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Non, Javier, tu ne vas pas nous lâcher comme ça !
Hier après-midi, Javier Zanetti est sorti sur civière, lors du match entre Palerme et l'Inter Milan. La sanction est cruelle : rupture du tendon d'Achille. À 39 ans, et avec près de 8 mois de rééducation, c'est quasiment une fin de carrière pour le capitaine nerazzurro. Non, on ne veut pas y croire.
Francesco Totti est le premier à ne pas vouloir y croire. « Eh, oh, Javier, ne fais pas le con. Je te préviens, je t’attends pour le prochain Roma-Inter. Le fanion des équipes, de toute façon, je ne peux l’échanger qu’avec toi » , a écrit le capitaine de la Roma sur son blog officiel. Preuve que la blessure de Javier Zanetti, hier, a été un crève-cœur pour tous ceux qui aiment le football, et pas seulement les tifosi de l’Inter. Car Zanetti représente à lui seul le joueur fidèle et indestructible. Celui qui ne vieillit pas, qui court toujours autant que lorsqu’il avait 20 ans. Le capitaine de toutes les batailles, celui qui a connu les pires heures de l’Inter, mais aussi, et surtout, les plus belles. Du 5 mai 2002, jour où l’Inter perdit incroyablemet un Scudetto déjà gagné au Stadio olimpico, jusqu’au 22 mai 2010, quand l’Inter monte sur le toit de l’Europe en battant le Bayern en finale de C1. Javier était toujours là. Hier, tout le monde a vite compris. Car l’Argentin n’est pas du genre à faire la comédie. En 20 ans de carrière, il n’en a jamais fait. Lorsqu’il s’est pris la tête à deux mains et s’est écroulé par terre, on a su que c’était terminé. Terminé pour sa saison. Et, peut-être, terminé pour sa carrière. Non, Javier, ça, ce n’est pas possible.
Changer les pneus
Juste après la fin du match, le diagnostic tombe. Rupture du tendon d’Achille. Entre 6 et 8 mois d’absence pour ce qui est considéré comme l’une des pires blessures pour un joueur de football. Oui, sauf que se blesser lorsque l’on a 22 ans, c’est une chose. Se blesser gravement lorsque l’on en a 39, c’est une autre affaire. Pourtant, Zanetti s’est tout de suite voulu rassurant. Lorsqu’il a quitté l’hôpital, dimanche soir, en béquilles, il a assuré que sa carrière n’allait pas s’arrêter là. « Non non, bien sûr que non. Après tant de kilomètres, j’avais juste besoin de changer mes pneus, et ensuite, je repars. Mon objectif, c’est de revenir encore plus fort qu’avant » , a-t-il assuré aux micros de SkySport. Rassurant, oui, mais pas complètement non plus. Car au final, Zanetti a quasiment oublié ce que voulait dire « combattre une grave blessure » . C’est simple : depuis son arrivée en Italie, lors de l’été 1995, il n’a jamais connu une blessure qui l’ait tenu éloigné des terrains plus de trois mois.
L’an dernier, il s’était blessé lors d’un match entre la Fiorentina et l’Inter, mais n’avait mis que deux semaines pour revenir. Pour retrouver une « vraie » blessure musculaire, il faut remonter à un Brésil-Argentine de juillet 2000, un claquage à la cuisse. Deux mois et demi plus tard, il faisait son retour avec l’Inter. Il n’y a d’ailleurs qu’à regarder ses statistiques pour confirmer cette incroyable force physique : son plus petit total de matchs disputé sur une saison remonte à la saison 2005-06, 25 apparitions. Depuis, les chiffres affichent des 37, 38, 34 ou 35. Ahurissant. Voilà peut-être pourquoi, lorsque Javier Zanetti s’est blessé, hier, c’est tout le football italien qui s’est uni autour de l’homme aux 845 matchs avec le maillot de l’Inter. De Roberto Baggio à Marco Di Vaio, en passant par Domenico Criscito, Giuseppe Rossi (bien placé pour parler de blessures) ou encore Simone Pepe : tous ont envoyé des messages de soutien au capitaine. Un soutien dont il aura grandement besoin pour revenir.
De vrais adieux dignes de ce nom
Le plus dingue, dans tout ça, c’est que malgré cette grave blessure, Javier Zanetti continue de penser avant tout à l’équipe. « La chose que je désire le plus, c’est de retrouver mes coéquipiers. Je suis tellement triste de ne pas pouvoir les aider en cette fin de saison. Mais je suis confiant, je suis sûr qu’ils peuvent se qualifier pour l’Europa League » , a-t-il affirmé. L’Inter avant tout, le maillot nerazzurro comme une seconde peau. Voilà aussi pourquoi les tifosi de l’Inter ont si peur. Zanetti est plus qu’un joueur, plus qu’un capitaine. C’est une légende, qui porte en lui l’essence du club. Sa fabuleuse longévité est un exemple pour tous les jeunes qui font leurs premiers pas avec ce maillot noir et bleu. Devoir lui dire « ciao » , comme ça, sans s’y être préparé, serait un véritable coup de massue, bien pire encore qu’un départ au mercato d’un Ronaldo, d’un Vieri, d’un Eto’o ou d’un Sneijder.
Un jour viendra où il faudra pourtant bien se résigner. Zanetti arrêtera. Comme Totti arrêtera. Comme Pirlo et Buffon arrêteront. Comme Inzaghi, Maldini et Baggio ont arrêté. Mais pas de cette manière-là. Pas sur une blessure toute nulle, sur un tacle d’Aronica, lors d’une défaite 1-0 sur la pelouse d’un club relégable. Zanetti a toujours donné le meilleur. Il mérite donc le meilleur pour sa sortie de piste. Alors, Javier, sache-le, le football t’attendra. 8 mois, ou même plus s’il le faut. Peu importe si d’ici là, l’Argentin aura fêté ses 40 ans (le 10 août prochain). Il reviendra, peut-être plus fort, peut-être moins, mais il reviendra. Et il nous offrira des adieux dignes de ce nom, à la hauteur de l’homme, dans un San Siro plein qui sortira les mouchoirs, comme le Juventus Stadium avait sorti les mouchoirs pour Del Piero la saison dernière. Oui, il reviendra, le bougre. Parce qu’il ne peut juste pas s’arrêter sur ça. « Pas comme ça, pas après tout ce que tu as fait » , comme dirait un illustre commentateur.
Eric Maggiori