Mathieu (Barcelone), Kurt Zouma (Chelsea), Younès Kaboul (Watford), Philippe Mexès (libre), Bacary Sagna (Manchester City), Romain Genevois (Caen)

Milieux : Abou Diaby (Marseille), Jonas Martin (Betis Séville), Clément Chantôme (Rennes), Valentin Rongier (Nantes), Ryad Boudebouz (Montpellier), Romain Hamouma (Saint-Étienne), Romain Alessandrini (Marseille), Sanjin Prcić (Rennes)

Attaquants : Antoine Griezmann (Atlético de Madrid), Paul-Georges Ntep (Rennes), Jérémy Ménez (Bordeaux), Mevlüt Erding (Guingamp)

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