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Non, Hachim Mastour n’est pas perdu pour le football
Érigé au rang des futures stars du football mondial, Hachim Mastour n’est jamais parvenu à répondre aux attentes. Pire encore, l’ancien chouchou de Silvio Berlusconi a peiné à se faire une place au sein d’une équipe professionnelle. Mais depuis un an, l’international marocain reprend plaisir, chez lui. Et c'est le plus important.
« Nous avons un joueur extraordinaire chez nos jeunes. Il n’a que 15 ans, mais dans quelques mois, il pourra jouer avec nous en équipe première », disait un certain Silvio Berlusconi au sujet d’Hachim Mastour en 2014. Débarqué au centre de formation du Milan à 14 ans, le gamin de Reggio Emilia devient très vite un phénomène, un crack, une attraction. Sur YouTube, ses compilations de skills dépassent les millions de vues, l’érigeant au rang de future star du ballon rond, et les contrats publicitaires coulent à flots (Nike, Red Bull pour ne citer qu’eux). Rarement un jeune joueur de 14 ans aura suscité autant de convoitises dans le football. « Je veux gagner le Ballon d’or et un jour, j’y parviendrai », lâchera-t-il à la Gazzetta dello Sport lors de son arrivée à Milan. Véritable attraction, Mastour connaît même sa première sélection avec le Maroc en juin 2015 (une minute jouée face à la Libye), alors qu’il n’a encore jamais joué un match en professionnel. La folie.
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Mais ce buzz s’estompe, et le néo-international marocain peine terriblement à gratter du temps de jeu avec l’équipe première rouge et noir. Le temps est venu de se faire les dents ailleurs. Durant deux saisons, le fan numéro un de Neymar est prêté à Malaga (2015-2016) puis au PEC Zwolle (2016-2017), sans succès. Rapatrié en Lombardie, Hachim Mastour doit se contenter des entraînements durant lesquels un certain Gennaro Gattuso – alors nouvel entraîneur rossonero – lui met la pression, le menaçant de lui casser les dents s’il ne fait pas d’efforts. À l’été 2018, c’est la descente aux enfers pour l’ancienne égérie Red Bull, vendue définitivement par le Milan. Les expériences non concluantes s’enchaînent alors : en Grèce, en Serie B puis en Serie C.
Si bien qu’à l’été 2021, Mastour se retrouve au chômage pendant plus d’un an. « J’ai fait l’énorme erreur de faire confiance à de mauvaises personnes qui m’ont clairement dit qu’ils allaient détruire ma carrière. Ils me disaient que je n’allais plus jamais jouer au football, que je n’étais simplement qu’une machine à sous, et c’est tout », déclarait-il l’été dernier. Au fond du trou, donc. À seulement 24 piges, le jeune Hachim a tout simplement disparu des (grands) radars. Comme il paraît lointain, le temps où il enchaînait les publicités avec Neymar. Et après une année à broyer du noir, l’homme au dégradé soigné prend une décision radicale : repartir de zéro.
C’est donc en deuxième division marocaine que le meneur de jeu pose ses valises, du côté de Zemamra, modeste ville de 13 000 âmes située à 80 kilomètres de la côte, entre El Jadida et Safi. Dans l’anonymat le plus total, Hachim Mastour s’engage avec le Renaissance Club Atlhletic Zemamra, habitué à faire l’ascenseur entre la première et la seconde division. Loin des projecteurs donc, l’ancien Rossonero se libère et enchaîne les bonnes prestations, débloquant même son compteur lors de son premier match. Et petit à petit, les performances du bonhomme font parler dans le pays royal. La raison de ce regain de forme ? L’absence de pression, comme il l’explique lui-même : « Je sais que beaucoup se sont moqués de ce choix de rejoindre Zemamra. Mais ma seule et unique volonté, c’est celle de jouer au football et d’être traité comme un jeune garçon de 24 ans qui fait des erreurs, qui n’est pas parfait, mais qui est déterminé à s’améliorer pour pouvoir réussir sa carrière grâce à ses sacrifices et son travail », se justifiera Mastour.
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Une fabuleuse saison sur le plan personnel, mais aussi et surtout collectif. Dans la course au titre et à la montée avec le Youssoufia Berrechid et le Stade marocain, le Renaissance Zemamra s’adjuge le titre de champion de Botola 2, ainsi que l’accession à la première division lors de l’ultime journée après un net succès (3-0) à la maison face au Widad Temara, match durant lequel Hachim Mastour, brassard de capitaine autour du bras, réalisera encore une fantastique prestation. « Je tiens à dire que rien ni personne ne m’arrêtera à part Dieu », réagira dans la foulée l’ancien collègue de M’Baye Niang.
Le bien du pays
Auteur d’une saison cinq étoiles, Mastour décide de prendre son envol et s’engage avec l’Union Touarga, huitième lors de l’exercice 2022-2023 en première division. « Très heureux et honoré d’avoir signé pour Real Maroc et hâte de commencer ce nouveau chapitre. Je donnerai absolument tout ce que j’ai pour aider cette équipe à gagner et à atteindre nos objectifs. Je tiens à remercier les personnes qui ont permis que cela arrive et qui seront avec moi dans cette aventure », affirme-t-il sur ses réseaux sociaux. Très loin encore des grands championnats européens, le droitier va tout de même découvrir la Botola Pro 1, l’un des meilleurs championnats nationaux sur le continent africain.
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Un step qui a tout d’un véritable test pour Mastour. À 25 balais, le Lion de l’Atlas doit désormais montrer qu’il dispose des qualités pour se montrer performant dans un championnat dans lequel le niveau est plus relevé, les attentes et exigences plus nombreuses et surtout une médiatisation non négligeable. Tant de facteurs qui lui ont causé du tort ces dernières années, alors qu’il n’avait qu’une seule envie, prendre du plaisir. Et qui sait, pourquoi pas, conquérir le cœur d’un certain Walid Regragui, qui a toujours un œil sur le championnat national. « Je suis toujours de très près ce qui se passe dans notre championnat et dans nos académies. On essaie d’être une locomotive en Afrique. Maintenant, il ne faut pas s’endormir et continuer nos efforts », haranguait le sélectionneur des Lions de l’Atlas. Nul doute donc que les prestations de Mastour seront suivies de près par le divin chauve. Le prochain Mondial a lieu dans trois ans, cela lui laisse le temps de se refaire une santé. Hachim Mastour numéro 10 et capitaine du Maroc lors de la prochaine Coupe du monde en terre américaine, qui prend les paris ?
Par Tristan Pubert