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Nicolas Cloarec : « En Coupe de France, au départ, tu es le gibier et à un moment, tu deviens le chasseur »

Propos recueillis par Alexandre Le Bris
Nicolas Cloarec : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>En Coupe de France, au départ, tu es le gibier et à un moment, tu deviens le chasseur<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Pour certains, la Coupe est une histoire d’un soir. Pour Nicolas Colarec, c’est plutôt la rampe de lancement de projets. Sur le banc de Plabennec, il vivra face à Grenoble (Ligue 2) son sixième seizième de finale en moins de dix ans, avec une troisième équipe différente (après Concarneau en 2014, 2015, 2016 et 2018, puis La Montagne en 2021). Une belle revanche après avoir traversé un burn out l'écartant des terrains un an durant.

Nicolas, samedi à 18h, vous disputerez face à Grenoble votre sixième 16e de finale de Coupe de France. Qu’est-ce que cela dit de vous ? Au niveau de la constance dans la performance, surtout dans différents club, cela m’amène à une prise de conscience en ma capacité à faire avancer des projets via cette compétition. Mais je n’ai pas envie d’endosser le costume de spécialiste, car la Coupe reste tellement aléatoire. Et puis l’humilité fait partie des valeurs qu’il faut véhiculer à son équipe, donc cela commence par moi. On ne se met pas de maillot jaune soi-même.

Vous évoquez d’abord la notion de projet alors que la Coupe semble plutôt être vouée à des coups d’éclat à première vue ?Quand j’ai débuté à Concarneau, on s’est déterminés à faire de la Coupe un objectif pour redimensionner le club au niveau économique, lui donner plus de force. Ça a été le détonateur, ça a engendré de l’engouement au stade, ça a donné aux gens l’envie de nous suivre et donc permis de les fidéliser. Concarneau a évolué grâce à la Coupe de France.

La Coupe, c’est presque de l’argent « facile », un moyen de faire subsister ton club.

Finalement, la notion de « magie de la Coupe » intervient-elle encore au vu des enjeux ? Il ne faut pas être blasé de cette expression. Cet été à Plabennec, nous avons été relégués administrativement en R1. Le contexte économique est difficile. La Coupe, c’est presque de l’argent « facile » , un moyen de faire subsister ton club. Quand on en a conscience, il faut responsabiliser les joueurs par rapport à ça, leur faire comprendre qu’ils sont acteurs de leur propre « entreprise » , du destin de leur club.

Quels sont les autres leviers que vous activez auprès de vos joueurs à l’approche de ces matchs particuliers ? Je crois qu’il faut leur donner l’appétit, les stimuler sur le plan mental. Sur la causerie d’avant-match, on doit trouver les mots justes, toucher les points sensibles des joueurs. Moi, je leur parle cash. Globalement, je n’ai pas de recette. Sur le match, il faut aussi percevoir les choses pour, parfois, amener le calme quand c’est tendu ou bien monter le son s’il le faut.

En seizièmes de finale, on entre dans une nouvelle compétition avec l’opportunité de jouer des gros clubs. C’est ce qui vous plaît le plus ?Une partie de la Coupe est désagréable quand on n’est pas du bon côté du fusil, quand tu joues un plus petit. Il faut être fort et montrer qu’on est au-dessus. Au départ, tu es le gibier et à un moment tu deviens le chasseur. Tu peux t’amuser avec le fusil pour faire basculer la hiérarchie, avec un côté lutte des classes car les statuts peuvent sauter.

Dès votre première participation, vous aviez plutôt bien manié le fusil avec Concarneau en sortant le FC Nantes sur un score sans appel. Ça reste une émotion forte ? C’était mon club de cœur, le club de ma ville. En face de Nantes, même en D2, ce n’était pas rien. Je me rappelle que j’avais dit aux joueurs que si on tenait le premier quart d’heure sans prendre de but, on arriverait à les battre. On était le piège parfait, car ils étaient mal en point en championnat. On les a battus 3-0, propre et à la régulière, dans un stade en liesse.

On avait cadré le moment en disant aux joueurs qu’ils n’avaient que quinze minutes à se tenir pour représenter le club et ne pas faire n’importe quoi sur la pelouse.

Vous avez d’autres faits d’armes dont une épopée en 2015, terminée en quarts de finale face à Guingamp. De quoi vous souvenez-vous ? C’est peut-être prétentieux, mais le parcours est assez flou, car on a enchaîné trois belles éditions d’affilée. Je me rappelle qu’on avait fait tombé le Niort de Régis Brouard, puis le Dijon d’Olivier Dall’Oglio. En huitièmes, on avait gentiment amené le match aux pénos, car c’était le seul moyen de le gagner. Puis ensuite, on a amené 18 000 personnes, la capacité de la ville, au Moustoir pour le quart. J’avais compris qu’on n’allait pas gagner ce match… Finalement, c’est une ogive de Claudio Beauvue en toute fin de match qui avait mis fin à notre parcours.

Vous aviez été Petit Poucet de cette édition, qu’est-ce que cela représente ?Ça reste un beau souvenir dans ma carrière, ça se mérite. C’est une mise en lumière fédérale. C’est un titre honorifique qui fait plaisir et qui touche, ça récompense la volonté du club de faire la Coupe. Pour l’occasion, on avait été invités au Stade de France pour la finale, on devait faire un passage sur la pelouse. On avait laissé quartier libre aux joueurs et ils étaient arrivés… fatigués. On avait cadré le moment en leur disant qu’ils n’avaient que quinze minutes à se tenir pour représenter le club et ne pas faire n’importe quoi sur la pelouse.

C’est comme l’étiquette du spécialiste de la Coupe, je ne veux pas être considéré comme l’entraîneur qui a fait un burn out.

Un des faits marquants de votre carrière d’entraîneur est que vous avez dû mettre de côté le football pendant un an après un burn out subi en milieu de saison 2019. Acceptez-vous d’en parler avec le recul ? Oui, pour montrer que c’est quelque chose qui n’arrive pas qu’aux autres, et aussi car c’est derrière moi à présent. Mais c’est comme l’étiquette du spécialiste de la Coupe, je ne veux pas être considéré comme l’entraîneur qui a fait un burn out.

Comment est-ce que vous l’avez détecté ? Je n’en pouvais plus. C’est un épuisement au point de n’avoir plus les ressources pour travailler. Dès le début d’année, je sentais que ça n’allait plus, mais j’ai continué, car la suite n’était pas prête à Concarneau. Mais à un moment, je ne voulais plus tricher, j’avais besoin de souffler et de respirer. J’ai mis plus qu’un genou à terre, je me suis allongé au sol. Mais on a des responsabilités, on se fait virer, on tombe, on se relève. Moi j’ai ma famille, mes enfants, j’ai mes soucis comme tout le monde et je ne pleure pas.

Aujourd’hui, qu’en est-il ? Je fais de nouveau avancer ma vie dans le bon sens. Il faut se reconstruire et avoir conscience que ça prend du temps, pour repartir de l’avant. Ce que j’ai réussi à faire à La Montagne m’a permis de reprendre confiance en ma capacité à faire avancer un projet. Et Plabennec fais partie du processus de reconstruction. Je ne suis pas trop mécontent de ce retour.

Dans cet article :
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Propos recueillis par Alexandre Le Bris

Tous propos recueillis par ALB.

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