ACTU MERCATO
Niko Kovač, le Rocher encore délaissé
Après Claude Puel au début du mois et Laurent Batlles quelques heures plus tôt, on connaît le nom du troisième entraîneur de Ligue 1 viré cette saison : Niko Kovač. Un petit tremblement de terre à l’échelle du Rocher monégasque, tant le technicien croate était parvenu à se forger une solide réputation dans l’Hexagone en l’espace de dix-huit mois, son bilan global étant loin d’être une farce. Mais qu’est-ce qui a donc pu motiver les dirigeants de Monaco à prendre une décision si inattendue ?
Le 6 juillet 2020, Oleg Petrov – président de l’AS Monaco – intronise en conférence de presse son nouveau directeur sportif, l’Anglais Paul Mitchell, et lui confie une mission : redonner du sens à un projet qui s’essouffle. Histoire de montrer qu’il n’est pas venu faire de la figuration, le Britannique met simplement treize jours à confier les clés du camion à Niko Kovač, un technicien rigoureux prônant un jeu offensif, accompagné d’un pressing intense. Ce qui manquait cruellement à l’ASM à ce moment-là. Un an et demi plus tard, le Croate vient d’être renvoyé, pile à la moitié de son contrat, un peu à la surprise générale. Les informations de L’Équipe sont claires : le trio Dimitri Rybolovlev, Oleg Petrov et Paul Mitchell, à la tête du navire monégasque, estime que Kovač n’est plus l’homme de la situation. Le quotidien avance un manque de cohérence sur le plan tactique, une identité de jeu qui se délite et une gestion des jeunes à la limite du raisonnable. Un constat qui peut étonner si l’on estime que le coach à la mèche impeccable est à l’origine de l’avènement de plusieurs gamins tels qu’Aurélien Tchouaméni, Sofiane Diop ou encore Youssouf Fofana. Plutôt calme et charismatique sur son banc lors des matchs, le Berlinois de naissance était un autre homme à l’entraînement, où les cris et les exercices plus qu’intensifs étaient souvent de mise. Ce qui a fini par agacer.
Les matchs de gala lui ont joué des tours
D’un point de vue comptable, puisque c’est souvent cela qui importe, l’AS Monaco réalise une saison plutôt moyenne dans l’élite. Sixièmes, à quatre points du podium, les Monégasques ne sont pas laissés distancer après des débuts laborieux et ont même remonté la pente récemment, avec trois victoires sur les quatre dernières rencontres disputées en Ligue 1. Mais alors que l’ASM a pour objectif de retrouver la Ligue des champions au plus vite, le bât blesse dans un domaine crucial : les gros matchs. À la mi-saison, le bilan pèse lourd. Monaco s’est fait endormir à domicile par l’OM (0-2), n’a pas existé à Lyon (2-0), a concédé le nul contre Lille (2-2) et s’est récemment fait éteindre par Kylian Mbappé au Parc des Princes (2-0). Sur la scène continentale, après avoir échoué à passer le barrage de C1 face au Shakhtar Donetsk à la fin de l’été, les Monégasques ont validé leur ticket pour les huitièmes de finale de Ligue Europa en terminant premiers de leur poule. Mais ce n’est pas encore assez, et dans les hautes sphères du club, le mot d’ordre est clair : on n’a pas le temps d’attendre. Sur les 38 derniers mois, Monaco a donc procédé à cinq changements d’entraîneur, signe d’un manque criant de stabilité.
Mission pas si échouée
Si son passage au Bayern Munich entre avril 2018 et novembre 2019 n’a pas été une franche réussite – malgré les titres en Bundesliga et en Coupe d’Allemagne – Kovač n’a en revanche pas à rougir de son bilan à Monaco. Durant son bail de presque dix-huit mois en Principauté, le manager de 50 ans peut se targuer d’avoir séduit un championnat, d’avoir fait consensus auprès de ses homologues français (il n’était pas rare d’entendre des coachs français louer son caractère et ses qualités) et a emmené les siens jusqu’en finale de Coupe de France en mai dernier, où le PSG lui était logiquement supérieur (2-0). La fin de l’exercice 2020-2021 est aussi à mettre à son crédit, l’ASM finissant à la troisième place du championnat, après n’avoir concédé que deux défaites entre la 16e et la 38e journée. Son Monaco, par moment inarrêtable, était alors considéré comme une des meilleures équipes de l’élite. « C’est vrai qu’on a marqué beaucoup de buts jusqu’à présent, mais en comparaison avec les autres, on en a aussi encaissé énormément. C’est ça, la différence : l’expérience. On a encore besoin de temps », disait-il modestement dans nos colonnes en avril dernier. Son temps, malheureusement pour lui, est désormais écoulé et ses propos dans le numéro 185 de So Foot prennent désormais tout leur sens : « Quand on se fait virer, il faut se demander ce que l’on peut apprendre et retenir de cette expérience, dans sa vie et dans son métier, avant de repartir. C’est valable dans le sport comme dans le reste. De toute façon, le football est un miroir de la vraie vie. » Et Monaco vient de lui offrir un bon coup à réfléchir devant la glace.
Par Alexandre Lejeune