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Neymar, de guerre lasse
Définition de l'arroseur arrosé : blessé à la cheville droite lors d'un match amical de préparation à la Copa América face au Qatar – pays qui l'emploie indirectement –, Neymar est de nouveau sur le flanc. Le tout en faisant face, à Paris, à des accusations de viol. Sale début d'été.
Belle ironie : c’est en retrouvant la chaleur du Brésil, endroit devenu cocon de repos à chacune de ses blessures, que Neymar a de nouveau refroidi sa fin de saison. Par deux fois, d’ailleurs, les malheurs n’arrivant jamais seuls, et le bonhomme étant visiblement destiné à devenir cobaye de la loi de Murphy. Ainsi, mercredi à 19h44, tout allait bien. Puis à 19h45, les spectateurs affalés devant leur télé et un ventilateur (il faisait 25°C avant-hier à Brasilia) ont pu voir de leurs yeux ce qu’il leur était annoncé depuis le début de la journée. Sur le deuxième plus important réseau de télévision brésilien, SBT, une jeune fille aux cheveux blonds, ramassés à la va-vite en une queue de cheval de saut du lit, glissée dans un T-shirt gris qui pourrait être un pyjama. On la croirait réveillée d’un cauchemar, les mots qui sortent de sa bouche sont pourtant ceux d’une femme à qui il est arrivé réellement malheur. Pêle-mêle : « Traumatisée » , « agressif » , « viol » .
Il ne s’agit que de longs extraits, un « best-of » censé faire monter la sauce avant lundi prochain, date de la diffusion in extenso de l’entretien, mais suffisamment explicites pour pénétrer les murs du vestiaire domicile du Stade national de Brasilia, enceinte la plus chère du Mondial 2014 (400M) et servant désormais, au choix, de salle de mariage ou de garage à bus. Là, dans les entrailles d’une enceinte qu’on surnomme « l’éléphant coloré » , assis sur un banc, Neymar se bande les chevilles. Quelques heures plus tôt, il a publié une photo sur Instagram accompagnée du message suivant : « Aujourd’hui, je joue une des parties les plus difficiles de ma carrière, si ce n’est la plus difficile (à cause des circonstances) » . La jeune femme blonde, Najila Trindade Mendes de Souza, est celle qui l’accuse de l’avoir violée dans une chambre d’hôtel parisienne, sujet aux lèvres du pays tout entier au moment où l’accusé pose le pied sur la pelouse d’un match amical de préparation à la Copa América, contre le Qatar. Il est 21h. À 21h17, Neymar s’écroule, son pied droit vient de tourner à la suite d’un duel à l’épaule. VDM.
Neymar n’est plus un joueur de foot
Alors quoi ? Traitons la chose comme si Neymar était encore un joueur de foot. Le bonhomme souffre d’une « entorse sévère du plan latéral externe de la cheville droite » selon les premières observations de Rodrigo Lasmar, médecin de la Seleção, dont l’immédiat réflexe a été de lui poser une poche de glace sur la malléole. Là même où d’autres poches de glace avaient été posées par d’autres médecins avant lui, dans d’autres stades, entouré d’autres coéquipiers. Foulure en attendant pire, puisque le souci pourrait, en cas de rechute du cinquième métatarsien, engendrer une nouvelle absence de plusieurs mois du Brésilien. Depuis son arrivée au PSG, soit il y a moins de deux ans, c’est sa neuvième blessure. Mieux, la dix-huitième depuis 2014. Autant dire qu’on le voit plus souvent béquilles en mains que ballon aux pieds, le bonhomme passant pour l’unijambiste le mieux payé du comté, culbutant de guérison en guérison et de rédemption en rédemption, pour mieux se casser la gueule derrière.
Le comble, cette fois, est d’avoir rechuté contre le Qatar. Un pays qui, depuis qu’il a croisé sa route, l’a transformé. Médiatiquement, d’abord. Sportivement, ensuite. Neymar n’est plus un joueur de foot. Il fut tour à tour un ambassadeur, un produit d’appel, une tête d’affiche, un porte-drapeau, un symbole d’échec, une poupée de porcelaine, un chouineur, un simulateur, un fils à papa, un mauvais perdant, un violeur. Voilà plusieurs années que l’équipe du Brésil est résumée à son meneur de jeu, un postulat acceptable en 2014, beaucoup moins face à l’effectif complet dont dispose aujourd’hui Tite. Et c’est à se demander si la poisse qui l’accompagne désormais n’est pas la conséquence d’un rite vaudou, tant les courbures de sa carrière sont désormais dénuées de régularité.
Pêcheur hameçonné
Toute vedette qu’il soit, et en attendant les résultats de l’enquête concernant sa victime présumée, qui connaît par ailleurs son lot quotidien de rebondissements (déballage des échanges, fuite du certificat médical du mannequin, déclarations contradictoires des avocats, vidéo de l’agression, témoignage public), il est hautement symbolique de voir le Brésilien ramené ainsi dans le monde des vivants. On dit les footballeurs déconnectés de la réalité du monde, perchés sur une autre planète, et voilà leur représentant le plus starifié attrapé la main dans un sac de bonbons comme n’importe quel idiot de cette terre. Les hommes sont égaux face aux femmes. Change le décorum : la chambre, la femme, le prix des fringues jetées par terre, la douceur de la moquette. Mais Neymar fait aujourd’hui face à des problématiques qui ne collent pas avec son rang social : depuis trois jours, il n’est plus qu’un infirme accusé de viol. Un boiteux croyant, fort heureusement, ce qui fit dire à sa mère avant sa blessure qu’il devait « revenir vers Jésus » et faire « ce qu’il aime le plus au monde, jouer au foot » . Raté. On parle surtout là d’un homme blessé et engagé dans des affaires qui empêchent de facto sa vente du PSG à quiconque, pour peu que ces derniers l’aient voulu. Il se dit victime d’un « piège » ? Ça tombe bien, le PSG se demande exactement la même chose.
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